© SONIA KLAJNBERG POUR LE VIF/L'EXPRESS

Gestion de fortune : qu’attendre de votre banquier ?

Philippe Berkenbaum Journaliste

Banque privée, société de gestion, banque généraliste et filiale d’établissement étranger, les solutions sont diverses mais pas toujours appropriées. A combien se chiffre votre patrimoine ? Nous avons répertorié les services en fonction de vos avoirs.

1. MOINS DE 100 000 EUROS : LE CLÉ SUR PORTE

Inutile de chercher, les portes des banques privées ne s’ouvriront pas si vous disposez d’un patrimoine inférieur à 100 000 euros… sauf si votre famille est déjà cliente. Vous pouvez en revanche vous tourner vers les banques généralistes. Le service Belfius Personal Global Portfolio, un module de placements axé sur la gestion de la volatilité, est ainsi accessible à partir de 50 000 euros, indique Marc Hainaut. Des sociétés de gestion proposent également leurs produits à tout un chacun, dès 250 euros chez TreeTop.

Fonds patrimoniaux

La première étape consiste à dresser votre profil d’investisseur, une obligation légale. Vous serez ensuite orienté vers des solutions de placements  » clé sur porte  » : des fonds adaptés à chaque profil d’investisseur et associés à des outils de reporting pour vous permettre de suivre votre portefeuille.

Chez Belfius, un conseiller attitré vous aidera à établir un portefeuille global de fonds de placement, comprenant notamment des EFT ou trackers. ING vous promet l’accès à une architecture ouverte avec une offre de fonds incluant ceux de la banque et de cinq autres gestionnaires de renom.

Peu de frais, peu de services

Traditionnellement, aucune commission de gestion n’est due pour de petits patrimoines, le client devant s’acquitter des frais directement liés aux placements. Les services annexes sont toutefois assez limités.

Du côté de Belfius, le conseiller vous guide mais ne vous proposera pas de plan personnalisé en matière de transmission par exemple. A fortiori depuis la loi de 2014 qui a réglementé le métier de planificateur financier. L’équipe de spécialistes de la banque peut toutefois se mobiliser pour accompagner une famille dont le patrimoine global serait supérieur, la banque ayant fait des familles un de ses chevaux de bataille.

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 » Sous 250 000 euros de patrimoine, nos clients ont accès à un service desk (téléphone ou en ligne) « , explique Jacques Berghmans. En matière de planification, TreeTop offre le même service à tous ses clients, les orientant vers des conseillers spécialisés.  » Ce n’est pas le métier du banquier de conseiller ses clients en matière de succession, une situation potentiellement source de conflits d’intérêts.  »

2. DE 100 000 À 500 000 EUROS : BIENVENUE DANS LES BANQUES PRIVÉES

Cette catégorie de patrimoine est appelée mass affluent et recouvre les personnes certes aisées, mais pas assez pour une offre complète de banque privée. Le segment est important, disposant de 43 % des richesses mondiales, davantage que les personnes fortunées (plus d’un million de dollars), ce qui explique l’intérêt des banques privées. Degroof Petercam ou TreeTop proposent ainsi des mandats de gestion à partir d’un patrimoine de 250 000 euros, un seuil se situant dans la moyenne du marché.

Une gamme de produits étendue

Deux types de mandats de gestion sont à distinguer. Dans le cas d’une gestion conseil, le client a le dernier mot sur chaque opération, une solution destinée à ceux qui veulent ou peuvent y consacrer le temps nécessaire. En gestion discrétionnaire, le client confie son patrimoine dont il peut suivre l’évolution grâce aux différents outils de reporting.

Plus votre patrimoine est important, plus les frais de gestion seront réduits et plus vous aurez accès à des services sur mesure

Les fonds patrimoniaux sont complétés d’une large gamme de produits afin de répondre aux demandes spécifiques : sauvegarde maximale du patrimoine, gestion durable, etc. Cela peut aller des fonds sectoriels aux produits de gestion alternative (gestion par  » robot « , hedge funds…) en passant par des fonds d’autres gestionnaires. Certains comme Degroof Petercam proposent également d’investir directement en valeurs individuelles (actions, obligations).

Des services payants

La palette de services est plus large, un banquier attitré – mais pas réellement privé – vous guidant dans la gestion de vos placements, la transmission de votre patrimoine, le financement de l’entreprise familiale, etc. Soit en faisant appel aux experts internes de l’établissement, surtout pour des opérations courantes et les grandes structures. Soit en ayant recours à un professionnel extérieur pour les plus petites sociétés de gestion et les opérations complexes. Ce sera évidemment aussi le cas si le client veut passer devant notaire, indique Benoît Daenen.

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Revers de la médaille, le mandat de gestion implique des coûts. Impossible toutefois d’établir un classement tant les paramètres sont nombreux. La commission de gestion dépend de la taille du patrimoine, du type de produits choisis et peut se compléter de droits de garde, de frais d’opération sur titres… Du côté de Degroof Petercam, la gratuité est de mise si vous vous contentez des fonds patrimoniaux (au sein desquels des frais de gestion sont toutefois prélevés) mais la commission de gestion peut grimper jusqu’à 0,605 % par an pour un portefeuille comprenant des valeurs individuelles.

3. SUPÉRIEUR À 500 000 EUROS : DES SOLUTIONS SUR MESURE

Du côté de Belfius, le client a accès à l’ensemble des services de banque privée à partir de 500 000 euros, un seuil qui peut passer à 750 000 euros, un million, voire deux millions pour les valeurs individuelles à la Banque de Luxembourg. Ce seuil marque pour chaque banque la charnière entre le mass affluent et les personnes fortunées. Plus votre patrimoine est important, plus les frais de gestion (calculés en pourcents) seront réduits et plus vous aurez accès à des services sur mesure.

Discrétion et services exclusifs

En matière de placements, ce private banking  » complet  » est synonyme de portefeuille sur mesure. Pour les patrimoines conséquents, Degroof Petercam offre même la possibilité de participer au financement direct de sociétés non cotées en Bourse, d’investir dans la philanthropie.

En matière de services de gestion patrimoniale (transmission, etc.), le fonctionnement s’avère relativement identique, mais la grande différence se situe au niveau de la disponibilité. Chez Belfius, les personnes disposant d’un patrimoine de plus de 1,5 million d’euros ont ainsi accès au wealth management, un service offrant notamment  » une équipe dédiée composée des meilleurs experts dans tous les domaines « .

La Banque de Luxembourg propose également des services de family office aux clients qui disposent d’un patrimoine important. Ils comprennent notamment un reporting consolidé (incluant les avoirs dans d’autres établissement bancaires), ainsi que des services d’accompagnement liés à la transmission, la gouvernance familiale ou l’éducation de la génération montante.

La mode n’est toutefois pas au bling-bling. Au contraire, les établissements misent plutôt sur la discrétion et les invitations exclusives. L’art a notamment la cote, alliant le plaisir des yeux à un rendement attractif, avec une moyenne de 9 % par an pour une oeuvre de 20 000 euros selon Artprice. Des banques privées sponsorisent ainsi d’importants événements ou dépêchent des spécialistes pour accompagner leurs clients.

Par Cédric Boitte, coordonné par Philippe Berkenbaum.

Comment diversifier son patrimoine ?

En matière de placements, le premier conseil est souvent de diversifier ses positions. Ce qui devient mission impossible avec un capital réduit sachant qu’il faut multiplier les investissements en actions et que certaines obligations exigent un placement minimal de 100 000 euros. La solution réside dans les fonds de placement. Le gérant chargé d’investir les capitaux mis en commun accumule plusieurs dizaines, voire centaines de positions – surtout dans le cas des fonds de fonds, soit un fonds investissant lui-même dans d’autres fonds. Jacques Berghmans (TreeTop) épingle par ailleurs que les fonds sont fiscalement attractifs, bénéficiant d’une exonération de précompte mobilier sur les dividendes perçus.

Comment obtenir une rente ?

En fin de carrière se pose la question du maintien du niveau de vie. Cela nécessite souvent un complément sous la forme d’une rente, un objectif compromis par la chute des taux. Il y a donc lieu de s’intéresser à d’autres types d’investissements, le site de Degroof Petercam proposant même un simulateur – qui sert aussi à obtenir vos coordonnées. Concrètement, les solutions s’orientent vers des placements alternatifs aux produits d’épargne comme des obligations à haut rendement (en raison de la devise ou de la solvabilité) ou les sociétés immobilières qui offrent des dividendes récurrents. Généralement, le conseiller vous proposera de scinder votre patrimoine, une première partie étant investie dans des placements de croissance afin de reconstituer votre capital à terme et la seconde servant à effectivement générer une rente.

La gestion low cost

Dans leur ouvrage Investment : a History, les professeurs Norton Reamer et Jesse Downing expliquent comment la démocratisation de l’investissement a permis l’émergence d’une caste financière. La clé réside dans le maintien de frais relativement élevés malgré la hausse des capitaux gérés. Cette évolution semble toutefois progressivement arriver à son terme avec le développement de la gestion dite passive.

On pourrait également parler de non-gestion, ces produits (ETF, trackers, fonds indiciels) se contentant de dupliquer un indice de référence comme le Bel 20 ou (plus couramment) un baromètre élargi comme le Stoxx Europe 600. Une solution économique, mais synonyme d’un important manque à gagner pour l’industrie financière. Un fonds classique affiche des frais de gestion de l’ordre de 1 % par an contre à peine 0,2 %, soit cinq fois moins, pour la gestion passive. Selon Moody’s, cette dernière pèse déjà 6 000 milliards de dollars au niveau mondial et 28,5 % des actifs sous gestion aux États-Unis. L’agence voit cette part grimper à 50 % d’ici quatre à sept ans. Un succès qui ne surprend pas Jacques Berghmans.

« En moyenne, 95 % des fonds gérés activement procurent un rendement inférieur aux indices. » TreeTop a ainsi lancé un fonds passif sur un indice boursier mondial en 2015, complétant sa gamme de fonds traditionnels, « dont les performances se situent dans le haut du panier ». Certains redoutent toutefois que le succès de la gestion passive ne fausse les marchés, la valorisation des entreprises composant les indices étant artificiellement gonflée. Jacques Berghmans recommande ainsi généralement d’investir moitié-moitié dans des fonds gérés activement et des produits indiciels.

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