A Tirlemont, dans le Brabant flamand, un élève de 6e année a été détecté positif au Covid-19 au sein de l'Athénée GO !. © BELGA

Faut-il fermer les établissements scolaires touchés par le coronavirus?

Caroline Lallemand Journaliste

Mardi, un élève de la ville de Tirlemont (Tienen) dans le Brabant flamand a été détecté positif au coronavirus après un retour de vacances en Italie du Nord. La question se pose : faut-il fermer un établissement scolaire confronté à ce type de situation par peur d’autres contaminations ?

La Belgique connait ces derniers jours ses premiers cas de coronavirus. Ils sont limités. On en dénombre actuellement 23, principalement des personnes revenues de zones où une épidémie est en cours, comme la France et l’Italie.

A Tirlemont (Tienen), dans le Brabant flamand, un élève de 6e année a été détecté positif au Covid-19 au sein de l’Athénée GO !. Il a été immédiatement écarté de l’école lundi après qu’un enseignant a été alerté de ses symptômes. Par mesure de précaution, les personnes avec qui il a eu le plus de contacts, deux garçons avec qui il partageait sa chambre lors de ses vacances au ski dans le Nord de l’Italie, ainsi que sa petite amie, ont été invités à consulter un médecin.

Suite à ce premier cas de coronavirus en milieu scolaire, l’Athénée de Tirlemont n’a toutefois pas fermé ses portes. Et il ne semble pas y avoir une grande panique parmi les étudiants de l’Athénée, selon De Standaard qui s’est rendu sur place pour interviewer quelques élèves devant l’établissement.

Le jeune n’est pas gravement malade a tenu à préciser le directeur de l’Athénée qui a envoyé un courrier à tous les parents pour les informer de la situation: « L’école reste ouverte. L’Agence Zorg en Gezondheid (AZG) demande que les camarades de classe du garçon infecté mesurent leur température le matin et le soir pendant 14 jours et contactent un médecin dès qu’ils détectent des signes de fièvre. » Les autres élèves et le corps professoral ont été invités à rester attentifs par rapport à d’éventuels symptômes. Comme l’Aviq en Wallonie et la Cocom à Bruxelles, l’agence régionale flamande des soins et de la santé AZG est chargée de tracer les contacts qu’ont eus les patients infectés par le coronavirus depuis leur retour en Belgique.

Joris Moonens, de l'agence régionale flamande des soins et de la santé AZG
Joris Moonens, de l’agence régionale flamande des soins et de la santé AZG© BELGA

Des écoles des communes avoisinantes ont aussitôt envoyé une communication rassurante à l’attention des parents. C’est le cas notamment de l’école communale d’Hoegaarden située à quelques kilomètres de Tirlemont où l’adolescent contaminé par le Covid-19 réside. « La situation est sous contrôle et la famille de l’étudiant a été mis en quarantaine. Il n’y a aucune raison de paniquer « , a fait savoir l’école aux parents des élèves fréquentant cet établissement qui n’est, par ailleurs, aucunement touché.

Lire aussi: Elève testé positif au coronavirus en Flandre: « Des mesures draconiennes telles que l’annulation des cours ne sont pas nécessaires »

Ce sont principalement des parents angoissés par une éventuelle épidémie qui se demandent s’il ne serait pas préférable qu’élèves et professeurs restent chez eux en quarantaine. Avec comme exemples frappants, en Italie et en France, où les cas de personnes contaminées ont explosé ces derniers jours, des établissements scolaires et crèches fermées jusqu’à nouvel ordre afin de contenir l’épidémie. Le gouvernement italien doit décider dans les prochaines heures de fermeture de toutes les écoles et universités du pays à partir de jeudi jusqu’à la mi-mars afin de limiter la propagation du nouveau coronavirus.

Dans ce contexte, le fait que cette école flamande ne ferme pas peut en effet sembler interpellant. « Mais ce n’est pas le cas« , rassure Joris Moonens de l’agence régionale flamande des soins et de la santé AZG au Standaard. « Fermer une école a un gros impact. Où vont les enfants lorsqu’ils ne sont pas à l’école ? Beaucoup de parents ne peuvent pas organiser une garde d’enfants aussi rapidement. La fermeture n’est absolument pas une solution. Nous conseillerons bien de fermer une classe, une partie de l’école ou l’ensemble de l’école lorsque le virus circulera, sans y appliquer un quota de cas. En outre, une école peut fermer si trop d’enseignants sont touchés par le virus« , commente-t-il. Par ailleurs, les écoles ont la liberté de décider de fermer leurs portes indépendamment des recommandations de l’AZG.

Faut-il fermer les établissements scolaires touchés par le coronavirus?
© reuters

« Des mesures draconiennes telles que l’annulation des cours ne sont pas nécessaires. Nous comprenons que cette situation suscite l’angoisse mais nous invitons tout le monde à rester calme et rationnel. Pour les enfants, les risques sont minimes et il est plus important qu’ils puissent aller à l’école normalement », souligne encore Zorg en Gezondheid à la suite de ce cas repéré à Tirlemont.

Le ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles Pierre-Yves Jeholet (MR) a quand à lui déclaré ce matin qu’on était « loin » de fermer les écoles. « La situation en Belgique n’est pas comparable à celle de la France. Ça n’a pas de sens, aujourd’hui, de fermer les écoles. Il faut des mesures proportionnées », a-t-il assuré.

Le confinement, efficace ?

Le confinement est la mesure la plus emblématique de la lutte des pays européens touchés le plus durement par le Covid-19. L’Italie est en première ligne avec une dizaine de villes mises en quarantaine au sud de Milan ainsi que certaines régions spécifiques de France.

Ce type de mesures, dites de « distanciation sociale » – réduction des rassemblements, fermeture des écoles, télétravail, limitation des transports -, ont pour objectif de circonscrire le plus longtemps possible l’épidémie, afin de gagner du temps, commente le journal français Le Monde.

Mais, ces mesures de restrictions face à un virus hautement transmissible sont-elles adaptées s’interroge le média français ? « Cela vaut le coup pour plusieurs raisons, », estime le Dr Daniel Levy-Bruhl, responsable de l’unité des infections respiratoires de Santé publique France, interviewé par le quotidien.

En freinant la diffusion du coronavirus, le gouvernement français espère éviter le chaos dans les hôpitaux. « La grippe, cette année, est particulièrement gentille, mais il y a quand même quelques personnes en réanimation. Si on avait eu à ajouter les malades du Covid-19, cela aurait été un élément de faiblesse extrêmement fort », souligne le Dr Levy-Bruhl, en rappelant la « fragilité » des établissements de soins.

Il reste aussi des incertitudes sur la saisonnalité du Covid-19, il pourrait bien s’installer dans la durée sur le territoire. Les spécialistes ne savent en effet pas à ce jour s’il pourrait être éradiqué avec l’arrivée des beaux jours. Les premières recherches, fondées sur la comparaison des régions chinoises aux climats différents, indiquent en effet que la température et l’humidité ont peu d’impact sur la transmissibilité du virus.

Les mesures de confinement font partie de la « routine » en cas d’épidémie, mais en réalité elles ont rarement été appliquées rappelle Le Monde. « En 1918 [au début de l’épidémie de grippe espagnole], le gouvernement ne les a pas prises pour ne pas nuire au moral de la population, rappelle Patrick Zylberman, professeur d’histoire de la santé à l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP). Il y avait déjà la guerre : ce n’était pas la peine de réduire encore la vie sociale. »

Selon cet expert, la « quarantaine » classique a une efficacité limitée dans ce contexte. « D’abord il y a toujours des fuites. Ensuite, [en confinant] des personnes asymptomatiques, vous enfermez des gens qui sont indemnes avec des personnes contagieuses, donc vous étendez le mal au lieu de le limiter », estime-t-il. Dans les situations de confinement individuel, d’autres difficultés peuvent apparaître. A Toronto, lors de l’épidémie de SRAS en 2003, des personnes sont restées chez elles pendant dix jours : « A la fin elles se plaignaient de symptômes dépressifs. Cela à l’air anodin, mais cela ne l’est pas complètement », insiste Patrick Zylberman, en rappelant que les infections respiratoires sont d’abord « une histoire de gouttelettes et de postillons. Mettre des palissades, cela ne sert à rien.« 

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire