Anne-Sophie Bailly

Extrême droite: la menace de la désillusion (édito)

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

La rancoeur et le racisme se verbalisent et se traduisent davantage dans les suffrages au nord du pays sans pour autant que le sud puisse se sentir à l’abri d’une montée de l’extrémisme de droite. L’édito d’Anne-Sophie Bailly, rédactrice en chef du Vif.

Quelle que soit l’issue de la traque de Jürgen Conings, l’affaire de ce militaire extrémiste considéré comme dangereux, sa cavale de longue durée, son accès à l’armurerie en dépit d’un fichage de niveau 3 à l’Ocam, les propos ouvertement racistes qu’il a tenus sans que soit remise en question sa position au sein de l’armée, ses soutiens multiples s’apparentent à autant de dysfonctionnements que de désillusions dans l’esprit du plus grand nombre.

En premier lieu, qu’une limitation des moyens alloués ait concentré les ressources disponibles sur la menace la plus sérieuse, la plus grave ou la plus imminente, le terrorisme islamiste, quitte à en sous-estimer une autre considérée comme moins sérieuse, moins grave, moins imminente – mais visiblement pas inexistante – est difficilement acceptable par la population.

La du0026#xE9;sillusion se traduit davantage dans les suffrages au nord du pays sans pour autant que le sud puisse se sentir u0026#xE0; l’abri d’une montu0026#xE9;e de l’extru0026#xE9;misme de droite.

Ensuite, que les mesures prises au lendemain des attentats terroristes de 2016, notamment sur le partage d’informations qui avait tant fait défaut dans le suivi des frères Abdeslam, ne semblent pas avoir été plus efficaces dans celui de Jürgen Conings apporte évidemment de l’eau au moulin de ceux qui considèrent le pays comme dysfonctionnel. Les quelques dizaines de milliers de personnes qui soutiennent le militaire d’extrême droite prouvent que les rangs des désabusés, des déçus, des antisystème ne désemplissent pas. Et cela d’un bout à l’ autre du pays. Car si la rancoeur et le racisme se verbalisent et se traduisent davantage dans les suffrages au nord du pays, le sud ne peut se sentir à l’abri d’une montée de l’extrémisme de droite. Et un Jürgen wallon peut exister demain .

La réponse politique devra être à la hauteur. Elle se met progressivement en place. Doper les effectifs opérationnels de la Défense fait partie de la feuille de route de la ministre Ludivine Dedonder, tout comme le recrutement de jeunes. Restera à revaloriser un métier et une carrière dont l’affaire Conings n’a pas contribué à redorer l’image. Quant à la piste évoquée dans la foulée des attentats de Bruxelles mais abandonnée à la faveur d’une série de recommandations et de meilleures pratiques à mettre en oeuvre, d’une potentielle fusion du SGRS et de la Sûreté de l’Etat, elle refait surface dans le débat. Un rapport du Comité R est attendu pour la fin juin sur cette question. L’ efficacité du fonctionnement de nos services de renseignement devra en découler .

Lire aussi: Le supplice du SGRS

La riposte politique se prépare aussi. Notamment de l’Open VLD. Face aux sympathisants Als 1 achter Jürgen qui ont fait de cet extrémiste le porte-drapeau de leur frustration, savamment entretenue par la team Van Grieken, Alexander De Croo a désormais identifié très clairement l’ennemi de la majorité Vivaldi: le vote séparatiste et le Vlaams Belang . Le tout pour éviter que la menace de la désillusion ne devienne plus grave encore.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire