Pourquoi les repas gratuits à l’école sont en réalité impayables
Le coût des dîners a sensiblement augmenté ces deux dernières années dans les écoles. Une hausse souvent répercutée sur les parents, qui souhaiteraient des repas gratuits. Trop ambitieux?
A la rentrée, quelque 20% des écoles fondamentales de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) bénéficient des repas chauds et sains gratuits, soit 429 implantations, dont 364 situées en Wallonie. Ce qui représente un potentiel de 55.300 élèves pour un coût d’environ 21,4 millions d’euros en 2024.
Ces établissements maternels et primaires appartiennent à l’enseignement spécialisé ou affichent tous un indice socio-économique 5 et moins. Résultat: à Bruxelles, les élèves sont deux fois plus nombreux à fréquenter la cantine (80% contre 40%).
L’idée était d’augmenter encore chaque année cette proportion de 20%. Elle a été bruyamment défendue par le PTB durant la campagne électorale. Le parti d’extrême gauche voulait étendre la gratuité des repas scolaires à tout l’enseignement fondamental, sans restriction. Comme le PS, qui lui souhaitait progressivement offrir un service de repas gratuits dans toutes les écoles ayant un indice socio-économique de 7 et moins. Ce qui coûterait 20 millions d’euros supplémentaires chaque année et, à terme, 102 millions d’euros par an, dès 2029.
Mais le projet d’une gratuité totale n’a pas convaincu au-delà. Dans son programme, Ecolo avançait plutôt l’idée de «fixer un prix abordable». Et les partis au gouvernement communautaire, Les Engagés et les libéraux, étaient sur la même ligne que les Verts. Eux qui viennent d’octroyer cette enveloppe de 21,4 millions n’ont pas évoqué la gratuité dans leur Déclaration de politique communautaire (DPC). «Le Gouvernement développera en collaboration avec les Régions un cadre de directives clair afin que les repas proposés dans un cadre scolaire soient sains et de qualité. Il favorisera les circuits courts et les produits locaux, contribuant ainsi à une économie plus durable et à une politique de prévention santé», lit-on ainsi dans le document.
Un même repas, deux prix différents
En dehors des établissements subventionnés par la FWB dans le cadre du projet repas gratuits, les parents s’acquittent de factures qui varient d’une ville à l’autre, voire d’une commune à l’autre: pour un élève déjeunant à la cantine cinq fois par semaine, 787 euros annuels en maternelle et 841 euros en primaire à Namur, 687 euros en maternelle et 705 euros en primaire à Mons, 673 euros en maternelle et 727 euros en primaire à Bruxelles. Il s’agit du prix pratiqué par les écoles communales. Seules les communes fixent une grille unique des prix à la cantine de leurs établissements: il est alors possible de les comparer. Globalement, l’officiel est moins cher que le réseau libre. Quand les parents paient, dans l’officiel, 633 euros, d’autres, dans le réseau libre, déboursent 814 euros. Avec des différences spectaculaires, parfois. Ainsi, pour un repas identique livré par le même fournisseur, le prix s’élève à 977 euros annuels dans le réseau libre et à 687 euros annuels dans le communal. En 2020, selon une enquête menée par la FWB, 16% des écoles fondamentales et 13% des établissements secondaires proposent des tarifs dégressifs en fonction des ressources des parents ou du nombre d’enfants inscrits à la cantine – une pratique cependant rare dans le libre. Sondés par la Ligue des familles, à la veille de l’élection du 9 juin, les parents, eux, ont fait de leur priorité numéro un, des repas gratuits, sains et durables.
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L’écart entre les écoles s’explique, entre autres, par la différence de subsides entre les réseaux. En réalité, les produits représentent de 20% à 30% du coût de revient. Le solde est consacré aux charges fixes comme les frais de personnel, de nettoyage, de chauffage et d’éclairage. Ces montants sont endossés par l’établissement lui-même et en totalité ou en partie répercutés sur les parents. De fait, la pause de midi est considérée comme «hors du temps scolaire». Du coup, elle n’est pas financée par la FWB.
Par ailleurs, pour un même repas, la composition de l’assiette varie aussi. Le grammage des protéines, la quantité de légumes, des produits éventuellement bio, tout ceci diffère d’une école à l’autre. Ce qui impacte le prix, comme aussi les distances de livraison.
Une mesure à encore évaluer
Généraliser les repas totalement gratuits partout, dans toutes les écoles primaires semble très hypothétique. Un coût impayable, un objectif trop ambitieux vu la situation budgétaire de la FWB. Le coût se chiffrerait à plus de 100 millions d’euros par an. Et si MR-Les Engagés ne remettent pas en cause le décret «repas gratuits» dans les établissements à indice socio-économique faible, ils souhaitent l’évaluer. Le dispositif, lancé en 2018, atteint-il réellement les élèves en situation précaire? Comment toucher ceux qui ne fréquentent pas une école à indice socio-économique faible? Ou, encore, comment assurer l’équité entre élèves si les écoles choisissent elles-mêmes d’adhérer ou pas au dispositif? Des interrogations qui demeurent en suspens.
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