Evras: les cinq théories les plus folles qui circulent sur les réseaux sociaux
Les cours obligatoires d’éducation sexuelle (Evras) suscitent une vague de remous et de protestations. Les histoires les plus folles sur le contenu des cours circulent sur les réseaux sociaux. Voici cinq théories populaires… mais fausses.
Le 7 septembre, le Parlement de Fédération Wallonie-Bruxelles a approuvé un décret : dès cette année scolaire, tous les élèves des écoles de FWB de sixième primaire et de quatrième secondaire doivent suivre un programme d’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle (Evras). Il s’agit de deux animations de deux heures seulement.
Cette décision a suscité une vague de remous en Wallonie et à Bruxelles. Certains parents ne sont pas favorables à l’éducation sexuelle obligatoire alors que d’autres fustigent ce que le guide Evras entend par éducation sexuelle. A Charleroi, la polémique a même conduit à des incendies criminels dans certaines écoles. Le sujet a rapidement enflammé la politique.
Cependant, dans leurs protestations sur les réseaux sociaux, les parents et les sympathisants en colère font souvent référence à des choses qui ne figurent pas du tout dans le guide Evras, ou ils l’interprètent de manière complètement erronée. Ils mélangent des théories sur l’Evras avec des théories sur les points de vue d’institutions telles que l’Organisation mondiale de la santé et l’OCDE sur l’éducation sexuelle.
La plupart des affirmations sont des déformations mineures des faits ou des interprétations correctes qui se heurtent à la pruderie religieuse. Mais parfois, les théories frôlent tout simplement l’absurde. Dans ces cinq cas, le lien avec la vérité est ténu.
1. »Les enfants de cinq ans vont apprendre à se masturber »
Les enfants vont apprendre à se masturber est une affirmation qui revient souvent. Ainsi, un internaute estime qu’il faut refuser qu’on apprenne à « vos enfants, vos neveux et nièces de 5 ans » à se masturber.
Le guide Evras est destiné à la sixième primaire et à la quatrième secondaire. Il est vrai que le guide peut déjà être utilisé pour des enfants plus jeunes – l’école doit décider si c’est souhaitable. Cependant, la masturbation figure parmi les sujets destinés aux enfants de 12 à 14 ans (p. 180). Il est donc conseillé aux enseignants de ne parler de la masturbation qu’à partir de cet âge.
2. Les enfants de huit ans devront regarder de la pornographie
Certains craignent que les enfants soient obligés de regarder de la pornographie : cela traumatiserait gravement des enfants de huit ou neuf ans.
Selon le guide Evras, parler de pornographie avec des enfants de 9 à 11 ans ne doit servir qu’à expliquer ce que c’est. Ce sujet ne peut être abordé que si les élèves posent des questions, ce qui ne serait pas surprenant, car certains enfants de 9 ans seront confrontés à la pornographie pour la première fois. Avec les enfants de 12 ans, la discussion peut porter sur le contenu et les clichés qui y sont associés.
Le Portail des droits de l’enfant de la Communauté française a explicitement déclaré dans un communiqué de presse qu’Evras n’est pas une « promotion de la pornographie ou du contenu pornographique ». Mais il faut apprendre aux enfants à y faire face.
3. « On va inciter les enfants à changer de sexe »
De nombreux utilisateurs de réseaux sociaux sont choqués par les thèmes liés au genre et au sexe. Ces thèmes sont en effet abordés dans le guide. Mais selon certains, le guide Evras « enseignerait » ou « stimulerait » les enfants à devenir transgenres.
Dans le guide, les identités trans ne sont mentionnées que dans les pages destinées à la tranche d’âge 12-14 ans (p. 32). Les enfants plus jeunes peuvent cependant déjà recevoir un enseignement sur le sexe biologique et les identités de genre (p. 28 et p. 30). Mais là aussi, rappelons que la nouvelle loi ne rend l’éducation sexuelle obligatoire qu’à partir de la sixième année et de la quatrième année de l’enseignement secondaire.
Il est vrai que le guide Evras stipule que les enfants peuvent exprimer leur identité trans dès l’âge de sept ans (p. 161). En cas de questions de la part des élèves, les enseignants sont invités à ne parler que du sexe biologique et de l’identité de genre. Les enfants n' »apprennent » donc certainement pas à devenir trans.
Avec les enfants de 12 ans ou plus, on peut toutefois aller plus loin dans les transidentités. Ils apprennent quelles sont les possibilités de transition entre les sexes. Ainsi, s’il y a une demande, les options sont proposées. Mais les élèves ne sont pas « stimulés ». Les enseignants doivent principalement transmettre des connaissances. Ils doivent apprendre aux enfants à adopter une attitude respectueuse envers les personnes transgenres (p. 165).
4. « C’est l’introduction de la pédophilie dans les écoles »
Dans une reprise d’une vidéo TikTok sur X (anciennement Twitter), une femme qualifie l’Evras d' »introduction de la pédophilie dans les écoles ». Selon elle, les cours permettent aux personnes ayant des pensées pédophiles d’imposer leur sexualité aux enfants.
Parler de sexualité avec les enfants n’est évidemment pas la même chose qu’enseigner à ce groupe cible la sexualité entre enfants et adultes. La section destinée aux enfants de 9 à 11 ans recense les relations acceptables et inacceptables (p. 62). La pédophilie y est clairement mentionnée sous le terme « pédocriminalité » comme une relation inacceptable.
L’utilisatrice ajoute le hashtag #pedolandfr. Il s’agit d’une référence à la théorie selon laquelle la France a une approche particulièrement laxiste de la pédophilie et que celle-ci y est plus répandue que dans d’autres pays. Cette théorie du complot française est également populaire en Wallonie.
5. « Les enfants vont devoir se déshabiller »
La théorie la plus absurde est sans doute celle qui veut que les enfants se déshabillent en classe lors de l’enseignement de l’éducation sexuelle. Certains pensent que les enfants seront mis nus devant la classe.
Nulle part, le guide EVRAS stipule que les enfants de cinq à huit ans sont instruits sur la sexualité de leur corps. Tout ce que nous trouvons dans le guide, c’est que les enseignants peuvent parler aux enfants des différentes parties de leur corps, de leur rôle exact et de l’importance d’une image positive de leur corps (p. 51).
Et une fois de plus: l’éducation sexuelle obligatoire n’aura lieu qu’en sixième année de primaire et en quatrième année de secondaire. Il est possible de parler de certaines choses avec des enfants de cinq ans, mais cela se limite aux relations et aux amitiés. La sexualité n’est évidemment pas encore abordée. On peut, par exemple, parler de la famille, de l’amitié et des relations amoureuses (p. 60).
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