Guy Martin
Enodia, ex Publifin : devoir d’insoumission des élus locaux
Quand on est mandataire politique, il est des moments où il ne faut pas respecter la consigne donnée par les autorités de son parti, mais réfléchir. Et avoir le courage de choisir l’intérêt général sur les intérêts particuliers.
De nombreux médias focalisent l’attention du citoyen sur le scandale de l’indemnité versée au CO de Nethys, entreprise dont les propriétaires sont les Communes et la Province du territoire de la Province de Liège.
Mais l’arbre ne doit pas masquer la forêt.
Le vrai problème n’est pas là, même si au niveau éthique le montant de cette indemnité n’est pas acceptable.
Le vrai problème c’est le dépeçage d’Enodia (ex Publifin) et la préparation de la privatisation des bijoux de famille stratégiques (énergie, télécommunication, information, transport avec Bierset et assurances collectives) construit par les pères des pères en région liégeoise pour garantir leurs libertés dans la solidarité.
Car, l’opinion publique et le climat social aidant, par peur et par lassitude, les Communes et la Province se préparent à vendre … trop de risques et trop d’ennuis !
Les autres communes de Wallonie ont bien, jadis, vendu leur réseau de télédistribution. Et faut-il, quand on est un pouvoir public, s’impliquer dans la production d’énergie renouvelable ? Mais que se passera-t-il par exemple si les intérêts privés propriétaires décidaient de ne plus rendre accessible internet à certains ?
Or, toutes les conditions sont réunies pour la vente des activités concurrentielles d’Enodia. L’opinion publique d’abord. Puis, la désignation de trois nouveaux administrateurs de Nethys impliqués tous dans le monde des affaires et qui sont des professionnels expérimentés dans le transfert du public au privé. Et encore un nouveau CO intérimaire de Nethys, patron de la SOGEPA, rodé à la privatisation des biens publics.
Trop de risques ? Trop d’ennuis ?
Pourtant toute notre époque nous montre que l’intérêt privé va souvent à l’encontre de l’intérêt général.
Or les activités d’Enodia via Publifin sont stratégiques.
Que ce soit l’énergie, l’information et sa transmission et bien d’autres activités encore (aéroport) qui font que la région de Liège pouvait être difficilement soumise aux seuls intérêts privés…
En acceptant de dépecer Enodia au motif qu’un pouvoir public n’a pas à s’impliquer dans des activités concurrentielles, les Communes et la Province contribuent à soumettre l’intérêt général aux intérêts particuliers. Elles forcent le citoyen à vendre sa cuisinière pour l’obliger à aller au restaurant.
Au nom d’un « scandale » (18 millions) mis en exergue par les médias aux yeux de l’opinion publique, elles acceptent un plus gros scandale encore (3 milliards) pour voler le citoyen et soumettre la région liégeoise aux seuls intérêts privés.
C’est le moment des choix.
Oui, le chemin est difficile dans un monde globalisé ou le néolibéralisme est hégémonique. Mais cette hégémonie est en fin d’histoire. Les limites sont visibles.
Il existe parfois en politique un devoir d’insoumission.
Puissent les conseillers communaux et conseillers provinciaux avoir le courage de ne pas être de « bons petits soldats » respectueux des consignes de leur parti ( n’est-ce pas un des défauts de l’ex publifin ?) et refuser ce vrai « casse du siècle », bien plus grave que celui de Stéphane Moreau. Même si, il faut le répéter, ce dernier qui s’inscrit dans la logique du néolibéralisme n’est pas acceptable au plan éthique.
Puissent les conseils communaux et provinciaux de la province de Liège refuser la vente des activités concurrentielles d’Enodia pour assurer le maintien de l’intérêt général sur les intérêts particuliers.
Puisse la région liégeoise et ses pouvoirs publics trouver les chemins pour inventer une véritable Entreprise Publique au service du Citoyen (EPSC) , sans vendre les bijoux de famille qui pourraient contribuer à sa richesse… par delà les faiblesses humaines par manque d’éthique.
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