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Energie: les trois clés pour réduire sa facture

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

Si les ménages n’ont pas toujours de marge de manoeuvre, les pistes pour réduire leur consommation deviennent plus rentables à mesure que les prix augmentent. Tour d’horizon en trois temps.

Plus de 3 000 euros d’augmentation sur la facture annuelle de gaz et d’électricité? A ce prix-là, toute alternative au statu quo mérite d’être explorée. Quand ils sont locataires ou exposés au risque de précarité énergétique, les particuliers ont rarement les moyens d’investir en conséquence. Logiquement, la panoplie des pistes activables dépend donc de ces réalités, indépendamment des mesures supplémentaires que le gouvernement a adoptées le 15 mars.

1. Les premiers réflexes

« Il est possible de réduire d’abord les besoins en chauffage par les comportements et par quelques investissements de base », souligne Jean-Philippe Ducart, porte-parole de Test Achats. Quantitativement, c’est le poste le plus important, puisque 74% de l’énergie consommée par les ménages à leur domicile est dédiée au chauffage. Baisser le thermostat d’un degré peut permettre d’économiser jusqu’à 200 euros sur base annuelle, compte tenu des prix actuels de l’énergie. L’association de consommateurs recommande aussi de placer des réflecteurs de chaleur derrière les radiateurs et d’isoler les conduites de chauffage dans les pièces non chauffées. Autant de petits investissements (moins de 50 euros) susceptibles de faire gagner plusieurs centaines d’euros par an.

La première chose à changer? Etre résilient.

En ce qui concerne l’électricité (quand celle-ci ne sert pas à chauffer les pièces), une première mesure évidente consiste à limiter la consommation des nombreux appareils en mode veille, par l’usage de prises dotées d’un interrupteur. Dans le contexte actuel, l’économie réalisée peut s’élever à 150 euros par an, estime Test Achats. Autres mesures rapides: isoler davantage son éventuel boiler électrique pour l’eau chaude et opter pour des ampoules LED dans les pièces les plus souvent éclairées.

2. Mieux isoler

La meilleure énergie est celle que l’on ne consomme pas. Pour les ménages qui en ont la capacité, il convient d’investir dans l’isolation du logement avant d’envisager tout changement d’équipement. Châssis, toit, murs… Moyennant le recours préalable à un auditeur logement agréé (800 à 1 200 euros), les particuliers peuvent bénéficier, sous certaines conditions, de primes régionales couvrant une partie du coût de cette expertise et des travaux à entreprendre – dans l’ordre établi lors de l’audit. Ils peuvent aussi solliciter des prêts à taux 0% pour toute rénovation visant à améliorer la performance énergétique du bâti.

L’isolation est le meilleur moyen de réduire drastiquement sa consommation.

L’isolation des logements plus anciens constitue un chantier gigantesque. Singulièrement au sud du pays: 48% des bâtiments y ont été construits avant la Seconde Guerre mondiale et 27,5% avant 1900, d’après les données de l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (Iweps). Or, la cadence actuelle de rénovation des bâtiments s’avère largement insuffisante, vu l’ampleur des besoins. « Le problème, c’est qu’on n’a pas assez de main-d’oeuvre pour réaliser ces travaux-là, déplore Francesco Contino, professeur à l’Institut de mécanique, des matériaux et du génie civil (IMMC) de l’UCLouvain. Malheureusement, ces métiers souffrent à tort d’une dévalorisation permanente. » L’isolation constitue pourtant l’un des noeuds essentiels de la transition énergétique. Et le meilleur moyen de réduire drastiquement sa consommation.

3. Produire sa propre énergie

« Ensuite, et seulement ensuite, il est utile de se pencher sur le système de chauffage, confirme Jean-Philippe Ducart. Le classement des prix des énergies n’a pas changé malgré les très fortes augmentations: le plus cher reste l’électricité, ensuite le gaz, puis le mazout, le bois de chauffage ou les pellets. Un remplacement de chaudière peut également apporter un gain, mais celui-ci restera limité par rapport aux bénéfices de l’isolation, de l’ordre de 10 à 20% maximum ». L’option visant à substituer le mazout au gaz naturel constituerait un non-sens sur le plan environnemental, d’autant qu’un tel choix ne protège en rien le ménage des futurs records de prix du baril.

La pompe à chaleur consomme de l'électricité, mieux vaut donc la coupler à des panneaux photovoltaïques!
La pompe à chaleur consomme de l’électricité, mieux vaut donc la coupler à des panneaux photovoltaïques!© GETTY IMAGES

En ce qui concerne l’électricité, le placement de panneaux photovoltaïques reste plus que jamais d’actualité pour les toits idéalement exposés, malgré la disparition des régimes de soutien et l’entrée en vigueur du tarif prosumer en Wallonie en 2020 (une redevance forfaitaire de 450 euros en moyenne). Vu l’explosion du prix de l’électricité, le temps de retour sur investissement d’une unité de 3,5 kWc serait désormais inférieur à cinq ans. L’autoconsommation de l’électricité ainsi produite s’avère cruciale pour envisager, à plus long terme, une adoption massive et financièrement intéressante des pompes à chaleur aérothermiques ou géothermiques. Leur marge de progression est considérable en Belgique: actuellement, elles équipent moins d’1% des bâtiments résidentiels ou du secteur tertiaire. Leur taux de pénétration devrait idéalement atteindre 4% en 2030 pour contribuer substantiellement à l’objectif belge de réduction des émissions de gaz à effet de serre à cet horizon (- 35% par rapport à 2005).

Aucune des options ne sera toutefois bon marché. « Même un stère de bois coûte très cher dans le contexte actuel, résume Francesco Contino. La première chose à changer? Etre plus résilient. On peut faire un compromis sur le confort ou sur le coût. Dans le premier cas, on peut s’habituer à ce qu’il fasse 18° C chez soi plutôt que 22. C’était encore la norme il n’y a pas si longtemps. Cela nécessite de ne pas surdimensionner les systèmes de chauffage dans les nouvelles constructions, comme c’est souvent le cas à l’heure actuelle. La seconde option, plus coûteuse, consiste à combiner plusieurs vecteurs énergétiques chez soi: par exemple, des panneaux photo-voltaïques, une pompe à chaleur ainsi qu’un poêle à bois pour faire l’appoint, quand il fait plus froid ou en cas de panne de courant. Il est crucial d’investir dans cette résilience tant que l’on en a la capacité, car il est évident qu’une crise sape les moyens financiers. » Pressés de répondre coûteusement à la flambée des prix des énergies fossiles, les pouvoirs publics s’attelleront-ils à accompagner plus assidûment l’ensemble de la société dans le grand saut de l’indispensable transition énergétique?

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