Sophie Rohonyi
Ecouter et reconnaître les jeunes: une nécessité face à la crise sanitaire
Depuis plus d’un an, nous vivons suspendus aux chiffres relatifs aux hospitalisations, aux admissions dans les services de soins intensifs, aux décès… Parmi nous, il y a les jeunes, très souvent pointés du doigt, alors qu’ils sacrifient aujourd’hui les plus beaux moments de leur existence et se privent des contacts et des expériences dont ils ont besoin pour se construire. Plus d’un an plus tard, ces jeunes ne voient toujours pas le fruit de ces sacrifices. Pire, les perspectives auxquelles ils s’accrochaient ne cessent de s’éloigner.
Depuis plus d’un an, nous vivons suspendus aux chiffres relatifs aux hospitalisations, aux admissions dans les services de soins intensifs, aux décès… Parmi nous, il y a les jeunes, très souvent pointés du doigt, alors qu’ils sacrifient aujourd’hui les plus beaux moments de leur existence et se privent des contacts et des expériences dont ils ont besoin pour se construire. Plus d’un an plus tard, ces jeunes ne voient toujours pas le fruit de ces sacrifices. Pire, les perspectives auxquelles ils s’accrochaient ne cessent de s’éloigner.
Les voyages à l’étranger sont interdits, les bars, restaurants, cinémas et parcs d’attraction sont fermés, les écoles sont fermées, les possibilités d’aller à la mer et dans les Fagnes sont limitées…
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Aujourd’hui, la seule liberté qui leur reste est d’aller au parc avec leur bulle de 4. Un comportement autorisé et sanitairement responsable puisque le risque de propagation du virus à l’extérieur est nettement moindre qu’à l’intérieur. C’était d’ailleurs l’idée du plan « plein air », abandonné en l’espace de 2 semaines par le Comité de concertation. Résultat: Toutes ces bulles se retrouvent au même endroit, en l’occurence au Bois de la Cambre en ce doux 1er avril, mais aussi à Liège, à Gand, à Louvain, et sur les quais des gares vers la côte quelques jours plus tôt.
Les règles sanitaires sont devenues tellement strictes qu’elles ont fini par former un entonnoir contre-productif qui aurait dû être anticipé: ces petites bulles finissent par en former une immense de plusieurs centaines voire milliers de personnes.
En voyant cette foule compacte aux infos, j’ai directement pensé au personnel soignant sur le front qui devait légitimement avoir la nausée, mais aussi aux secteurs à l’arrêt comme l’Horeca, la culture et l’événementiel qui ne demandent qu’à encadrer cette foule au moyen de protocoles sanitaires stricts.
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Dans ces circonstances, les forces de l’ordre se voient obligées d’intervenir pour disperser la foule. Certainement pas pour « casser du jeune », pas plus que les jeunes n’étaient là pour « casser du flic ». Mais simplement pour répondre aux ordres des autorités craignant des débordements.
Seulement voilà. Les nerfs sont à vif. Les frustrations sont à leur comble. Les résiliences sont épuisées. Les esprits s’échauffent. Les ingrédients d’une escalade de violences sont réunis. Les images ressemblent à une bataille entre deux camps. Pourtant, la plupart des protagonistes n’étaient là que forcés par les circonstances.
Sans doute y avait-il des opposants aux mesures sanitaires, présents par pure provocation, et inconscients des risques qu’ils ont pris pour leur santé et celles des autres. Mais il y avait aussi et surtout des jeunes désireux de souffler entre deux journées entières de cours passés sur leur ordinateur, des familles venues échapper à leur appartement étriqué, des amoureux cherchant à échapper à ce quotidien triste et sans perspectives.
Les policiers ont alors été appelés pour intervenir car le trop grand nombre de personnes présentes empêchait le respect des gestes barrières, compromettant ainsi tous nos efforts. Des policiers sommés depuis un an de faire appliquer des règles dures, indigestes, et impopulaires qu’ils n’ont jamais décidées, pas plus que le dispositif déployé et dont on peut d’ailleurs interroger la proportionnalité (cavalerie canons à eau, gaz lacrymogène, hélicoptère…).
Des policiers sur lesquels on lance des canettes qui ne sont plus outils de partage mais armes de désespoir. Triste constat de voir la relève, l’avenir de notre pays, affronter ceux et celles qui se sont engagés pour les servir et les protéger.
Le Premier Ministre n’a pas manqué de réagir, entre condamnation des violences et compréhension du désespoir qui tentait de s’exprimer.
Un tweet qui se voulait ferme et pédagogue, mais qui n’est pas à la hauteur de l’enjeu: le gouvernement a perdu l’adhésion de la population aux mesures sanitaires, non pas par égoïsme, mais par fatigue et incompréhension.
Fatigué de voir le gouvernement leur demander de respecter des règles lorsqu’il minimise une décision de justice soulignant leur illégalité.
Fatigué de devoir respecter des mesures pour lesquelles ils n’ont jamais été concertés et dont ils peinent à voir les résultats.
Ce qu’ont exprimé la majorité des jeunes au Bois de la Cambre, c’est un désir de vivre, mais aussi et surtout un cri du coeur, un appel à être reconnus, compris, pris en compte, respectés et écoutés face à leur souffrance, leur décrochage scolaire, la perte de leur job étudiant, leurs difficultés financières, les tensions familiales, les incertitudes quant à leur avenir et donc l’utilité de leurs études…
Ceux qui ont organisé cet évènement ou jeté des bouteilles en verre au visage des policiers ont mis en danger la vie de personnes et devront être sanctionnés. Par contre, ceux qui n’ont utilisé que la minuscule liberté qui leur reste pour s’échapper de cette prison qui nous enferme depuis plus d’un an ne méritent pas un tel acharnement médiatique.
Cette écoute des jeunes doit d’urgence être mise en place par le Premier Ministre, d’une part en réunissant une Conférence ministérielle Jeunesse, d’autre part en associant les jeunes et leurs représentants aux travaux du Comité de concertation.
Le monde médical et le monde économique conseillent les autorités dans l’élaboration des mesures. Pourquoi pas le secteur de la jeunesse? Le 28 janvier dernier, je demandais au premier Ministre d’inclure les jeunes dans le processus décisionnel qui les concernent, plutôt que de parler en leur nom, sans aucune idée de ce qu’ils vivent réellement, mais aussi des efforts qu’ils sont encore prêts à fournir. J’ai ensuite formulé cette demande dans une proposition de résolution et demandé au Parlement fédéral de l’examiner en urgence. Demande rejetée par tous les partis de la Vivaldi.
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Si la jeunesse était réellement prioritaire comme le gouvernement le prétend depuis des mois, pourquoi n’a-t-il pris la peine de les associer aux mesures, de le leur expliquer leur bien-fondé, de mesurer leur impact sur leur santé mentale et d’agir en conséquence, de s’adresser à eux là où ils se trouvent, d’utiliser les réseaux sociaux comme Instagram et TikTok? Pense-t-il vraiment qu’un Facebook Live après un an de crise suffira à restaurer le lien de confiance avec cette « équipe de 11 millions d’habitants », slogan répété inlassablement et sans doute aussi désespérément par le Premier Ministre?
La peur du Covid et des amendes ne fonctionnent plus. La peur des jeunes de ne pas avoir d’avenir mais aussi de devoir payer l’immense dette de cette crise leur suffit.
Ce qu’il faut pour regagner leur adhésion, ce sont des mesures concertées, fondées sur des études, et expliquées avec pédagogie et bienveillance.
Le virus se charge déjà très bien de polariser notre société, de dresser les secteurs et les générations les uns contre les autres. Ne rentrons pas dans son jeu.
Ce qu’il faut pour contrer la résignation c’est, plus qu’un discours insistant sur l’enjeu et l’inconnue du virus et ses variants, un dialogue permanent avec les jeunes.
Ce qu’il faut pour gagner la vraie bataille que nous vivons aujourd’hui, celle contre le virus et pour retrouver au plus vite nos libertés, c’est de ne pas céder au piège de la division et de la stigmatisation que nous renvoient les images de jeudi soir, et de retrouver foi en notre avenir.
Le virus se charge déjà très bien de polariser notre société, de dresser les secteurs et les générations les uns contre les autres. Ne rentrons pas dans son jeu.
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