Du Covid au socio-économique, l’éternel retour des démons communautaires
Que ce soit pour la sortie de crise sanitaire, la relance, le budget ou les réformes, la fracture Nord-Sud marque cette rentrée politique. Avec une Vivaldi à la peine et la N-VA en embuscade. Et un débat à venir sur la réforme de l’Etat.
« C’est le moment de trancher dans toute une série de domaines, tous liés à la crise Covid, et l’on assiste à une véritable épreuve de force nord-sud. » Cette source interne à la Vivaldi, qui s’exprime « off » au Soir, résume le sentiment qu prévaut en ce mois de septembre.
C’est l’éternel retour des vieux démons communautaires. Qui se sont déjà manifestés tout au long de la crise sanitaire, mais de façon feutrée, gérés aussi bien que possible au sein du Conseil national de sécurité, puis du Comité de concertation. Les règles différentes d’une Région à l’autre ont été peu nombreuses, c’est vrai, et les réunions parfois très longues apaisées par la communication finale.
Mais en cette rentrée, le ton est davantage décomplexé. La faute à des partis en plein positionnement et à une N-VA revenue le couteau entre les dents pour imposer sa vision confédérale. La faute à la Région bruxelloise, aussi, dont la gestion calamiteuse de la vaccination est épinglée au nord du pays, où la gestion ministre bruxellois de la Santé, Alain Maron (Ecolo), est fortement critiquée.
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Un Comité de concertation sous tension
« La faible vaccination à Bruxelles ne doit pas entraver un retour à la normale en Flandre », insiste Bart De Wever, président de la N-VA. Par ailleurs bourgmestre d’Anvers, il n’a jamais rien laissé passer à cette capitale mal aimée en Flandre, poil à gratter de toujours pour les veilléités indépendantistes du Mouvement flamand.
Mais cette fois, alors que le retour à la vie normale n’est pas loin, que d’autres pays européens y sont déjà (Danemark en tête), le manque d’empressement bruxellois à réagir (les atermoiements sur le Covid safe ticket) et l’échec de la « politique de proximité » sont particulièrement mal perçus. Dans Knack, un expert américain met en avant cette semaine le fait que Bruxelles pourrait devenir le « nouvel épîcentre de la crise »: cette menace pèse.
Le Comié de concertation, programmé vendredi, sera soumis à une tension particulière des partis flamands sur la sortie de crise, alors que le dernier en date avait déjà émis des règles particulières pour Bruxelles. Il sera question de l’abandon du part du masque voulu par certains (au grand mécontentement des experts, cela dit), de l’assouplissement des mesures de quarantaine ou encore de l’extension du Covid safe ticket. En clair, on passerait progressivement d’une phase de gestion de crise fédérale à une gestion sanitaire plus normale au niveau régional.
Une évolution normale, somme toute, mais dont le rythme veut être accéléré au nord, freiné au sud.
Un bras de fer politique et socio-économique
Politiquement, cela s’explique. Le gouvernement flamand, dirigé par la N-VA (et son ministre-président, Jan Jambon), peine à imposer sa marque et veut retrouver de l’autonomie. Les deux partis flamands de centre-droit au fédéral (Open VLD et CD&V) sont sous une forte pression de la droite nationaliste et cherchent à ne pas céder trop de terrain. Bref, des malaises, il y en a.
En toile de fond, d’autres débats jouent un rôle important, surtout sur le plan socio-économique. En matière de sortie de crise Covid, l’abandon des aides aux entreprises en difficulté fait débat, avec la Flandre désireuse de ne plus subventionner les secteurs qui ont retrouvé leur activité d’antan. Mais de façon plus « structurelle », la volonté des partis francophones (PS et Ecolo, singulièrement, le MR n’est pas sur cette ligne) de continuer à investir massivement n’est pas partagée.
Bien sûr, cette ligne de fracture est autant sinon plus, gauche-droite, mais elle trouve son incarnation sur le plan régional.
La façon dont le PS a ouvert la rentrée politique, en présentant la réforme de pensions devant la presse, a crispé les positions. La N-VA ne veut pas d’une réforme qui ne convient pas à la Flandre et l’Open VLD est contraint de temporiser en reportant le sujet à l’automne. Tout en dialoguant avec le PS, qui a la main sur les compétences socio-économiques. quand on sait combien les deux autres sujets de la rentrée – budget, travail et accompagnement des chômeurs, énergie et sortie du nuclaire… – sont tout autant marqués par une telle fracture, cela promet.
La Vivaldi est condamnée à réussir, car c’est l’essence même de son projet qui est en jeu.
Mais faut-il rappeler qu’elle a failli se casser les dents sur l’enjeu migratoire, cet été, marqué lui aussi par une fracture communautaire (notamment)? Faut-il se souvenir des tensions sur la gestion des inondations en Wallonie? Et faut-il préciser, enfin, que la Vivaldi a mis à l’agenda de cette fin d’année un grand débat citoyen sur la prochaine réforme de l’Etat? Les couteaux s’aiguisent à cette perspective, forcément.
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