Carte blanche
Dix idées écologistes pour révolutionner le 21e siècle
Afin de sortir de la situation de crises multiples dans laquelle nous nous trouvons, alors que le 21e siècle est déjà bien entamé, nous estimons qu’il est urgent de défendre un autre modèle.
Les idéologies des 19e et 20e siècles ont fait leur temps. Il est urgent de dire au revoir à la fois au capitalisme et au productivisme, de moderniser la démocratie, et d’imaginer à quoi peut ressembler la société de demain. A cette fin, nous proposons 10 idées de réforme pour une société plus durable, plus solidaire, et plus chouette. Ces idées s’inspirent des valeurs et principes de l’écologie politique : justice sociale, protection de l’environnement, autonomie, solidarité, liberté,…
Allocation universelle
Un système d’allocation universelle permettrait de garantir la dignité et la liberté à toute personne dès sa naissance, en toutes circonstances, peu importe ses choix de vie et sa situation de départ. Il permettrait aussi de choisir plus librement son emploi, et de s’impliquer comme citoyen.ne, à condition que le montant de l’allocation soit réellement suffisant pour vivre dignement, et non survivre. Une telle mesure pourrait être financée par la suppression d’allocations devenues dès lors obsolètes (pension, chômage et allocations familiales) et par une fiscalité redistributive. Pour les personnes marginalisées, le soutien au lien social assuré aujourd’hui – de plus en plus difficilement – par les institutions publiques (CPAS, etc.) peut se transformer en une politique positive d’intégration. Celle-ci se fera à la fois via le service public (écoles, animation dans les quartiers, éducateurs de rue,…), via les « solidarités chaudes », celles qui passent par les initiatives citoyennes favorisées par ce revenu de base, ainsi que via l’abandon des contrôles et sanctions.
Impôt unique sur le patrimoine
Le système fiscal actuel est compliqué et anti-redistributif. Il permet à ceux et celles qui en ont les moyens d’échapper à l’impôt, et organise une différenciation injuste et injustifiée entre revenus du capital et du travail. De ce fait, il reporte la majeure partie des charges sur les travailleurs et les travailleuses aux revenus faibles et moyens. Nous suggérons un système progressif d’impôt sur le patrimoine. Simple, objectif, et progressif, ce système permettrait de faire contribuer tout le monde en fonction de ses moyens réels, et de réduire les inégalités, qui nuisent à la société dans son ensemble.
Tirage au sort dans les assemblées
La démocratie représentative a transformé la politique en une carrière professionnelle, que beaucoup n’acceptent pas de quitter, et limite l’implication des citoyens de tout âge, de tous sexes et de catégories sociales variées. Afin de permettre une meilleure représentation de la population et une participation active des citoyen.ne.s aux décisions publiques, nous proposons que toute assemblée soit composée paritairement d’élu.e.s et de citoyen.ne.s tiré.e.s au sort. Ces dernier.e.s bénéficieraient d’un congé politique pendant toute la durée de leur mandat, et de moyens leur permettant de solliciter des expert.e.s, d’organiser des panels, des visites de terrain,… afin de les aider à remplir leurs tâches.
Économie et mode de vie zéro déchet
L’obsolescence programmée fait de nous, consommateurs, les dindons de la farce tandis que l’économie linéaire (extraction des ressources, productions de biens et destruction) épuise la planète. En parallèle du remplacement des énergies fossiles par des énergies renouvelables, il faut changer notre façon de produire et de consommer, via l’économie circulaire. Ce modèle économique dans lequel les déchets n’existent (presque) plus convainc de plus en plus de monde sur papier, mais peine à se mettre en place. Il est pourtant nécessaire de parvenir à ne plus rien incinérer ou mettre en décharge, mais à réparer, réutiliser, recycler, ou utiliser pour la production d’énergie tous les matériaux produits et consommés dans notre société. Eco-design, landfill et urban mining, magasins en vrac, initiatives citoyennes telles que les repair cafés,… des outils existent déjà !
Économie collaborative et coopérative
L’ économie financiarisée, où le profit monétaire est devenu une fin en soi, entraîne l’exploitation des gens et de la planète, et crée une instabilité structurelle du système, provoquant des crises à répétition. L’économie doit être mise au service de l’humain : évoluons vers une économie basée sur les coopératives, sur la proximité, sur la recherche de plus?value sociale et environnementale,… en interdisant, légalement, la spéculation financière, et en soutenant l’investissement local, durable et citoyen. Les principes des circuits-courts et de l’Open Source doivent être favorisés, aussi bien sur le plan matériel (production industrielle, semences dans l’agriculture,… ) qu’immatériel (financement, logiciels informatiques,…).
Fin de la pub
La publicité de masse crée des besoins artificiels, et une image faussée du bonheur, du corps humain et des interactions sociales. Elle entretient un mal-être mental et un sentiment permanent de trop peu et d’injustice, incite à la surconsommation, et n’apporte aucune plus-value en matière d’information, surtout à l’ère d’internet. Elle ne garantit pas une concurrence libre, au contraire, elle renforce les monopoles et oligopoles des plus grosses entreprises qui en ont les moyens. De plus, elle enlaidit et encombre l’espace public. Pour laisser la place à l’art et la nature dans l’espace public, à la promotion des initiatives citoyennes et associatives, aux émissions d’information, aux associations de consommateurs et à la promotion, encadrée et limitée, de commerçants et artisans locaux, nous proposons de supprimer la publicité, en commençant par les espaces publics.
Légalisation de l’usage des drogues
Afin de traiter la problématique des drogues de façon efficace, il est nécessaire de faire le constat de l’échec de la répression. Légaliser l’usage des drogues permettrait de traiter les problèmes de drogue comme des problèmes de santé, et de donner une chance réelle à la prévention. Cela réduirait la surpopulation dans les prisons, les charges sur la police et la justice, et les rentrées financières des groupes criminels. Cela permettrait également de réorienter en priorité les moyens de la police et de la justice pour lutter contre la criminalité réelle et les trafiquants eux-mêmes, et non contre les usagers.
Libre circulation des personnes
Les migrations sont un phénomène naturel et historique, accentué par le changement climatique et les conflits. Pourtant, depuis l’an 2000, plus de 33 000 personnes sont mortes ou ont disparu en tentant de rejoindre l’Europe. C’est le résultat direct d’une politique inefficace : celle de « l’Europe forteresse ». Vouloir se préserver de toute « intrusion » est illusoire, et mortel pour de nombreux migrants. Des gens qui fuient la guerre et la famine, qui sont prêts à risquer leur vie en mer, n’ont rien à perdre et continueront coûte que coûte à tenter leur chance. Par ailleurs, cette politique est inefficace en termes de sécurité, vu la multiplicité des filières clandestines de passage, tandis que des filières légales d’entrée permettraient de mieux contrôler qui entre et qui sort, et de refuser l’entrée voire d’arrêter les personnes dangereuses. Afin de mettre fin à cette hécatombe, de reconnaître l’accueil des migrants comme l’opportunité réelle qu’il représente(y compris sur le plan économique, même si ce n’est pas notre argument premier), de faciliter leur intégration, une politique de libre circulation est souhaitable.
Villes piétonnes et cyclistes
Nos villes étouffent sous les bouchons et la pollution de l’air. Celle-ci est responsable de milliers de décès chaque année et provoque de nombreuses maladies respiratoires, en particulier chez les enfants et les personnes plus fragiles. Elle porte atteinte à la qualité de vie en villes et contribue à faire fuir les familles vers les zones rurales, créant un cercle vicieux qui nécessite encore plus de déplacements. Les politiques d’aménagement du territoire, d’urbanisme et de mobilité doivent permettre de vider, petit à petit, mais totalement, les centres-ville des voitures individuelles (à l’exception de certaines professions, par exemple médicales, ou pour les personnes handicapées). La création de parkings de dissuasion, des transports en commun performants et gratuits, et un espace public dédié aux piétons et aux cyclistes les remplaceront avantageusement. Pour la qualité de vie, la santé, la convivialité, le commerce, le tourisme,… tout le monde en sortirait gagnant.
Système universel de voitures autonomes partagées
Durant certaines périodes de la journée, de la nuit, de l’année, ou dans certaines zones, notamment rurales, il est difficile, voire impossible, de ne s’appuyer que sur des solutions de mobilité douce ou en transports en commun. Avec les avancées technologiques liées aux applications mobiles et aux voitures autonomes, il est possible de mettre en place un système de réservation en temps réel de véhicules partagés autonomes, qui seraient utilisés en permanence. Ce système permettrait d’optimiser les ressources (alimentation, mais aussi construction des véhicules), les trajets, la sécurité, et ne nécessiterait plus de place de parking. Cette proposition plus technique n’est pas si anecdotique qu’elle en a l’air, il s’agirait là d’une modification fondamentale de notre vision de la mobilité basée actuellement sur la voiture privée individuelle.
Travail, démocratie, environnement et enjeux sociétaux ne sont pas et n’ont jamais été immuables. Il nous revient d’oser leur donner la forme que nous souhaitons pour l’avenir. Pour changer les choses afin de créer demain, il faut apprendre à penser autrement, à sortir des sentiers battus, à dépasser le cadre et à rêver. Si certaines de ces idées peuvent paraître trop idéalistes, elles ne demandent qu’à se confronter à la discussion, et il est urgent de les mettre en débat. Car comme l’a dit Jacky Morael, « l’utopie c’est de croire qu’on va pouvoir continuer comme ça » ! Dans notre capacité à imaginer des solutions nouvelles, nous trouverons les moyens d’éclairer le 21e siècle.
Olivier Bierin, Laura Carlier, Matthieu Content, Chloé Deltour, Baptiste Erkes, Lisa Joseph, Antoine Mariage, Jonathan Piron, Caroline Saal, Sarah Schlitz, tous jeunes militants écologistes.
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