Carl Devos
Di Rupo Ier et les bombes à retardement
Alors que la Flandre ne parle plus que des relations particulières entre l’ACW – le mouvement ouvrier chrétien – et Belfius, PS et Open VLD s’affrontent sur l’assainissement budgétaire. Dangers pour Di Rupo Ier.
La Flandre, indignée, ne parle plus que de la comptabilité de l’ACW et des relations particulières entre le mouvement ouvrier chrétien et Belfius. Dexia a été sauvée avec une injection massive de l’argent des contribuables et, surtout, parce que l’ACW – coresponsable de la chute de Dexia – a, ensuite, avec des complicités politiques, fait payer une fois de plus le contribuable pour limiter ses propres dégâts. Beaucoup sont persuadés que les partis classiques ont amorti via Belfius, avec l’argent du contribuable, les problèmes financiers des mouvements ouvriers chrétiens. Le parti ayant le plus fulminé contre ces prétendus abus du système est la N-VA. En menant cette croisade, elle ne s’est pas fait des amis, rue de la Loi. Mais elle s’en est peut-être fait au niveau local.
La bombe Dexia a été désamorcée. Du moins temporairement. Le fait que cette affaire ait aussi éprouvé les rapports au sein du gouvernement, surtout ceux entre l’Open VLD et l’ACW-CD&V, n’est pas une bonne chose compte tenu de ce qui se prépare : l’équipe du gouvernement fédéral Di Rupo est à la veille d’une offensive socio-économique. Bientôt commencera le contrôle budgétaire. Il s’annonce difficile. Le gouvernement a déjà amplement puisé dans la manne budgétaire. A présent, les fruits les plus bas sont cueillis et la boîte contenant les mesures les moins douloureuses est pratiquement vide. Même si les interventions n’ont pas été aussi drastiques que dans certains pays voisins, l’affirmation selon laquelle nous ne nous en sortons pas si mal comparé à de nombreux pays étrangers n’impressionne personne en Belgique. En outre, les mesures d’économie antérieures se font sentir de plus en plus douloureusement.
L’analyse et le diagnostic de la Banque nationale et de la Commission européenne à propos de l’économie, de la situation budgétaire et du manque de politique structurelle en Belgique font mal. Partout, et surtout en Belgique francophone : tous les partis y avaient émis des réserves quant aux objectifs budgétaires, mais ils se heurtaient aux Flamands qui ne voulaient pas céder d’un pouce. Cette opposition semble davantage communautaire qu’idéologique. Le SP.A a été le premier à contredire la demande d’une plus grande souplesse budgétaire formulée par le PS. Mais la réaction la plus violente a été le tweet de Gwendolyn Rutten, présidente de l’Open VLD : « Ce n’est pas parce que Laurette rugit que nous allons lâcher les rênes belges. #pasquestion. » Connaissant le Parti socialiste, on sait que les libéraux flamands paieront cette attitude au prix fort lors du contrôle budgétaire. Le PS qui, sur son flanc gauche, subit d’importantes critiques sur la politique gouvernementale, se terre. Mais l’Open VLD, qui se sent menacé par la N-VA, ne dispose pas de la marge de manoeuvre nécessaire pour faire de grandes concessions. Plus que jamais, le parti entend juguler la crise avec des recettes libérales.
Si les partis flamands s’en tiennent tous au trajet budgétaire convenu, leurs avis divergent quant à la manière dont il convient de le parcourir. Sur ce point, la lutte est ouverte. Elle sera vive. Di Rupo Ier répète qu’il ne souhaite pas prendre de mesures douloureuses et qu’il protège la population le mieux qu’il peut, mais entre-temps, les problèmes s’accumulent. Le gouvernement paraît trop hésitant, trop défensif.
En 2014, il ne pourra pas convaincre beaucoup d’électeurs avec l’argument d’une réforme de l’Etat. Ces électeurs se demanderont ce que Di Rupo Ier a fait pour leurs revenus et leur prospérité. Sur ce plan, le gouvernement manque encore de conviction. La pression flamande à se montrer plus offensif s’intensifie.
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