Carte blanche
Derrière le dessin du Pont des Trous, le dessein d’un homme?
Voici donc que vient d’être rendu public le futur Pont des Trous ! Passé l’émotion suscitée par les images de la « déconstruction », le temps est venu de faire les comptes. D’emblée, une question s’impose : pourquoi cette interminable saga ? Aurait-on pu éviter ces palinodies incessantes et ces confrontations qui ont conduit à fracturer plus que des arches de pierre, la cohésion sociale et morale de toute une ville ?
Pour tenter d’y voir plus clair, il faut remonter à juin 2013 lorsque, soucieux de donner à ce dossier potentiellement douloureux un vernis de transparence démocratique, le politique organisa en l’hôtel de ville de Tournai une séance publique où furent mises au vote les esquisses de Greisch. Eh oui, c’est alors qu’une première réponse fut donnée. Verdict sans appel : la version traditionnelle en pierre l’emporta. Or un mois plus tard, le collège des bourgmestre et échevins, en sa grande discrétion, retint la version qui était arrivée en seconde position, celle de la résille métallique. Le ver était dans la pomme ; le lancinant combat des Anciens et des Modernes pointait du nez, qui empoisonnerait pour longtemps le débat.
On ne sait que trop ce que ce premier dévoiement allait entraîner. La colère grossissant, Ecolo et CDH obtinrent l’organisation d’une consultation populaire en octobre 2015. Que dirent cette fois les citoyens, présents en bien plus grand nombre au scrutin ? Verdict sans ambiguïté une fois encore : le choix de la pierre, assorti de la photo d’une version traditionnelle à trois arches et courtine, s’imposa, et de très loin. On aurait alors pu croire que, cette fois, les choses en resteraient là. Que du contraire ! Il fallait, paraît-il, affiner le dessin. On mit donc en place dès janvier 2016 un « atelier citoyen » aux allures de nouvelle messe démocratique. Il en sortit une proposition, très contemporaine, de l’architecte Olivier Bastin que le pouvoir communal entérina, à nouveau contre le souhait du plus grand nombre. La suite est connue : colère sourde des habitants, montée au créneau des associations, lancement d’une pétition en ligne, vacarme sur les réseaux sociaux.
Comment, au regard de ce déroulé, comprendre autrement que comme une réponse à cette colère la promesse rendue publique en avril 2019 par le ministre di Antonio ? À qui, surtout, la responsabilité de ce gâchis si ce n’est à ceux qui avaient refusé d’entendre ce que leur disaient leurs électeurs ? Et pourquoi tout cela ? Pour nourrir quel dessein ? Pour nourrir celui-là même qui avait inspiré à notre ex-bourgmestre un prétentieux « bureau du Futur » qui aurait eu à plancher sur les destinées d’une ville deux fois millénaire ?
Ludovic Nys
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