De Croo met en garde contre l’effet dévastateur d’un embargo sur l’énergie russe pour l’UE
Le Premier ministre belge Alexander De Croo a mis en garde, jeudi à son arrivée au sommet européen de Bruxelles, contre l’effet selon lui « dévastateur » qu’aurait un embargo de l’Union européenne sur les importations de gaz et de pétrole russes.
La question de nouvelles sanctions sera à nouveau sur la table du sommet. Les chefs d’État et de gouvernement pourraient donner des orientations à affiner par la suite. Ce sera sans doute le cas pour fermer certaines échappatoires qui persistent, notamment via des pays tiers. Mais sans doute pas pour un embargo sur les carburants, comme le réclament les États-Unis qui l’ont déjà imposé pour le gaz et le pétrole, car il frapperait durement l’UE en retour, et certains États membres en particulier, font valoir les détracteurs de cette mesure.
La Pologne et les pays baltes plaident en revanche pour une telle sanction. « Ce n’est que de l’argent », a lancé le Premier ministre de Lettonie, Krisjanis Karins. « Cet argent alimente la machine de guerre de Poutine », a-t-il rappelé, voyant dans un embargo temporaire sur le gaz et le pétrole une « option sérieuse ». Les importations de gaz russe vers l’UE représentent 40% du total, et celles de pétrole 30%. De la sorte, de 700 à 800 millions d’euros européens partent chaque jour vers la Russie.
Mais pour Alexander De Croo, l’effet retour sur l’économie européenne pourrait être dévastateur. « Les sanctions doivent avoir plus d’impact du côté russe que du côté européen », a-t-il souligné. « On n’est pas en guerre avec nous-mêmes, on ne va pas prendre des sanctions qui nous affaiblissent d’une manière non nécessaire. » Le chef du gouvernement fédéral rappelle que l’Europe a déjà décidé de se défaire de sa dépendance énergétique à la Russie. « Tous les pays européens opèrent ce choix stratégique pas à pas, c’est un choix irrévocable, qui aura un lourd impact sur l’économie russe. Mais un embargo aurait un impact dévastateur sur l’économie européenne et je pense que ce n’est pas nécessaire. »
Alexander De Croo insiste sur l’importance de réduire le coût de la facture énergétique, par exemple par un plafonnement des prix comme la Belgique le propose. Cette piste semble toutefois faire moins l’unanimité que des achats conjoints de gaz, grâce auxquels l’UE profiterait de son poids pour faire baisser les prix lors de la négociation de contrats d’achat.
Quant à l’exigence de Vladimir Poutine de faire payer les importations de gaz en roubles, elle ne devrait avoir que peu d’impact sur la Belgique, qui achète peu de gaz russe, mais « si l’on change les éléments d’un contrat, alors tout se renégocie, et donc les prix aussi », a affirmé Alexander De Croo. « Je ne pense pas que qui que ce soit sache à quoi ressemblent les roubles », s’est moqué le Premier ministre slovène Janez Jansa. Gros consommateurs d’énergie russe, l’Allemagne et l’Italie ne se laissent pas impressionner non plus. Le président du Conseil italien, Mario Draghi, considère lui aussi que faire payer l’énergie en roubles constituerait une rupture de contrat. Pour l’ancien président de la Banque centrale européenne, « les sanctions (européennes) sont extraordinairement efficaces, l’économie russe est fortement affaiblie », a-t-il affirmé.
« La Russie, c’était l’équivalent du Benelux » en poids économique, a illustré le ministre-président néerlandais Mark Rutte. « Depuis, l’équivalent (pour la Russie) du revenu national de la Belgique a déjà fondu. Ils sont maintenant au niveau des Pays-Bas et du Luxembourg ensemble. Donc tout va très vite. »
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