Dans l’ombre du siège de Pierre
Tout sauf un long fleuve tranquille, la saga du Vatican ! Depuis le temps des premiers évêques de Rome jusqu’aux réformes engagées par le pape François, en passant par l’époque troublée des papes guerriers, le Vatican et ses secrets forment une fascinante histoire, dont le hors-série du Vif/L’Express raconte quelques-uns des épisodes retentissants ou moins connus.
C’est un fait : on spécule à l’envi sur les intrigues, les richesses et les archaïsmes du Saint-Siège et de la Curie romaine. S’il n’est pas toujours aisé de distinguer mythes et réalités, idées-reçues et faits avérés, l’actualité récente vient nous rappeler que la face sombre du « siège de Pierre » n’est pas que fantasme, loin s’en faut.
Ainsi, ces dernières semaines, deux livres explosifs, alimentés par des documents dérobés au Vatican, ont dévoilé les coulisses des finances de l’Etat pontifical, les privilèges exorbitants accordés à sa vieille garde et l’incompétence de ses administrateurs. Ces révélations jettent une lumière crue sur le train de vie luxueux de certains cardinaux, les détournements de fonds et le vol des archives secrètes de la Cosea, la commission chargée par François de dresser l’audit des finances vaticanes. Il y est question du denier de Saint-Pierre, l’argent récolté auprès des fidèles du monde entier pour soutenir les actions de « charité » du Saint-Père. Sur 10 euros de dons qui rentrent, deux seulement seraient affectés aux plus démunis. Le reste a servi, au moins jusqu’en 2012, à « boucher les trous » des comptes des dicastères, les ministères de la Curie. Le pape a, en outre, tenté de savoir ce que devenait l’argent récolté lors des procédures de canonisation et béatification, véritables « pompes à fric ». En vain.
Quelques semaines plus tôt, la divulgation, dans des conditions mystérieuses, d’une lettre privée adressée à François par des cardinaux conservateurs hostiles au fonctionnement du Synode sur la famille avait déjà fait monter la tension au Vatican. Faire le ménage est la mission explicite confiée à Jorge Bergoglio, mais c’est peu de dire que la Curie résiste à la cure. Le souverain pontife ne peut même pas s’appuyer en toute confiance sur les conseillers dont il s’est entouré, certains se révélant peu fiables. Il va falloir au pape argentin une force morale, psychique et spirituelle peu commune pour continuer à surnager au royaume des « coups tordus ». Et, surtout, éviter l’isolement, qui a usé son prédécesseur. Benoît XVI ne se sentait plus ni la force et ni les moyens de vaincre le système de gabegie et de corruption de la Curie. Sa renonciation ne serait pas sans liens, selon certaines sources, avec l’affaire » VatiLeaks », fuites de documents confidentiels qui ont révélé l’existence d’un vaste réseau de trafics et dessous de tables, et les luttes de pouvoir qui se déroulent dans les palais feutrés du Vatican.
De même, en 1978, quelques jours après son élection, l’humble Jean-Paul Ier, éphémère successeur de Paul VI – il régnera trente-trois jours à peine -, avait dû se sentir cerné après la divulgation, dans la presse, d’un pacte maçonnique liant une centaine d’ecclésiastiques, dont le secrétaire d’Etat, le ministre des Affaires étrangères et le très puissant directeur de la banque du Vatican. La manoeuvre est apparue, pour le pape vénitien, comme une invitation à la prudence, à ne pas faire de remous dans les hautes sphères de la Curie. Trente-cinq ans avant le pape François et sa prédication en faveur d’une « Eglise pauvre au service des pauvres », Jean-Paul Ier appelait déjà au retour à l’Eglise pauvre des origines et faisait, lui aussi, figure de révolutionnaire !
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