Steven Van Gucht: « Sciensano est à nouveau en mode économie. Nous avons la mémoire courte »
Interrogé par De Zondag, le virologue Steven Van Gucht, de l’institut de santé Sciensano, revient sur ces dernières années mouvementées mais intéressantes, mais aussi sur ses attentes à présent que les infections de Covid sont à nouveau en hausse.
Le coronavirus était-il intéressant pour le chercheur que vous êtes ?
Steven Van Gucht : Absolument. Jamais dans l’histoire nous n’avons pu suivre une pandémie d’aussi près. Le simple fait de pouvoir surveiller tous ces pays simultanément via Internet était unique. La pandémie peut encore alimenter les études pendant 15 ans. Nous avons également beaucoup appris, par exemple sur l’importance des aérosols.
Il est vrai, qu’au début, leur importance n’a pas été suffisamment reconnu. Mais cela aurait-il fait une grande différence lors de la première vague ? Notre première réaction a été le confinement : tout le monde à la maison, le moins de contacts possible. Les aérosols sont devenus importants lorsque nous avons rouvert la société. La ventilation et les masques ont alors pris tout leur sens, y compris en ce qui concerne les aérosols. Nous avons pris le virage plus rapidement que de nombreux autres pays, mais encore trop lentement, soyons clairs.
La science s’est-elle surpassée en produisant un vaccin aussi rapidement ?
Je pense que oui. Les vaccins ARN sont merveilleux dans leur simplicité et ils sont très bons. La technologie de l’ARN est une véritable révolution. Cette technologie existait déjà, mais elle a été utilisée pour la première fois dans des vaccins. Il y a aussi l’aspect de la collaboration mondiale. Un très grand nombre de scientifiques ont immédiatement tout laissé tomber pour se concentrer sur le covid.
L’importance d’un tel institut de santé est-elle désormais claire pour tout le monde ?
Nous avons eu des renforts pendant la pandémie, mais maintenant nous sommes de nouveau en mode économie. Je peux vous dire que nous avons la mémoire courte. C’est dommage, car il y aura d’autres pandémies. Tout ce que nous avons fait pour combattre le covid sert aussi à préparer la prochaine pandémie. Mais il y a un trou dans le trésor public et tout le monde demande de l’argent. Je comprends.
Le coronavirus est-il une leçon d’humilité pour l’humanité ?
Je pense que c’est un avertissement important. On ne peut pas contrôler ce genre de choses et encore, on a eu de la chance avec le covid. Pour la plupart des gens, c’était assez bénin, seul un petit pourcentage a eu des conséquences très graves et vous avez vu que cela suffisait pour paralyser complètement la société. Nous avons eu la chance de pouvoir développer un vaccin contre ce virus. Nous n’avons toujours pas réussi à faire de même pour le VIH, par exemple.
Qu’attendez-vous pour ces prochains mois ?
Nous sommes dans une nouvelle vague. Personnellement, je ne m’inquiète pas pour la population générale, mais pour les personnes âgées ou les personnes souffrant de troubles sous-jacents. Comment pouvons-nous mieux protéger ce groupe vulnérable ? C’est sur lui qu’il faut se concentrer. En dehors de cela, je pense que l’été sera libre et qu’il n’y aura pas de restrictions générales. Pour l’automne et l’hiver, il faudra attendre et voir. Y aura-t-il une nouvelle variante ? L’hémisphère sud est maintenant en hiver, mais la situation y est assez calme.
Faut-il s’attendre à une nouvelle campagne de vaccination à l’automne ?
De toute façon. Le Conseil supérieur de la santé prépare actuellement un avis qui sera transmis au groupe de travail sur la vaccination et aux ministres de la santé. Ils communiqueront sur la forme que prendra la campagne de l’automne : quels groupes allons-nous approcher en priorité et y aura-t-il une campagne pour la population générale ? Le vaccin Omicron sera peut-être disponible en octobre, mais que cela ne soit pas une excuse pour attendre de se faire vacciner. Il vaut mieux se faire vacciner le plus rapidement possible.
Lire aussi | L’intégrale de l’entretien (en néerlandais)
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