Covid en Belgique: faut-il s’inquiéter de la hausse soudaine des contaminations ?

Caroline Lallemand Journaliste

Les infections au coronavirus ont bondi de 70% en quelques jours en Belgique. Faut-il s’en inquiéter ? Le point sur la situation.

Les contaminations au coronavirus sont en nette hausse en Belgique ces derniers jours. Ce jeudi, Sciensano annonce une augmentation en une semaine de pas moins de 70%. En moyenne, près de 550 personnes sont désormais testées positives chaque jour. Le taux de reproduction du virus repasse au-dessus de 1, signe qu’il recircule plus dans la population.

Cette augmentation marquée des contaminations s’explique par plusieurs facteurs explique Sciensano. Le premier concerne les voyages. Beaucoup de personnes se font actuellement tester pour pouvoir partir en vacances. Plus les tests sont nombreux, plus les cas positifs le sont également. Il s’agit en général de personnes asymptomatiques ou parfois des traces d’une ancienne infection qui est détectée. Le fait de voyager augmente également les risques, le pourcentage de tests positifs est deux fois plus élevé chez les personnes qui reviennent de voyage (2,2%) que chez celles qui partent (1%).

Le deuxième facteur concerne le changement de notre comportement. « Avec les assouplissements récents, nous avons plus de contacts rapprochés », constate Yves Van Laethem, porte-parole interfédéral. « C’est pourquoi il est important de toujours rester prudents. »

Enfin, le variant Delta (anciennement appelé indien) est le troisième facteur. Plus contagieux que le variant Alpha (britannique) majoritaire dans le passé, le variant Delta représente désormais plus de 50% des infections en Belgique.

Les infections vont continuer leur envolée

Selon Sciensano, il est probable que le nombre d’infections continue d’augmenter dans les jours à venir et entraîne également une hausse des admissions à l’hôpital. Mais cette charge sur les structures hospitalières devrait être assez limitée : « Nous nous attendons à ce que l’augmentation des admissions à l’hôpital soit beaucoup moins prononcée« , rassure Yves Van Laethem. « La plupart des infections surviennent chez des personnes plus jeunes. Les personnes âgées ou celles ayant un profil à risque ont heureusement généralement déjà une protection totale ou partielle grâce au vaccin. »

En Belgique, 78 % des plus de 65 ans ont reçu les deux doses du vaccin contre le coronavirus, pour 45 % des plus de 18 ans. Une couverture qui n’est cependant pas suffisante pour se sentir invincible face au virus. Marc Noppen, le CEO de l’UZBrussel conteste ainsi l’idée selon laquelle les vaccinations peuvent éviter les hospitalisations : « Après tout, les vaccins ne protègent pas à 100 %, ce qui signifie que – à l’exception des personnes non vaccinées – les personnes vaccinées courent également un risque moindre de tomber malade et de se retrouver éventuellement à l’hôpital. Je ne pense pas que nous allons pouvoir fermer le département Covid de notre hôpital de sitôt« , explique le médecine dans Het Nieuwsblad.

Les voyages augmentent les contaminations.
Les voyages augmentent les contaminations.© getty

Pas de surcharge des hôpitaux

Son principal espoir maintenant est que les hôpitaux ne soient pas à nouveau pris au dépourvu, comme ils l’ont été lors des précédentes vagues. « En vaccinant la population, en principe, cela ne devrait plus se produire. Et c’est une bonne chose. Au plus fort de la vague, nous avions 120 patients atteints du corona dans notre hôpital, ce qui était intenable. C’est pourquoi nous sommes très vigilants aujourd’hui lorsque les chiffres augmentent à nouveau. Nous ne pouvons pas laisser la situation nous échapper à nouveau’, alerte-t-il.

Le virologue Steven Van Gucht a mis en avant les prédictions de différents biostatisticiens. Ils n’excluent pas que, malgré la campagne de vaccination, le nombre croissant d’infections puisse à nouveau peser lourdement sur les hôpitaux au début de l’automne. « Nous devons absolument éviter cela« , a-t-il déclaré.

Vers une quatrième vague ?

Pour les experts, une quatrième vague (voire une cinquième en Espagne) est prévisible, voire inévitable en Europe, où la course contre la montre a été enclenchée pour stopper le variant Delta avec des campagnes de vaccination qui stagnent dans certains endroits. La situation est déjà compliquée en Catalogne, au Royaume-Uni ou encore au Portugal où les infections s’envolent et où des mesures de reconfinement ont été à nouveau décrétées.

En Belgique, l’heure n’est cependant pas à la panique, pas de quatrième vague à l’horizon, tout au plus une « vaguelette ». Tous les indicateurs restent dans le vert à ce jour, malgré la nette remontée des infections. Encourageant aussi : les admissions à l’hôpital continuent leur baisse. Au 5 juillet, on dénombrait 262 lits covid occupés dans les différents hôpitaux du pays (-23 % par rapport à la semaine précédente) et 115 aux soins intensifs (-22 %). En moyenne, ces sept derniers jours, trois personnes décédaient quotidiennement des suites du covid (-31 %).

Un risque de quatrième vague à l'automne.
Un risque de quatrième vague à l’automne.

« Pour parler de vague, nous avons toujours pris les hospitalisations comme indicateur phare« , rappelle Niko Speybroeck, épidémiologiste à l’UCLouvain dans Le Soir. Il anticipe plutôt une « vaguelette » d’hospitalisations. Sa collègue Sophie Lucas, président de l’Institut de Duve (lire notre interview ici) est aussi d’avis qu’il est trop tôt pour prédire les conséquences du variant Delta sur les hospitalisations futures, citant les cas du Royaume-Uni ou d’Israël pour anticiper la dégradation de la situation sanitaire, et prévoir des mesures adaptées.

La bête noire des virologues : un variant beaucoup plus agressif

La situation est en effet très différente de l’été passé. La vaccination permet en effet d’éviter des contaminations et des cas graves de la maladie qui saturerait les hôpitaux. « Si on regarde la courbe des cas et des décès au Royaume-Uni et qu’on la compare à celles des vagues précédentes, on n’est pas du tout, du tout dans la même histoire « , explique au Soir l’épidémiologiste Marius Gilbert, rejoint par son confrère de l’ULB Simon Dellicour : « La bonne nouvelle, c’est que pour le moment on observe bien ce découplement entre les deux courbes. Si l’on compare avec la vague précédente au Royaume-Uni, il y a donc comparativement moins d’hospitalisations pour un même nombre de cas positifs.  »

La bête noire des virologues reste toutefois la circulation plus intensive du virus en période de vacances et de déconfinement, pendant laquelle les gestes barrière sont moins bien respectés. D’autres variants encore plus agressifs pourraient alors se développer avec les nombreux mouvements de personnes à travers l’Europe. Avec la peur qu’un variant beaucoup plus risqué qui résiste aux vaccins et à une précédente infection ne surgisse. Le maître-mot pour les experts reste la vigilance, en attendant que la vaccination progresse et protège de plus en plus de citoyens à travers le monde.

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