Communales 2018: à Ixelles, une campagne en chantier
Si la majorité MR-PS est prête à retourner au pouvoir six années de plus, l’opposition lui reproche un manque total de vision.
A Ixelles, la campagne n’est pas encore lancée qu’elle a déjà fait des vagues. Surtout au MR, parti de la bourgmestre, Dominique Dufourny. La conseillère communale Assita Kanko a décidé de ne pas se présenter, et avant cette décision, les libéraux tranchaient le cas d’Alain Destexhe quant à sa présence ou pas sur la liste de la bourgmestre. » L’important, c’est l’unité, et elle est présente au sein de notre liste grâce à de fortes personnalités « , rassure, pourtant, Dominique Dufourny. C’est que le MR revient de loin : Alain Destexhe menaçait de faire une liste de son côté et se voyait déjà bourgmestre, tandis que Dominique Dufourny ne souhaitait pas du député bruxellois pour les élections communales, énervée par l’attitude de » l’électron libre « .
Après des semaines de tensions, Alain Destexhe occupera finalement la dernière place de la liste. Mais cette donne politique risque bien de peser dans les débats, que ce soit dans la reconduction de la majorité actuelle comme dans la composition d’une autre coalition. Forte personnalité, Destexhe est un faiseur de voix : en 2012, il réalisait le troisième score des candidats MR alors qu’il occupait l’avant-dernière place. Principal parti d’opposition, Ecolo a déjà fait savoir que rien n’était possible ou envisageable avec lui.
Au PS, le cas pose question. » Aux dernières élections, c’était déjà une difficulté : quand vous avez une personne qui ne cesse de dire que les socialistes sont invivables, qu’on est incapables de travailler avec eux, pourquoi irait-on avec elle ? Plus que pour Ixelles, c’est surtout un scandale pour les libéraux « , lance Bea Diallo, premier échevin et tête de liste PS.
Diallo s’est déjà attiré les foudres de Destexhe au sujet de l’asbl Emergence XL, projet porté par l’échevin, qui a pour objectif l’insertion socio-professionnelle des jeunes en décrochage par le sport. Bea Diallo en est aussi le président, mandat qu’il exerce gratuitement. Pour le libéral, il s’agirait de clientélisme électoral et politique… Qu’à cela ne tienne, le socialiste reste totalement satisfait de sa collaboration avec le MR. » C’est une majorité marquée par le respect mutuel. A travers cette majorité, on est arrivé à trouver un équilibre utile pour lutter contre la dualisation de la commune et répondre au boom démographique. » En 2012, les urnes n’avaient pas été favorables aux socialistes. La page Willy Decourty étant tournée après quinze ans de mayorat, le premier échevin entend incarner le renouveau et, pourquoi pas ?, devenir le premier bourgmestre d’origine sub-saharienne de Belgique. C’est l’un des enjeux d’octobre. Pour la campagne, Bea Diallo met en avant, pêle-mêle, la lutte contre les problèmes de nuisance et de sécurité, l’ouverture d’une nouvelle école secondaire ou le doublement du nombre de places dans les crèches. Il regrette aussi le manque d’infrastructures sportives et propose la création d’un nouveau stade à Ixelles.
« Ixellisation » et « sous-exploitation »
Au MR, Dominique Dufourny, qui occupe la fonction mayorale depuis 2016, ne compte pas lâcher ce poste, privilégiant de reconduire la majorité actuelle. Elle n’hésite pas à lancer des fleurs à ses collègues socialistes : » Bea a donné un nouveau souffle, tout comme, par sa jeunesse, le reste de l’équipe socialiste. Au niveau du collège, ça donne de l’essor. » Outre le bilan positif de cette collaboration, la plus grosse satisfaction de la bourgmestre concerne les finances communales : » Tous les indicateurs sont au vert, et nous terminons cette législature avec un compte en boni de plus de dix millions d’euros, sans avoir augmenté les impôts. De plus, nous avons lancé plusieurs projets comme celui du musée ou de l’îlot communal, destiné à réaménager les alentours de la maison communale. »
En matière de projets, Ixelles n’en a pas manqué et n’en manquera pas : place Fernand Coq, chaussée d’Ixelles, site Solvay… Des chantiers qui, aux yeux de l’opposition, manquent de cohérence, mais surtout dénaturent la commune. Pour le CDH, la politique d’urbanisme ixelloise est de penser que l’autorité publique n’est pas acteur du jeu. » On peut même parler d’ixellisation « , dénonce Julie de Groote, actuelle cheffe de groupe des humanistes, mais qui ne sera pas tête de liste pour le prochain scrutin, laissant la place à Geoffroy Kensier, le président de la section Ixelles. » La majorité a laissé faire une série d’opérations dommageables pour la commune sous prétexte que le projet est privé. On a d’ailleurs enlevé les compétences de l’urbanisme à l’échevine MR Nathalie Gilson pour les céder à Viviane Teitelbaum. Ce n’est pas rien… » Dans ce fiasco, le CDH pointe le projet de reconversion du Delhaize Molière avec la construction de 98 appartements et de 138 parkings à la place du supermarché. » Le projet a pu être stoppé grâce à la mobilisation des citoyens, car la commune n’était pas intervenue directement. Elle a aussi laissé faire la destruction du site Solvay, et on pourrait citer d’autres projets. Désormais, la majorité doit endosser la lourde responsabilité de ce qui a été fait. »
Même son de cloche chez Ecolo, qui reproche l’absence totale de vision de la majorité sortante pour la commune. » Ça s’est accéléré ces dernières années, depuis que les libéraux sont à la tête de la commune. Dans tous ces grands projets, c’est toujours le même problème, avec une logique de profit maximal pour les promoteurs au détriment du patrimoine, de l’environnement et de la cohésion sociale « , déplore Audrey Lhoest, la cheffe de groupe à Ixelles.
L’écologiste regrette aussi le manque de concertation avec les citoyens. » Il est temps de replacer les Ixellois au coeur des projets, à travers la participation et le dialogue. La majorité confond souvent information avec participation. Quand elle décide de faire participer les citoyens, le projet est souvent quasiment ficelé, ce qui mécontente tout le monde évidemment. A chaque fois, la majorité a des réponses en décalage. Ixelles a un potentiel énorme, mais est littéralement sous-exploité par les autorités. » Deuxième parti à Ixelles, Ecolo se voit d’ailleurs bien jouer les premiers rôles dans une majorité…
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