Comment Liège s’est inspirée de Nantes pour valoriser son patrimoine industriel
Pour valoriser son patrimoine industriel, la Cité ardente a cherché l’inspiration à Nantes, dans l’ouest de la France. Objectif ? Tisser progressivement de la vie sur ces sites à l’abandon en cours de réaffectation.
Comme d’autres grandes villes, Liège a changé son fusil d’épaule en matière d’aménagement du territoire voici quelques années, et s’est mise à regarder d’un autre oeil son patrimoine industriel, jusque là trop souvent négligé. On a vu se multiplier les projets de réhabilitation urbaine sous la pression des pouvoirs publics, forçant leurs partenaires – privés notamment – à ne pas faire table rase des infrastructures désaffectées, mais à s’y appuyer pour mieux leur rendre vie.
» Cela fait trente ans que la SPI ( NDLR : l’agence de développement économique pour la province de Liège) travaille avec sa filiale, la Sorasi, à l’assainissement et à la rénovation d’anciens sites industriels. Toutefois, le mouvement a connu une grosse accélération il y a un peu plus de dix ans, retrace Pierre Castelain, son porte-parole. Accélération dont on commence à percevoir les retombées après la mise en oeuvre de moyens importants obtenus dans le cadre du plan Marshall 2. Vert. » » Nous sommes d’ailleurs aujourd’hui à un tournant puisque nous attendons l’annonce de l’octroi d’une seconde enveloppe « , ajoute-t-il. C’est que, grâce à cette première enveloppe publique wallonne, la SPI a pu lancer, entre autres projets, ceux du Val Benoît, un domaine de neuf hectares anciennement occupé par l’ULg, destiné à accueillir du logement et des entreprises ; et du charbonnage du Hasard de Cheratte, à Visé, qui sera mis à disposition d’activités économiques et de services de même qu’un terrain voisin de quatre hectares. » 60 % de nos projets actuels sont des réhabilitations, ce qui démontre un vrai changement dans notre manière de travailler. »
En quête d’investisseurs internationaux
Mi-mars, à l’occasion du Mipim, grand rendez-vous international des professionnels de l’immobilier, la SPI a présenté, lors d’une conférence commune organisée avec le GRE Liège, six projets de réhabilitation urbaine à une assemblée qu’elle espérait composée d’investisseurs. Pour mieux les appâter, les deux acteurs publics ont conjugué leurs forces à celles de la ville de… Nantes, en France, évoquant un parallélisme, à tout le moins une inspiration puisée dans leurs développements urbains respectifs fondés sur un passé industriel similaire.
» Nous sommes descendus à Cannes ( NDLR : où le Mipim prend ses quartiers) pour trouver des financements pour deux des projets que nous portons : le site HDB, à Verviers, soit un terrain de 4,5 hectares en bordure de la Vesdre qui abritait une ancienne usine de fabrication de métiers à tisser ; et celui des Acec, à Herstal, les Ateliers de construction électrique de Charleroi, qui s’étendent sur 27 hectares et font l’objet d’un masterplan réalisé par l’architecte et urbaniste italienne de renom Paola Vigano « , détaille Pierre Castelain. C’est ce dernier projet qui a mené à la collaboration avec Nantes. » Des membres de la SPI se sont rendus à Nantes pour y pêcher de bonnes idées, il y a un an et demi, poursuit-il. Et ce, parce que Nantes a réalisé un tour de force en revitalisant un territoire de 237 hectares – l’Île de Nantes – autrefois dévolu à l’industrie des chantiers navals, en faisant la part belle aux projets culturels et créatifs pour mieux y implanter durablement des logements, des services, des entreprises… Cela s’est transformé en un véritable échange quand une délégation nantaise s’est rendue à Liège en octobre dernier pour visiter nos projets en cours « , assure le porte-parole de la SPI, qui précise que l’agence liégeoise a été invitée en retour à s’exprimer sur sa manière de faire lors d’une conférence à Nantes en juin prochain.
Oser les fonctions provisoires
Qu’est-ce que la SPI a retenu de cet échange de vues avec la métropole française ? » Nous avons appris que nous devions oser l’expérimentation urbaine, souligne Pierre Castelain. Comme tous les projets d’envergure, les nôtres s’étalent sur une dizaine années avant d’être concrètement lancés, pour cause de procédures administratives, de recherche d’investissements, etc. Or, nous devons, comme à Nantes, mettre à profit ces délais pour donner une fonction provisoire aux sites que l’on développe et non les laisser à rien le temps que l’on puisse suivre le masterplan à la lettre. » L’objectif étant de tisser progressivement de la vie sur ces territoires à l’abandon tout en se plaçant du côté de leurs utilisateurs en les ouvrant à des projets culturels ou à la créativité de start-up. » Nous sommes actuellement occupés à installer la compagnie de théâtre liégeoise Arsenic aux Acec, ce qui fait écho à l’exemple nantais « , pointe-t-il. Autre initiative, celle de la start-up Smartnodes, qui planche sur de l’éclairage extérieur intelligent en menant des tests sur les infrastructures du Val Benoît. » C’est une collaboration toute simple, mais qui nous permet d’accélérer le redéploiement du site et de lui conférer une certaine attractivité liée, ici, à l’usage de nouvelles technologies. «
Parmi les autres projets présentés lors de la conférence conjointe du GRE Liège et de la SPI, figure celui de Gastronomia, à Seraing, une halle industrielle de 15 000 mètres carrés dont une partie a été démolie pour faire place à du logement. En lieu et place du Hall 4, réputé pour avoir accueilli la construction des moteurs du paquebot transatlantique Le France, la commune désire implanter 4 800 mètres carrés de commerces prônant le » manger-sain « , un marché couvert destiné aux producteurs locaux et 4 700 mètres carrés de bureaux et logements. Le site est en train d’être assaini tandis que 9,3 millions d’euros de fonds Feder ont été sécurisés pour le promoteur qui relèverait le défi de développer le projet en partenariat public-privé avec la Ville.
Deuxième initiative, celle de Flémalle-Neuve, un espace industriel désaffecté de dix hectares. Partie prenante du masterplan de la commune, le site accueillera des logements, des loisirs, des équipements et de l’activité économique.
Enfin, porte Nord de Liège, l’ancien hôpital de Bavière est amené à se transformer en un pôle créatif et culturel. Entouré de l’université comme de hautes écoles, il s’adressera à un public jeune en lui offrant une bibliothèque, une pépinière d’entreprises et un centre artistique avec, comme fil conducteur, l’écriture numérique (image, vidéo…).
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