Une arme automatique FN Minimi
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Comment des armes wallonnes servent à violer les droits humains dans le monde

Amnesty dénonce le manque de transparence dans le secteur et demande des réformes, au vu des crimes commis de part le monde avec des armes wallonnes.

Des armes wallonnes continuent à être utilisées pour commettre des crimes de guerre et des violations des droits humains dans différents pays du monde, dénonce jeudi le 7e rapport de l’Observatoire sur les armes wallonnes élaboré par Amnesty et la Ligue des droits humains.

«C’est l’irresponsabilité et l’opacité»

Que ce soit au Nigéria, en Indonésie ou au Brésil notamment, des armes « made in Wallonia » ont servi à tuer des populations civiles lors d’opérations militaires ou sécuritaires, affirme l’organisation de défense de droits humains.

«Au fil des années, on constate deux constantes dans l’octroi de licences pour les armes wallonnes: c’est l’irresponsabilité et l’opacité», déplore François Graas, l’un des auteurs du rapport. Irresponsabilité car, malgré différents textes aux effets contraignants, des armes continuent à être envoyées vers des pays où les risques de violations des droits humains sont élevés. Et opacité car la Wallonie ne livre bien souvent que des informations fort tardives et incomplètes en la matière.

Les pays destinataires finaux des armes ne sont ainsi pas toujours clairement mentionnés dans les rapports officiels wallons. Amnesty prend notamment pour exemple la vente récente de mitrailleuses de la FN Herstal destinées au Nigéria. Comme ces armes ont été montées sur des avions et des hélicoptères assemblés aux Etats-Unis, c’est ce dernier pays qui a été présenté comme destinataire des mitrailleuses, selon l’organisation.

Amnesty réclame plusieurs changements

A l’heure où MR et Engagés négocient leur futur accord de majorité pour la Région wallonne, Amnesty presse les deux partenaires d’accorder lors de la prochaine législature une plus grande priorité au respect des droits humains lors de l’octroi des licences d’armes, comme le prévoit déjà un décret wallon.

L’organisation humanitaire réclame aussi davantage de transparence. Les rapports annuels des autorités wallonnes sur ces exportations sont publiés de manière trop espacée, juge Amnesty. Celle-ci attend ainsi toujours le rapport pour l’année 2023 alors que la Flandre publie, elle, ses données chaque mois, fait valoir l’organisation.

Autre priorité adressée au futur gouvernement: garantir une réelle indépendance à la commission qui émet des avis (non-contraignants) sur les demandes de licences introduites auprès du gouvernement.  Cette commission est composée de six membres, dont trois sont des fonctionnaires wallons, ce qui n’est pas le meilleur gage d’indépendance, estime Amnesty. L’instance est en outre présidée par l’administratrice de Wallonie-Bruxelles International (WBI), qui est en même temps administratrice générale de l’Agence wallonne à l’exportation (AWEX). «Avec une telle présidence, on peut se demander si la priorité est d’exporter ou de respecter les droits humains…», grince Stan Brabant, l’autre auteur de ce 7e rapport de l’Observatoire des armes wallonnes.

Enfin, après les polémiques sur le transit à l’aéroport de Liège d’armes à destination d’Israël, Amnesty réclame un renforcement du cadre légal en la matière, et pas seulement concernant Israël. Ici aussi, estime l’organisation, la Wallonie pourrait utilement s’inspirer des mesures adoptées par la Région flamande.

Selon l’Observatoire, le montant des exportations réelles d’armes de la Région wallonne s’est élevé l’an dernier à 365,1 millions d’euros, en progression de 3% par rapport à l’année précédente. Pesant à elles seules 47,3 millions d’euros de ce total, les exportations de poudres et d’explosifs ont progressé de 27% en un an.

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