Le siège de la Smals, à Bruxelles. © DR

Comité R et asbl Smals, pas d’affaire trop vite conclue

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Le Comité R se préparait à faire affaire avec la tentaculaire asbl Smals pour se digitaliser. Troublée par la célérité du processus en cours, la Chambre décide d’y voir plus clair avant un éventuel feu vert budgétaire.

Le Comité R patientera avant d’étoffer le portefeuille client de la Smals. L’organe de contrôle des services de renseignement et de sécurité avait déjà pris langue avec le grand manitou de l’informatisation des services publics pour obtenir une estimation de ce que l’automatisation de ses processus de travail pourrait lui coûter. La note est tombée: un marché évalué, frais de maintenance compris, à 3,5 millions d’euros, étalé sur sept ans et demi. Affaire conclue? Pas si vite.

Lorsqu’il s’est présenté en fin d’année devant la commission de la comptabilité de la Chambre chargée d’approuver le budget 2021 du Comité R qu’il préside, Serge Lipszyc comptait par la même occasion décrocher le feu vert parlementaire à la mise en route de ce chantier informatique d’envergure par l’engagement d’un premier financement, soit 850.000 euros pour 2021. Qui donc, parmi les services publics, résiste encore à passer commande auprès de la Smals? L’asbl – près de 2.000 travailleurs, 341 millions de chiffre d’affaires en 2019 – s’est imposée comme fournisseur incontournable en services ICT pour ses nombreux clients membres. Frapper à sa porte pour rafraîchir son appareillage informatique relevait pour le Comité R du réflexe quasi pavlovien, de l’évidence même quand on fait partie de la grande famille des affiliés à la Smals.

Un peu de diversification ne ferait pas de tort.

Le monde du renseignement, un marché

Il a fallu l’objection du député André Flahaut (PS) pour jeter le trouble sur ce qui ne devait être qu’une formalité. L’élu socialiste a été saisi d’un gros doute: si la Smals a élaboré une note contenant sa vision sur le projet IT du Comité R, alors elle ne peut plus concourir à un éventuel appel d’offres. Prudence, gare à ne pas fausser les règles relatives à l’attribution des marchés publics: sonder d’autres entreprises relèverait du principe de précaution. Consulté dans l’urgence sur la question, le service juridique de la Chambre a conclu très provisoirement que ne s’adresser qu’à la Smals relève d’un « choix d’opportunité que le Comité R peut effectuer » sans que sa qualité de membre de l’asbl ne doive l’y forcer. La Smals elle-même en convient sur son site Internet: une adhésion n’oblige en rien à faire appel à ses services. « Vous décidez vous-même quoi et quand, si vous le souhaitez. Il n’y a pas anguille sous roche. » Vu l’importance des sommes en jeu, décision a été prise par la Chambre de reporter le dossier à mars prochain, le temps de lever toute ambiguïté sur le terrain juridique. D’ici là, le Comité R a été prié de geler les dépenses prévues pour lancer le projet de numérisation.

Simple contretemps sans doute dans la marche en avant de la Smals. Après s’être imposée dans le secteur social et des soins de santé, l’asbl jette son dévolu sur le monde du renseignement et de la sécurité. A elle la mise en oeuvre de la nouvelle plateforme informatique de la Sûreté de l’Etat avant de s’offrir probablement le chantier du Comité R, par une sorte d’effet contagion. Cela commence à faire beaucoup. Beaucoup… trop? « L’asbl devient tentaculaire », observe André Flahaut. Un peu de diversification ne ferait pas de tort, c’est aussi l’avis de Georges Dallemagne, député fédéral CDH qui se dit interpellé « par l’absence d’avancées concrètes dans l’informatisation de la Sûreté. Mettre tous ses oeufs dans le même panier ne me paraît pas très raisonnable dans un domaine aussi sensible que le monde du renseignement. »

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