Codeco « énergie » : ce que peut faire le gouvernement pour contrer l’explosion des prix
Un Codeco édition spéciale « énergie » a lieu mercredi. Il doit amener une réponse politique concrète face à la folle explosion des prix du gaz et de l’électricité. La mise en place d’un plafonnement européen est de plus en plus évoquée, mais pas que. Quelles autres pistes le gouvernement belge est-il en mesure (ou non) d’activer?
Après leurs (trop ?) longues vacances en pleine période de crise, les politiques du gouvernement fédéral et des entités fédérées sont (enfin) de retour aux affaires. Les nombreuses heures passées au soleil font craindre un retour brutal dans la piscine fédérale glacée. Attention à l’hydrocution. Car la folle envolée des prix de l’énergie ne s’est, elle, pas mise en pause durant ces cinq dernières semaines. Au contraire, elle n’a fait que galoper.
La rentrée politique débutera donc sur les chapeaux de roue. Pas le choix. Un Comité de concertation spécial « énergie » est d’ailleurs programmé dès mercredi. Il se doit d’apporter une réponse politique concrète. Et prouver, aux citoyens comme aux entreprises, que l’Etat a un plan de contre-attaque solide pour entamer la saison hivernale avec un minimum de sérénité. Ce n’est pas gagné.
La communication alarmiste du Premier ministre Alexander De Croo, selon laquelle la Belgique pourrait connaître jusqu’à dix hivers difficiles, manquait de perspectives et de propositions.
Explosion des prix: examen de rattrapage
Le Codeco de mercredi doit y remédier, d’urgence. Car la sortie pessimiste du Premier avait aussi suscité quelques frustrations au sein-même de la Vivaldi. Avec ce premier rendez-vous, De Croo crée sa propre seconde chance, bien inspiré par la proposition du président de Vooruit, Conner Rousseau. Le format du Comité de concertation permettra également d’inclure les gouvernements des entités fédérées dans le circuit.
La grande question demeure de savoir ce que les gouvernements peuvent faire à court terme contre l’explosion des prix de l’énergie. Avec des prix qui s’envolent pour dépasser largement les 300 euros par mégawattheure, les mesures actuelles (TVA réduite, chèque énergie, tarif social élargi) semblent anecdotiques face au choc énergétique et financier qui se profile.
Les mesures d’économie d’énergie – essentiellement une compétence régionale – n’auront un effet qu’à moyen terme. De même, l’idée d’un écrémage des surprofits des entreprises énergétiques pour les reverser à la population est une piste dont la faisabilité et le rendement ne sont pas clairs. « Si nous avions une solution magique, elle aurait été mise en œuvre il y a longtemps », avait tempéré De Croo sur la question.
Un plafond à l’espagnole
Pour le Premier et la ministre de l’Énergie Tinne Van der Straeten (Groen), il est nécessaire de mettre en place un plafonnement des prix au niveau européen. « Le marché est plus fou que jamais », avait déclaré De Croo dans De Standaard au début du mois de mars. Depuis lors, les prix du gaz ont presque doublé, et aucune nouvelle mesure concrète (si ce n’est la prolongation du tarif social élargi) n’a été décidée.
La Belgique a donc réitéré la semaine dernière, à la Commission européenne, sa demande d’un plafond de prix pour le gaz arrivant par les gazoducs européens. Selon cette proposition, les prix seraient plafonnés en fonction des cotations sur les marchés asiatiques et américains. Pour Tinne Van der Straeten, « il n’y a aucune raison pour que les prix du gaz en Europe soient démultipliés » par rapport aux autres marchés. La ministre de l’Energie propose dès lors d’étendre à toute l’Europe le plafond des prix actuels en Espagne. Le pays ibérique paie environ 180 euros par mégawattheure d’électricité. « Pour une famille moyenne, cela représente facilement 770 euros de moins par an », calcule le cabinet de la ministre. Un tel plafond garantirait parailleurs que l’Europe reste attractive pour l’exportation de gaz.
Une suspension à l’australienne
Une autre proposition consiste à suspendre purement et simplement le commerce de gros de l’électricité et du gaz en cas de mouvements excessifs, comme c’est le cas Australie. Enfin, la Belgique demande également que le prix de l’électricité soit découplé de celui du gaz. Aujourd’hui, l’électricité produite à partir de gaz fait grimper le prix total de l’électricité.
En outre, cela signifie que même une éventuelle prolongation des centrales nucléaires belges n’a en soi aucun effet modérateur concret sur la facture, tant que des centrales au gaz seront nécessaires pour notre approvisionnement en électricité. Sur cette question, l’alternative proposée par la Belgique n’est pas encore claire.
En tout état de cause, ces diverses options ne signifient rien de moins qu’une révision fondamentale du marché européen de l’énergie, qui est libéralisé depuis 1996. La restriction de ce marché est restée taboue ces derniers mois dans un certain nombre d’États membres, dont l’Allemagne, le Danemark et les Pays-Bas. Mais selon De Croo, le débat reprend de l’ampleur. Ce lundi, le Premier ministre tchèque, Petr Fiala, rencontre le chancelier allemand, Olaf Scholz, pour discuter de cette question.
Tinne Van der Straeten souhaite un plafonnement des prix d’ici la fin de l’année. Sinon, la Belgique se débrouillera seule, selon elle. « En temps de paix, on ne commencerait pas à faire ça, mais c’est une autre époque », a-t-elle déclaré à VTM Nieuws.
Cette menace semble principalement destinée à faire pression sur l’Europe. De Croo a immédiatement reconnu qu’une telle action unilatérale aurait un faible impact. Selon le régulateur fédéral de l’énergie (Creg), faire cavalier seul pousserait les fournisseurs d’énergie belges dans le rouge, s’ils ne peuvent plus répercuter les prix européens élevés. Cela aurait également un effet négatif sur la concurrence et, en fin de compte, sur les prix. « La priorité est maintenant européenne », assure Van der Straeten, qui s’abstient pour l’instant de mesurer l’impact d’un potentiel gel des prix en Belgique.
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