Joyce Azar
Climat : « quand les jeunes font la leçon aux politiques »
« Sécher les cours n’est pas la bonne méthode » : tel est le son de cloche que l’on a pu entendre de part et d’autre de la Flandre en réponse à la « grève scolaire », lancée le 10 janvier par deux lycéennes originaires de Mortsel, et suivie depuis, tous les jeudis, par des milliers d’adolescents, flamands comme francophones, en vue de dénoncer le manque d’action pour protéger la planète.
Si les responsables politiques, à qui s’adresse cette nouvelle vague d’activisme citoyen, affichent ouvertement leur respect pour ce combat, la majorité en dénonce les procédés : l’école buissonnière est illégale, elle mettrait en péril la scolarité de ces jeunes, et pourrait, en outre, être utilisée pour défendre des causes moins honorables. Des craintes sans doutes justifiées, et très certainement partagées par de nombreux parents. Difficile, toutefois, de trouver des arguments valables pour convaincre ces jeunes manifestants qu’ils ont tort de déroger aux règles.
Face à l’inefficacité de nos dirigeants dans la lutte contre le réchauffement climatique, beaucoup dénoncent la complexité institutionnelle du pays, et la multiplicité des ministres en charge de l’Environnement et de l’Energie. A y regarder de plus près, les politiques déployées à l’échelle régionale ne semblent pas pour autant plus fécondes. En Flandre, la ministre de l’Environnement, Joke Schauvliege (CD&V), se targue d’avoir engagé une amélioration de la qualité de l’air. Le dernier rapport de l’Agence flamande de l’environnement n’en demeure pas moins alarmant : selon ses chiffres, des milliers de Flamands meurent chaque année prématurément à cause de la pollution. Dans les rivières, le taux de nitrates demeure trop élevé. Quant aux forêts, elles peinent à s’étendre puisque seuls 460 des 4 810 hectares d’arbres promis par la Flandre ont été plantés. Un mauvais résultat pour celle que certains ont rebaptisée » la ministre du déboisement « , un nom qui fait référence à la permission accordée par Joke Schauvliege à l’entreprise Essers de défricher une zone naturelle de onze hectares. » Les arbres ont toujours eu pour fonction d’être abattus « , avait-elle un jour déclaré au journal De Zondag. On s’étonnera dès lors moins d’apprendre que 90 % des permis de déboisement sont accordés au nord du pays. A ce mauvais bulletin, on ajoutera aussi le refus de la Flandre de cosigner la déclaration permettant à la Belgique de rallier les pays les plus ambitieux de la COP24.
Oui, les élèves qui sèchent les cours ont, semble-t-il, toutes les raisons de le faire.
Oui, les élèves qui sèchent les cours ont, semble- t-il, toutes les raisons de le faire. Jusqu’ici, ni les actions citoyennes menées aux abords des écoles ou dans le cadre de l’opération CurieuzeNeuzen, ni les procédures en justice, ni les 75 000 participants à la manif nationale pour le climat début décembre dernier n’ont suffi à faire bouger les choses. En attendant un sursaut politique, certaines directions d’écoles ont pris les devants : en échange d’un permis de sécher les cours, les lycéens devront organiser des exposés sur le climat ou participer à des groupes de réflexion sur les gestes écologiques au sein de l’établissement scolaire. Des démarches constructives, alors que les jeunes à l’initiative de la » grève scolaire » promettent de maintenir leur action jusqu’à ce que des engagements concrets soient pris.
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