Cigarettes en chocolat, chéquiers…: ces tendances qui ont disparu en 40 ans
Avec l’évolution de nos modes de vie, des mœurs et des habitudes de consommation, certains objets ou métiers sont tombés en désuétude. D’autres, à nouveau en phase avec l’époque, font leur come-back.
Le contexte
1983-2023 : cette année, Le Vif (qui ne s’appellera désormais plus Le Vif/L’Express) fête ses 40 ans. Pour marquer le coup, le magazine a décidé de faire ce qu’il a toujours fait de mieux : décoder la société belge. Comment a-t-elle évolué, ces quatre dernières décennies ? Réponses dans notre numéro spécial.
Ils ont disparu
La cigarette en chocolat
On la tenait du bout des doigts. La bouche en «ouuu», on formait des ronds de fumée imaginaires. Parfois, on toussait pour faire plus vrai et certains mangeaient même le papier – mais ça, c’était bizarre. La cigarette en chocolat a longtemps trouvé sa place dans l’armoire à bonbons mais elle s’est consumée avec l’arrivée des campagnes de sensibilisation aux dangers du tabac. En banalisant le geste, on incitait les jeunes à mettre le doigt dans l’engrenage de la nicotine. En Belgique, la cigarette en chocolat ne fait pas l’objet d’une interdiction formelle mais, jugée de mauvais goût, elle a disparu des comptoirs. On la retrouve sous une forme proche, les sticks en chocolat, toutefois expurgée des références explicites au tabac et aux couleurs pastel. Bien que ça ressemble toujours à un paquet de clopes…
Au rayon des drôles d’habitudes de l’époque, on se souviendra aussi que la bière Piedbœuf (qui se vend toujours) était servie dans les cantines scolaires jusqu’au début des années 1980. La bière de table était alors jugée moins néfaste pour les enfants que le soda, malgré son 1,2° d’alcool.
Le gendarme
Certains métiers très symboliques ont tellement évolué qu’ils n’ont plus grand-chose à voir avec ce qu’ils étaient il y a quarante ans. C’est le cas du facteur mais aussi du gendarme, qui, lui, a complètement disparu. Après l’affaire Dutroux, qui avait mis en évidence de graves dysfonctionnements dans la collaboration entre police et gendarmerie, le gendarme a dû rendre l’uniforme. En 1998, le gouvernement Dehaene II met en place, à travers une grande réforme, une police intégrée et structurée sur deux niveaux, la fédérale et la locale. Aujourd’hui encore, on entend certains partisans du «c’était mieux avant» regretter la disparition du corps de police d’identité militaire.
Le chéquier
En France, il est courant de réclamer un paiement par chèque. Chez nous, l’époque où on sortait son carnet et son stylo est bel et bien révolue. On peut toujours se procurer un chéquier auprès de sa banque mais, à l’heure du sans contact et des applis, ce n’est évidemment plus le mode de paiement auquel on pense spontanément. Déjà en déclin dans les années 1990, le chèque a perdu sa raison d’être en 2002 lorsque la garantie bancaire des Eurochèques a été supprimée. Or, sans cette garantie, les chèques étaient refusés dans les commerces. Le chèque est toutefois revenu sous une autre forme: à échanger contre un cadeau, une expérience ou comme avantage extralégal.
Si on retrace brièvement l’histoire du paiement bancaire, on observe aussi que les premiers distributeurs automatiques de billets (DAB) MisterCash sont apparus en 1979. Les réseaux Visa et Mastercard existaient déjà mais la mise en place des cartes bancaires à puce et l’installation des lecteurs de puce dans les DAB ne se feront qu’entre 1992 et 1995. C’est en 2015 que la première carte de paiement sans contact est émise. En 2016, Belfius est la première banque à permettre à ses clients d’ouvrir un compte à vue depuis une application mobile. Aujourd’hui, c’est le paiement en espèces sonnantes et trébuchantes qui se fait de plus en plus rare. Les chiffres le prouvent: selon une étude publiée par Bancontact Payconiq Company, 2,3 milliards de transactions par Bancontact et Payconiq étaient recensées en 2022. En Belgique, le paiement sans contact par Bancontact est aujourd’hui le plus répandu puisqu’il représente 61% de toutes les opérations, contre 14% avant la crise du Covid, en 2020. Les distributeurs de billets disparaissent d’ailleurs les uns après les autres.
Les marques douteuses
Avec sa mascotte, un petit Africain à la tenue léopard coiffé d’un béret et l’oreille percée d’un anneau, la marque St Michel avait visé l’originalité. Nous sommes en 1987 et le succès des biscuits chocolatés Bamboula est bien au rendez-vous. Mais en 1994 survient en France le scandale du Village Bamboula, véritable zoo humain exploitant des figurants ivoiriens dans des conditions dégradantes. D’autres produits ont depuis fait le bad buzz pour les stéréotypes racistes qu’ils véhiculent: Chambourcy et son dessert lacté Créola, Banania et son «Y’a bon», Uncle Ben’s, les biscuits Pépito de Belin (repris par LU), les têtes de nègres…
Les métiers de la rue
Certains se sont raréfiés, d’autres ont disparu. Les marchands ambulants dont la ritournelle caractéristique annonçait le passage imminent ont progressivement stoppé leurs activités, mis à genoux par la grande distribution. Laitier, chiffonnier, poissonnier… Seul le glacier a tenu bon. Le casier de bouteilles de lait déposé devant la porte, ça avait pourtant son petit charme.
Ils sont revenus
La coupe mulet
On le pensait scalpé à jamais mais le mulet, c’est comme la queue du lézard, il finit toujours par repousser. Depuis 2019, on lui dédie même un festival à Boussu. Quelques people osent aujourd’hui porter le mulet mais rien n’effacera les longueurs dorées derrière la nuque de MacGyver.
Le Rubik’s cube
Conçu en 1974 par l’architecte et designer hongrois Ernö Rubik, le fameux cube multifacette était dans toutes les mains dans les années 1980 avant de tomber en désuétude. Mais depuis quelques années, il fait son grand retour. En 2018, le record de résolution du casse-tête était de 23 secondes pour le 3 x 3 x 3, il est aujourd’hui de 3,47 secondes.
La gourde
On a connu celle en métal, toute cabossée et avec son bouchon à clipser, qu’on emportait à l’école, en rando et au camp scout. Puis le plastique a envahi nos vies et les gourdes ont pris un coup de vieux. Mais la tendance «zéro déchet» et à l’envie de consommer plus responsable l’a réintégrée: en verre, en plastique réutilisable ou en métal, et design.
Le savoir-faire
Si la grande distribution a éclipsé certains commerces, d’autres reviennent en force. L’épicerie de quartier, le barbier et les micro-brasseries, par exemple. Savoir-faire, contact, circuit court: les petites boutiques n’ont pas dit leur dernier mot. Certains de ces commerçants sont des entrepreneurs dans l’âme, d’autres des ex-employés dans des secteurs porteurs qui ont tout plaqué pour devenir des néoartisans et retrouver du sens.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici