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Changement des institutions, changement du système électoral… Vos propositions pour sortir de la crise

Le Vif

Nous avons demandé aux citoyens leurs pistes pour éviter des crises politiques comme celle du moment. Voici un florilège des propositions. Sur le système électoral, la composition des assemblées parlementaires, le rôle du roi, le modèle institutionnel… Il y a débat !

Plus de neuf mois après les élections fédérales, et toujours à la recherche d’une majorité. Le scénario, tout prévisible qu’il était, risque de se reproduire, au vu de la différence toujours plus nette entre les votes exprimés en Flandre, en Wallonie ou à Bruxelles. Comment éviter ces enlisements ? C’est ce que nous vous a demandé, mi-février, à vous, citoyens. Et vous avez répondu en masse. Avec des pistes très diverses, et souvent très étayées. En voici un aperçu.

1 Changeons les institutions

« En créant des majorités flexibles »

Guy Delsaut (Bruxelles)

Le Parlement décide des postes composant le gouvernement. Des députés se déclarent pour telle ou telle fonction ministérielle. Chaque candidat soumet son programme, en principe calqué sur celui qu’il a présenté aux électeurs. Celui qui obtient une majorité devient ministre, avec ce programme. Celui qui a le moins de voix est éliminé à chaque tour tant qu’aucun candidat n’a obtenu la majorité. Entre chaque tour, ceux encore en lice peuvent amender leur projet pour rallier de nouveaux députés. Dans ce système, le vote de chaque élu compte, chaque ministre dispose d’une majorité différente et le programme gouvernemental est composé d’une addition d’accords pour lesquels il y a réellement une majorité. Cela renforce la démocratie et évite les marchandages. D’autre part, les ministres peuvent travailler dès qu’ils sont élus. Pas besoin d’attendre un accord global. Le citoyen peut juger les compromis de chaque élu.

Créons un système où chacun pourrait émettre des propositions, avec un système de vote citoyen.

Le rôle du Premier ministre (un élu aux capacités à rassembler reconnues) : faire respecter ce qui a été voté, régler les conflits tout en gardant à l’esprit que le Parlement a le dernier mot. Le ministre du Budget doit trouver un consensus avec l’ensemble des ministres, issus de partis différents, donc avec l’ensemble des élus.

« En désignantun gouvernement de technocrates »

Jean-Claude Chamart (Wemmel)

On met sur pied un gouvernement de technocrates, issus du monde économique, de la société civile, de la magistrature, de l’armée et de la police au besoin. En écartant soigneusement tout ce qui est lié de près ou de loin à la politique et à ses protagonistes actuels. Pour le temps qu’il faudra !

« En installant des parlements citoyens »

Pierre De Handschutter (Tournai)

Transformons le Sénat en grande assemblée citoyenne avec un pouvoir constituant qui redéfinisse les contours institutionnels du pays. Cela permettrait aussi un brassage intercommunautaire. Dans les Régions et Communautés, créons une assemblée citoyenne parallèle à l’assemblée représentative et constituée de :

– une dizaine de représentants du Parlement  » représentatif  » (PR) selon une méthode de proportionnalité semblable à ce qui se fait dans les commissions parlementaires, qui auraient surtout un rôle d’écoute et de rapportage ;

– le ministre compétent ou un représentant de celui-ci selon la thématique ;

– des  » experts  » des thématiques (société civile, professeurs d’université, représentants du monde de l’entreprise…) et d' » autres  » citoyens, tirés au sort sur une liste de volontaires.

Ce parlement citoyen, à la composition variable selon la thématique donc, formulerait ses propositions de décrets qui seraient débattues au PR.

Par ailleurs, créons un système où chacun pourrait émettre des propositions, avec un système de vote citoyen pour les évaluer ou les amender puis les soumettre à un débat parlementaire.

Enfin, trop de partis raisonnent selon des thématiques cloisonnées :  » mobilité « ,  » justice « ,  » fiscalité « … Il conviendrait peut-être de d’abord identifier rigoureusement les défis à résoudre, puis d’élaborer au travers de pactes longtermistes des propositions d’actions transversales.

« En recourant au Bureau du Plan et au Groupe des Dix »

André Pirlet (Bierges)

1. Faire établir par une équipe du Bureau du Plan, en consultation avec chacun des représentants du Groupe des Dix ( NDLR : l’organe de concertation entre les organisations patronales et syndicales) une liste complète des difficultés du pays (chômage structurel, chômage des 53-67 ans, faible taux d’emploi, grandes précarité et pauvreté, mauvaise alimentation et obésité, lacunes dans la formation scolaire…).

2. Demander au Groupe des Dix et à un représentant par parti de s’entendre sur ces difficultés à traiter à court ou moyen terme, au besoin en tranchant par une majorité des 2/3.

3. Demander au Groupe (en remplaçant les représentants de parti par les présidents) de s’entendre sur les objectifs, avec des indications chiffrées.

4. S’intéresser au  » comment atteindre les objectifs  » en faisant intervenir des experts suffisamment neutres. On y cherchera le consensus, objectif par objectif.

5. Demander aux partis de se positionner par rapport à ce gros travail, ce qui devrait grandement faciliter la tâche des informateurs et formateurs.

« En formant un organe de gestion indépendant »

Jean-Paul Frisée (Theux)

Former un organe de gestion (gouvernement ? ) composé de spécialistes/techniciens dans les domaines vitaux :

– budget : analyse des dépenses/recettes ; moyens à mettre en oeuvre, retours sur investissement, répartition équitable réelle de l’impôt, suivi de ce dernier…

– sécurité sociale : équité sociale développée, plus grande indépendance par rapport aux industries pharmaceutiques…

– emploi : garantie, création, stabilité, valorisation…

– enseignement : vraie place de l’éducation dans la société (la formation à l’école, l’éducation à la maison ! ), adéquation avec le monde du travail, accent sur les métiers demandeurs de personnel formé…

– revalorisation réelle de la société : gestion concertée des ressources par rapport aux besoins (hôpitaux, prisons, écoles, police, pompiers, armée, bâtiments, transports).

« En tirant au sort le gouvernement »

Thierry Sauvenière (Saint-Gilles)

– Le Premier ministre est tiré au sort parmi tous les élus de moins de 45 ans.

– Les ministres sont tirés au sort, un par parti représenté à la Chambre.

– Il n’y a plus de vote de parti. Les élus votent sur l’idée de la loi, pas par qui elle est proposée.

« En créant des groupes d’experts »

Eric Biltiau (Braine-le-Château)

1. Composer un ou plusieurs groupes d’experts en fonction des thèmes.

2. Evaluer financièrement chaque proposition retenue et s’y tenir.

3. Tant que le déficit budgétaire n’est pas supprimé, interdire toute démarche qui l’augmente.

4. Toute proposition non chiffrée ne peut être concrétisée qu’avec l’accord d’une majorité parlementaire. Si elle creuse le déficit du budget, les partis qui ont voté l’accord remboursent les montants excédés.

5. Supprimer les  » doublons ministériels «  régionaux et refédéraliser le climat, la mobilité, l’enseignement…

6. Diminuer les postes ministériels régionaux pour récupérer cet argent pour des actions  » citoyennes «  directes (routes, pistes cyclables, moyens de transport…)

2 Changeons le système électoral

« En soumettant un questionnaire aux citoyens »

Yves Seigneur (Bruxelles)

1. Elaborer (sans les partis) un questionnaire à soumettre à chaque Belge, sur tous les domaines de la gestion du pays. Une bonne partie du travail existe déjà : sondages, opinions, enquêtes universitaires, plateformes citoyennes… Difficile d’aller au-delà de 20 questions, mais 10 pourraient suffire.

2. Demander à chaque citoyen d’établir ses préférences par un score puis dresser la liste des points que les Belges veulent voir figurer dans la déclaration gouvernementale.

3. Laisser deux mois aux partis pour élaborer leur programme.

4. Comparer les programmes avec les choix des citoyens.

5. Voter.

Les partis qui ont compris qu’ils sont au service du pays et non d’eux-mêmes devraient trouver matière à gouverner.

« En autorisant un référendum »

Claude Calonne (Tournai) et Jean-Claude Chamart (Wemmel)

Demander son opinion au peuple au travers d’un référendum. Qui veut encore ou ne veut plus de la Belgique ? Les choses seront claires.

« En instaurant une circonscription fédérale-nationale »

Michel Courtin (Woluwe-Saint-Pierre)

Créons une circonscription  » fédérale-nationale  » pour les fédérales et européennes. Tous les partis pourraient se présenter dans tout le pays,  » l’offre  » serait la même pour tous les citoyens et les élus seraient redevables devant tous les citoyens. La légitimité démocratique s’en trouverait renforcée. Ce serait un contrepoids fédérateur essentiel pour la bonne gestion. Il faudrait s’assurer d’une représentation équitable des Bruxellois, Flamands, germanophones, Wallons et, peut-être, d’une participation citoyenne.

« En votant pour des coalitions »

Isabelle Beckers (Bruxelles)

En cas de retour aux urnes : proposer des coalitions ; les citoyens choisissent et votent pour la coalition qui les représente au mieux et toutes les Régions ont le même bulletin de vote. En cas de vote classique : toutes les Régions ont le même bulletin de vote.

« En donnant cinq voix à l’électeur »

Claude Vrielynck (Tournai)

Cinq voix par électeur, pouvant se répartir sur plusieurs partis. Aucun parti ne rassemble tous nos souhaits, ce qui m’a fait voter pour trois partis différents en mai 2019. Et pourquoi ne pas pouvoir voter au fédéral pour tous ceux qui se présentent, d’Ostende à Arlon ? Idem au régional, de Mouscron à Verviers. Autre suggestion : élire le Premier ministre au suffrage universel et pouvoir le choisir où qu’il soit en Belgique.

« En faisant voter sur les candidats des Régions »

Giovanni Poma (Tavier)

Les Régions désignent leurs favoris et le peuple peut les choisir. J’ai toujours été frustré de ne pas pouvoir voter pour Willy Claes ou Louis Tobback.

« En imposant un ticket bilingue, entre deux partis, dans chaque Région »

Françoise Lefevre (Hoeilaert)

– Une circonscription fédérale pour les élections fédérales.

– Des compétences fédérales spécifiques : fiscalité, sécurité sociale, mobilité.

– Maximum deux mois pour former un gouvernement.

– Se présenter avec au moins un autre parti (de l’autre régime linguistique). Programme commun, sinon pas de présentation au niveau fédéral.

– Une politique énergétique pour tout le pays.

– Un programme d’équilibre budgétaire : augmenter les recettes sur les plus gros salaires, inclure la fiscalité sur les salaires des voitures de société.

– Une prime aux élus ayant un certificat de bilinguisme.

« En adoptant le système français »

Patrick Derwael (Burdinne)

Le principe de coalitions a du bon en ce sens qu’il est théoriquement au plus près des désirs des votants : on a  » un peu de tout « . A contrario, il génère l’éternel sentiment du  » on prend les mêmes et on recommence « . Pourquoi pas un système à la française, où une seule ligne directrice politique est donnée ?

3 Changeons l’architecture du pays

« En créant quatre cantons »

Paul Coche (Bruxelles)

Notre réalité humaine et historique devrait conduire à s’inspirer de la Suisse. En créant quatre  » cantons  » : Flandre, Wallonie, Ostbelgien et une Ville-Etat bruxelloise (sur l’exemple de Hambourg et Berlin) au sein du canton Flandre. De toute manière, la frontière linguistique est inscrite dans le marbre.

« En faisant du roi un joker »

Serge Hendricks (Herve)

Donner le pouvoir au roi jusqu’à la prochaine législature. Il pourrait être une sorte de joker.

« En se rattachant à la France »

Frédéric Bayens (Ecaussinnes)

Seul le scénario d’un rattachement de la Wallonie à la France tient la route. Il permettrait à la Wallonie de sortir de son cul-de-sac culturel, économique et social. La part de dette wallonne peut être reprise sans trop de douleur par la France. Bruxelles pourrait également rejoindre la France et devenir l’unique capitale de l’Union européenne. La Communauté germanophone serait également la bienvenue.

« En créant un véritable hinterland pour Bruxelles »

Bruno Collard (Namêche)

Créer un véritable hinterland pour Bruxelles sur la base de l’ancienne province du Brabant. En matière linguistique, nous aurions une Région presque équilibrée entre néerlandophones (1,1 million) et francophones (1,5 million) :

– Brabant flamand : 1,146 million dont +/- 150 000 francophones

– Bruxelles : 1,198 million dont +/- 100 000 néerlandophones

– Brabant wallon : 401 106 francophones.

En matière économique, les deux Brabant permettraient d’équilibrer financièrement la Région :

– revenu moyen Bruxelles : 14 372 euros en 2017

– revenu moyen Brabant wallon : 21 035 euros

– revenu moyen Brabant flamand : 21 462 euros.

Cela permettrait à Bruxelles de développer de véritables politiques économiques, sociales, culturelles… Avec un juste retour des richesses produites dans la capitale.

Donc, 3 Régions (4 avec la Communauté germanophone, le cas échéant) en grande partie autonomes et partageant les fonctions régaliennes. Avec une circonscription fédérale, la disparition de la Fédération Wallonie-Bruxelles et le transfert des compétences communautaires aux Régions, la Région bilingue du Brabant devant pouvoir gérer ses écoles et garantir le bilinguisme sur son territoire.

4 Changeons la rémunération des élus

« En la conditionnant à la conclusion d’un accord »

Johan Vanhecke (Bruxelles), Olivier Michel (Bruxelles), Jean-Marie Flamme (Tournai) et Philippe Gosset (Fosses-la-Ville)

Limitons la rémunération de tous les élus au niveau fédéral jusqu’à la constitution d’un gouvernement avec un programme viable… Ou alors : après 90 jours sans gouvernement, on arrête de payer les dotations aux partis ; après 30 jours de plus, arrêt du paiement des salaires des parlementaires ; 30 jours de plus = shutdown des administrations.

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