Thierry Fiorilli
C’est beau comme les invitations d’Adrien Joveneau, par Thierry Fiorilli (chronique)
La connexion à la terre, à la mer, au bois, aux êtres, aux autres, aux âmes.
Sa voix, elle sourit tout le temps. Parfois, dans la rue, on voit des gens comme ça. Ils parlent à quelqu’un à côté, qui a le visage grave, mais eux sont hilares, comme si c’était la seule expression qu’ils ont. Ou qu’il n’y a pas de quoi faire grise mine, ils sont contents d’être avec ce collègue ou cet ami, ou ce voisin, et donc ils ont ce sourire aux lèvres même si rien n’est forcément rigolo. Et les regarder fait du bien, comme la petite brise sous la canicule, ou la soufflerie chaude du magasin, l’hiver. Ça change pas la vie mais ça modifie le regard qu’on y pose. Surtout, ça montre un petit sentier pour s’extirper de toute cette morosité qui patrouille, tous ces atrabilaires qui tiennent le crachoir, tous ces couteaux qui brillent dans les mots, tous ces couperets actionnés partout, ces réponses qui fusent alors qu’on n’a même pas posé une question.
La connexion u0026#xE0; la terre, u0026#xE0; la mer, au bois, aux u0026#xEA;tres, aux autres, aux u0026#xE2;mes.
Sa voix est comme ça. C’est un sourire en sons. Et lui, il doit être comme ceux qui ont cet air toujours content. Sans doute même quand il se balade tout seul. Peut-être aussi quand il dort. En tout cas, quand il parle et quand il écoute, il sourit. Ça s’entend, à la radio, et ça se voit, à la télé. Dans tout ce qu’il fait, depuis bientôt une éternité. Les Belges du bout du monde, Grandeur nature, Le Beau vélo de RAVel… On pense alors, sincèrement, qu’Adrien Joveneau est un type bien. Bon. Un vrai gentil. Qui recherche et transmet le beau, le solaire, qui n’a vraiment pas envie de passer son temps et dépenser son énergie à médire, à fouiller la vase, à faire des croche-pieds, à convoiter ceci, à jalouser celui-là.
On sait bien que, pour certains, il est aux « émissions de qualité » ce que seraient les albums de Goldman à ceux de Ferré, Brel ou Bashung. Plutôt à taper dans la rangée du fond de l’étagère, que les invités ne peuvent pas voir, parce qu’on devrait avoir un peu honte. Mais on les ressort dès qu’on est de nouveau tout seul, on les ressort parce qu’ils nous emmènent dans des endroits un peu moins stalagmitiques. Joveneau, pareil. On a déjà entendu l’un ou l’autre pote avouer, un peu embarrassé, presque en s’excusant, que le week-end, ben, ils l’écoutent, avec ses Belges expatriés là, eh ouais, mais c’est juste parce qu’il faut se lever tôt, pour déposer la gamine au sport. Et y a rien d’autre à cette heure.
Nous, chaque fois qu’on tombe sur sa voix, on s’y accroche. Parce qu’il raconte des histoires vraies, qu’on entend les personnages, qu’il y a du bonheur dans ce qu’ils disent et font, lui et ceux à qui il donne la parole, de l’audace aussi, un idéalisme tout pur, une envie de vivre, mais sans l’étaler sur une banderole aérienne ou à l’entrée d’un tunnel. Il y a les lieux décrits, des couleurs d’horizon, des choses très simples, la connexion à la terre, à la mer, au bois, aux êtres, aux autres, aux âmes. C’est toujours une invitation à découvrir ce que les gens ont de beau. Et à les aimer. Et c’est bien.
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