Thierry Fiorilli
C’est beau comme les Concerts du monde de Lamro (chronique)
Si vous savez qui pourrait éditer ce genre de choses, n’hésitez pas à me conseiller.
Il l’a envoyé par e-mail. Un recueil de ses poèmes. Il l’a intitulé Concerts du monde. Logique: « Je vais beaucoup aux concerts classiques, mais j’y vais avec de quoi écrire. Et alors surgissent images, rêves, souvenirs, émotions (passées et présentes)… » Auxquels « s’ajoutent des préoccupations de l’instant (écologiques, surtout) ». Il dit qu‘il a 65 ans, il a écrit plus de 1 500 poèmes, qu’il ne s’est « jamais aventuré à les éditer », qu’il attend « un avis, une poussée, une opportunité, un encouragement » mais il y met un point d’interrogation. Et donc, « si vous lisez et si vous aimez, faites-le moi savoir. Et si vous savez qui pourrait éditer ce genre de choses, n’hésitez pas à me conseiller. »
Chaque poème a le titre de l’oeuvre musicale dont il est né. Blumine, de Mahler, la Symphonie n°3 de Saint-Saëns, Also sprach Zarathustra, de Strauss, et puis Mozart, Beethoven, Wagner, Brahms, Dvorak, Ravel, Prokofiev, Berlioz… Parfois, c’est un moment: Concert d’été à Sighisoara ou Concert ou Ronde d’hiver. Il y a soixante-deux pages, avec « à suivre » marqué sur la dernière. On les a lues, en écoutant chaque musique. On y a décelé beaucoup de nostalgie, de désespérance face à la petitesse des hommes qui ronge la grandeur du monde, d’importance de la lumière – omniprésente, vitale. Du céleste aussi, et la conscience que le terme est plus proche que le début. Surtout, l’élégance de ceux que la beauté émeut. Comme l’illustre le texte sur la n°5 de Chostakovitch:
[…] J’avais 20 ans, le coeur soleil
J’aimais et me croyais aimé
Et le monde entier vibrait sans pareil
Je revois la salle à manger,
la radio dans la demi-obscurité
(l’époque était à l’orange)
Le vieux Philips jouait céleste
L’ air avait mouvements d’anges
Je restais là, heureux… perplexe
Tant de beauté dans une musique complexe
Un ami au-delà du Temps, de l’Espace
Un ami me donnait ma place
dans l’Univers
Je restais surpris, étonné
J’aurais aimé la Terre entière
Mais j’attendais comme un enfant gourmand, curieux
J’attendais comme un furieux
de qui était cette musique étrange
Qui m’ouvrait
un horizon immense
Qui m’ouvrait un monde magnifique
Qui me fixait à jamais au… »classique »
Je restais suspendu
Heureux, ému Amoureux
des trilles du célesta
J’avais quitté la Terre
j’errais dans les étoiles
dont l’éclat allait briller ma vie entière.
[…] On va entendre encore
ce que nous connaissons d’enfance
Cet hymne qui écartait les murs
de ma petite chambre
Et me faisait regarder le ciel clair
Confuse découverte
d’un air nouveau d’un air étrange
qui parle d’un pays qu’on ne verra jamais
Trop beau Trop lointain Lumineux
Nous sommes trop humains
pour atteindre les cieux.
Il signe son mail R.L. et sa poésie Lamro. Il met la musique en mots. Et, ce genre de choses, c’est beau.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici