Carte blanche
Bruxelles, où l’immobilisme règne en maître
Ah Bruxelles… la Capitale de la Belgique, la Capitale de l’Europe, mais aussi la Capitale des bouchons, des tunnels et des viaducs fermés.
Les tunnels Léopold II et Reyers aiment ça. D’ailleurs, il fut un temps où la traversée du premier cité pouvait s’apparenter à un dépaysement total, en mode « Grotte de Lascaux », encore que celle-ci est remarquablement conservée. Alors, certes, on ne se plaindra pas des rénovations actuelles desdits tunnels – ô combien indispensables – mais on ne peut que regretter et s’étonner de l’immobilisme dont ont fait preuve les autorités politiques des années durant ; des autorités pourtant conscientes de l’état des infrastructures routières bruxelloises.
Que dire alors du métro et dernière avancés (ou pas) le concernant. Bien que la Région de Bruxelles-Capitale se soit dotée du métro en 1976, et que le réseau ait été en expansion, sporadique certes, mais en expansion tout de même jusqu’en 2003, les infrastructures demeurent totalement insuffisantes à ce jour. Nul ne peut le nier (sauf, peut-être, ceux qui ne l’ont jamais pris). Pourtant, pas plus tard qu’en ce début de semaine, nous avons appris l’opposition des Verts bruxellois (oh…wait) à l’extension du réseau métro. Evidemment, une telle position de leur part a provoqué un tollé. N’est-il pas temps de dépasser les manoeuvres politiciennes et de s’inscrire dans un véritable projet politique au bénéfice du citoyen ? Disons les choses franchement : c’est incompréhensible, surtout quand on sait que Beliris (le fonds fédéral d’investissement pour Bruxelles) et la Région de Bruxelles ont respectivement investi 20 et 10 millions d’euros dans des études relatives à ce projet et que les Verts faisaient partie du gouvernement qui a lancé le projet d’extension de la ligne 3…
Le métro, les tunnels… et on peut même ajouter les événements récents liés à Uber. Si un récent jugement du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles confirme qu’Uber peut bel et bien opérer sur le territoire bruxellois, on ne peut que regretter qu’un cadre légal intégrant les acteurs du numérique n’ait toujours pas été mis en place par le gouvernement actuel. La société évolue, les services proposés aussi, mais le cadre normatif, lui, demeure rigide et rétrograde. Tout ceci donne l’impression que Bruxelles est constamment en retard. Alors, évidemment, nous ne dirons pas que tout va mal. Il y a bien le développement d’une mobilité douce prometteuse (ex. trottinettes électriques), mais l’offre ne couvre pas toute la région, et reste relativement coûteuse en comparaison avec les transports en commun.
Et ailleurs, ça se passe comment ?
On aime le mettre en avant. Bruxelles, c’est la Capitale de l’Europe, le lieu où sont présents moult organismes internationaux. D’ailleurs, Bruxelles, avec Washington, est l’un des endroits où il y a le plus de diplomates au monde. Un formidable et incontestable atout. Pourtant, comme soulevée ci-dessus, la qualité de la mobilité laisse beaucoup trop à désirer… De quoi pousser ces institutions (pourvoyeuses d’emploi) à aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs ? Rien ne nous permet de l’affirmer, certes… Mais ailleurs, en Europe, certaines villes ont réussi la transition et révèlent être aujourd’hui des modèles du genre. Petit tour d’horizon.
A Copenhague, les Danois vouent un culte inégalé au vélo (environ 60% des Copenhagois vont en vélo au travail). A la faveur de multiples incitants et d’un aménagement urbanistique responsable amorcé dans les années 1980 par la capitale danoise, l’utilisation du vélo par ses habitants est désormais reconnue mondialement. Pour y arriver, la ville n’a pas lésiné sur les moyens et a durablement investi dans les infrastructures cyclables et autres parkings à vélos.
A Londres, un péage urbain a été instauré aux portes de la ville, tout en permettant aux riverains et habitants de Londres intra-muros de bénéficier d’une réduction substantielle sur le prix dudit péage. Cette politique, certes restrictive, a permis de réduire considérablement le nombre de voitures à Londres et d’amorcer un changement du mode de transport des navetteurs puisque l’on observe une hausse de la fréquentation des transports en commun. Stockholm a également adopté le même système, et ceci s’est avéré être un succès. Dans les deux cas, on remarque une importante décongestion du trafic routier.
A Paris, la situation est sans doute moins rose en termes de mobilité, mais évolue positivement à certains égards. Récemment, il a été décidé d’octroyer la gratuité des transports en commun aux enfants de 4 à 11 ans. Certes, la gratuité n’existe pas – il y a toujours quelqu’un qui paiera – mais en faire bénéficier une tranche de la population telle que la jeunesse est un premier pas louable.
Enfin, que dire alors de la capitale tchèque, Prague… Quiconque s’est déjà rendu sur place ne pourra qu’être d’accord. Là-bas, se déplacer en transport en commun est un plaisir. L’offre est bon marché, les infrastructures de qualité, et les transports accessibles, tant de jour que de nuit.
On ne le dira jamais assez, mais la Région de Bruxelles-Capitale mériterait une offre en transport en commun plus conséquente, plus adaptée aux réalités de ce siècle. En somme, une offre de qualité. Faisons la promotion de la mobilité douce et de l’intermodalité, qui permettront d’éviter les nombreux embouteillages et de désengorger la ville. Mettons en place des infrastructures durables, adéquates : RER, parkings de délestage aux entrées de la ville, etc. Les idées ne manquent pas, et les réussites d’autres pays européens doivent inspirer les autorités politiques. Encore faut-il que celles-ci prennent totalement mesure de l’enjeu, ce qui n’est pas gagné !
Laurent Costas, Président de la Fédération des Étudiants Libéraux
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