Pierre Havaux
« Big Ben » Weyts (N-VA) en fait-il (beaucoup) trop ?
Dans un monde idéal, à pouvoir choisir le ministre de l’Enseignement de ses rêves, il embaucherait au nord du pays et signerait des deux mains pour Ben Weyts. « Directement ! » a dit Georges-Louis Bouchez dans la presse flamande. Las, le monde n’est jamais idéal. Et le président du MR doit se satisfaire de la socialiste Caroline Désir à la tête de l’école francophone.
» Qu’on le comprenne bien, je n’ai rien contre elle » mais… mais Ben Weyts, ce serait tout de même autre chose. Que peut avoir ce diable d’homme de si séduisant, mis à part qu’il est N-VA, pour taper à ce point dans l’oeil de GLB ? On parierait sur le côté hyperactif, toujours pressé, volontariste et communicateur du personnage.
C’est que le ministre de l’Enseignement flamand est au taquet depuis que le coronavirus sème une belle pagaille dans les écoles de Flandre. Il aime montrer qu’il se fait du souci pour la scolarité perturbée des têtes blondes. Il aime faire savoir que la fermeture prolongée des classes lui pèse mais qu’il ne reste pas les bras croisés pour éviter que les écoliers assignés dans leurs foyers ne se reposent sur leurs lauriers. Sa gestion de crise et son sens de la concertation sont d’ailleurs globalement salués par les acteurs de l’enseignement flamand. Sa maîtrise de l’agenda scolaire, l’oeil braqué sur le déconfinement, lui vaut de bons points. Il faut dire que, dès le 25 mars, Ben Weyts marquait les esprits en décrétant la mobilisation au profit des enfants numériquement démunis : » Donnez-leur un laptop ! » Un million d’euros était mis sur la table pour rassembler à la fin des vacances de Pâques 10 000 PC portables reconditionnés. Que les délais de livraison n’aient pu être tenus, que la demande n’ait pu être totalement satisfaite, n’ont pas trop entaché cette belle preuve de proactivité.
Il en fait donc beaucoup, Ben Weyts. Beaucoup trop ?
Il en fait donc beaucoup, Ben Weyts. Beaucoup trop ? Les esprits chagrins le disent. Celles et ceux qui lui reprochent une impatience inutile et s’agacent de sa politique d’annonces jugée contreproductive. La semaine dernière, au parlement flamand, Elisabeth Meuleman, députée Groen dans l’opposition, lui suggérait aimablement » d’aller suffisamment sur le terrain pour écouter les problèmes des écoles et de moins se rendre sur les plateaux télé « . De son côté, une parlementaire socialiste, aussi dans l’opposition, lui rappelait gentiment que le preteaching, ça en jette assurément dans un communiqué de presse, mais que cet enseignement à distance de nouvelles matières si cher au ministre Weyts attend de faire ses preuves ailleurs que sur papier. Ce qui n’est pas gagné.
A trop communiquer, on finit par indisposer. Choisir la presse pour exprimer le souhait que l’année scolaire se prolonge jusque début juillet a eu le don d’électriser le banc syndical des enseignants. Mais à beaucoup communiquer, on donne aussi la (fausse) impression d’avoir toujours une ardeur d’avance sur l’enseignement de l’autre côté de la frontière linguistique. Alors qu’au fond, faisait observer un sociologue dans L’Echo, les stratégies scolaires francophone et flamande » se différencient plus dans les discours que dans la pratique « . Ben Weyts sait soigner les apparences. Avoir raflé au nez et à la barbe de l’école francophone l’offre de PC portables mis à disposition par l’asbl DigitalForYouth restera pour un ministre N-VA le nec plus ultra.
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