Luc Delfosse
Benoît XVI s’en est allé ? Viva Maradiaga !
Dans quelques semaines, la Terre entière aura les yeux rivés sur un conduit de cheminée émergeant d’un toit du Vatican. Dessous, une centurie de cardinaux électeurs tenteront de choisir, de palabres en compromis, le successeur du pape démissionnaire. Mais qui donc pour succéder à Ratzinger?
Par Léon de Pas, sculpteur, auteur (1), chrétien de Progrès
et Luc Delfosse, journaliste, auteur, athée indigné.
Que l’on soit chrétien ou athée (2), l’affaire est capitale tant l’emprise morale et séculière du chef de l’église catholique reste immense. Oui : qui donc, au nom du bien commun et à défaut de ce souverain pontife élu pour… un quinquennat que réclament certains courants de fidèles?
Si, par miracle, les cardinaux osaient rompre avec la ligne conservatrice qui gangrène l’Eglise pour porter à sa tête un réformateur qui en revienne à l’essence du christianisme, il est un homme, hors du commun, déjà présent dans la liste des papabili après le décès de Jean-Paul II. Son nom ? Oscar Maradiaga.
Le continent américain ne nous a pas attendu pour acclamer ce cardinal du Honduras, économiste de formation, pionnier de la solidarité universelle. Maradiaga est au fond la version latino de l’abbé Pierre que les foules de plusieurs pays, lassées par la violence et les injustices, ont voulu nommer… président.
En 2005, au dernier conclave, ce héraut de la fraternité évangélique avait été lourdement chahuté par la curie, calomnié et renvoyé dans son pays à coups de pieds polis au cul au prétexte qu’il était « communiste » en vertu de son infatigable action au profit des déshérités et son enthousiasme pour la théologie de la charité. Un pape latino de cet acabit représenterait, on l’a compris, un trop grand danger pour les citadelles vermoulues de l’empire clérical romain. A se demander si le fantasme de certaines soutanes pourpres n’était pas de voir Mariaga mitraillé par les narcotrafiquants qu’il combattait crânement comme naguère, furent « effacés » Mgr Roméro, Mgr Camara et tant d’autres combattants pour la justice sociale dont la franchise et les actes engagés dérangeaient à la fois le déroulement des trafics et l’ordre établi.
Fondateur d’hôpitaux, d’écoles et d’universités et d’un nombre incalculable d’organisations caritatives, ennemi juré des narcos, infatigable dénonciateur des atrocités politiques qui secouent son sous-continent, Maradiaga assume le surnom qu’on lui a très vite collé : « Oui, je suis un cardinal-boxeur contre les narcotrafiquants et les agitateurs. Et après ? Le Christ n’a-t-il pas chassé les mafieux du Temple ? »
Notre humanité groupe des milliards d’êtres généreux, hommes et femmes de bonne volonté qui souhaitent vivre dans l’entraide et la fraternité en se préoccupant de répandre la paix et la joie. Quelle n’a pas été la consternation de l’Eglise de la base en se voyant infliger pour pasteur, il y a huit ans, la crème des fondamentalistes, un véritable inquisiteur. La démission de ce pontife mal aimé nous donne l’occasion d’organiser des débats, de confronter nos idées et de faire pencher la balance en faveur d’un « berger » ardent et généreux. Certes, le droit canon admet l’élection d’un pape (mâle !) non ensoutané, mais il faudra, cette fois encore passer par la mascarade d’un conclave. Dès lors que l’on choisisse au moins parmi les candidats, celui qui, depuis des décennies, s’est engagé avec une énergie et une efficacité redoutable dans la mondialisation de la solidarité, seule réponse à la globalisation économique et à la fracture Nord-Sud.
(1) « Vaincre l’Apocalypse, Cauchemar de notre Eglise deboussolée » (2) Comme les auteurs de ce texte, réunis par le même espoir de changement et de solidarité retrouvée.
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