Thierry Fiorilli

Belgium is beautiful

Thierry Fiorilli Journaliste

Quatre millions. Le budget du gouvernement belge pour restaurer l’image du pays à l’étranger. Régions et Communautés se joindront à l’affaire. Parce que, c’est dit : on va y aller ensemble !

Le fédéral, la Flandre, Bruxelles, la Wallonie, les francophones et les germanophones. La droite, la gauche et le centre. Bras dessus bras dessous. Et tout le monde a plein de propositions, a confessé le service de communication de Charles Michel.

Ça tombe bien. Parce qu’il va quand même falloir en mettre un sacré coup. Déjà, au sein de la population constituant ce qu’on appelle encore ce pays, on n’accorde plus grand crédit à son fonctionnement. Alors, les investisseurs étrangers… Les idées des dirigeants fédéraux, flamands, bruxellois, wallons, francophones et germanophones devront friser le génie.

Ça permettra aussi à leurs représentants commerciaux de ne pas trop s’attarder sur l’enseigne exacte qui les envoie. Qui les emploie. Leur ordre de mission est clair, en tout cas : vendez le produit Belgium sans entrer dans les détails d’organisation interne. Persuadez les chefs d’Etat et de gouvernement, les entreprises et les touristes que, quoi qu’on dise, quoi qu’on voie, quoi qu’on entende, la Belgique, c’est un bon partenaire, un bon placement, une bonne pioche et une bonne destination de visite. Pour tout le reste : bottez en touche !

Et donc : ne dites pas que l’exécutif fédéral n’est légitime que pour un quart de la composante francophone du pays. Ne dites pas que le parti pour lequel a voté ce quart-là, de centre-droit, est celui du Premier ministre, mais n’est pas au pouvoir dans la partie francophone du pays. Ne dites pas que, cette partie-là fait 40 % de la population nationale. Ne dites pas que c’est le centre-gauche qui y mène la danse, depuis plus de vingt-cinq ans. Ne dites pas qu’il est menacé, dans les intentions de votes, par l’extrême gauche. Ne dites pas que, dans la partie flamande du pays, c’est la droite qui gouverne. Ne dites pas qu’elle est menacée, dans les intentions de vote, par l’extrême droite. Ne dites pas que lorsque le fédéral décide, le nord embraie et le sud débraie. Ne dites pas que c’est parce que les syndicats sont dépassés, ni qu’on ne sait plus à qui s’adresser si tant est qu’on voulait discuter avec eux.

Dites qu’il faut croire à la Belgique. Et peu importe si, vous, vous n’y croyez plus

Dites que tout est sous contrôle. Que si les trains ne roulent pas, c’est à cause d’un parti absent du gouvernement fédéral mais pilotant celui du sud. Dites que les grèves, c’est toujours dans la même Région. Pareil pour les tunnels fermés et la mobilité dantesque : mais dites bien, que, là, c’est toujours dans une autre Région. Dites que c’est parce que le fédéral n’a la main ni sur la première, ni sur la seconde. Dites que ce n’est pas grave parce que, dans la troisième, il n’a pas davantage de contrôle et pourtant tout y va très bien. Tout roule : on trime, en acceptant son sort, sans faire de vagues, pas comme les paresseux des autres Régions, ces profiteurs, ces assistés, ces minoritaires, qui bloquent tout. Le pays, les réformes, le progrès. Pour des raisons politiques ! Parce qu’ils sont plus émotifs. Parce que c’est une autre culture. Tenez, dites, que c’est parce qu’ils ont ça dans les gènes ! Mais dites que, bientôt, on va régler tout ça. Une bonne fois. Ce sera marche ou crève. Et chacun chez soi. Dites qu’on n’est pas à Haïti, ni en Somalie, quand même.

Dites qu’il faut donc fortement croire à la Belgique. Et peu importe si, vous, vous n’y croyez plus. L’objectif, c’est restaurer l’image.

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