Jules Gheude
Bart De Wever et le rêve néerlandais (carte blanche)
On aura remarqué, une fois de plus, l’absence du ministre-président flamand N-VA au défilé militaire organisé à l’ocasion de la Fête nationale.
Pourquoi, en effet, s’associer à la Fête d’un Etat que l’on exècre et dont on souhaite ouvertement la disparition ? Car l’article 1er des statuts de la N-VA n’a pas été modifié : il y est toujours question de la mise sur pied d’une République flamande au sein de l’Europe.
Bart De Wever, le patron des nationalistes flamands, l’a toutefois maintes fois répété : pas question d’atteindre l’objectif de manière révolutionnaire, mais bien par une démarche « évolutive ». D’où cette volonté de transformer au préalable la Belgique en un Etat confédéral, axé sur deux Etats, la Flandre et la Wallonie, Bruxelles et la Communauté germanophone se voyant conférer un statut de « sous-entités ».
Et Bart De Wever de préciser qu’une telle réforme ne peut être possible que moyennant un accord entre son parti et le PS.
Mais hier, 21 juillet, le président de la N-VA a fait un pas de plus. Invité de l’émission « Trends Talk » sur Kanaal Z, il a en effet évoqué sans détours la réunification de la Flandre et des Pays-Bas.
Bart De Wever connaît bien l’histoire : La Flandre et les Pays-Bas formaient autrefois une unité, mais la chute d’Anvers lors de la guerre de Quatre-vingts Ans en 1585 ans y a mis un terme. Et d’ajouter : En 1993, j’étais déjà co-organisateur d’une conférence étudiante du Grand Pays-Bas. Je n’ai jamais abandonné ce rêve : que tous les néerlandophones vivraient un jour à nouveau ensemble. Je mourrais plus heureux en tant que Néerlandais du Sud qu’en tant que Belge.
On sait comment certains historiens se sont efforcés de créer le mythe de la Nation belge. Godefroid Kurth, notamment, insistait sur l’importance du catholicisme en tant que ciment.
Mais la période espagnole vient quelque peu mettre à mal sa théorie. A cette époque, en effet, la Flandre, constituée du comté de Flandre et du duché de Brabant, était largement acquise à la réforme calviniste, tout comme l’ensemble des provinces du Nord. Une situation que ne pouvait tolérer le très catholique roi d’Espagne, Philippe II,
Il fut donc décide de reconquérir ces territoires récalcitrants. Reconquista particulièrement cruelle et sanglante. On connaît ces mots du redoutable duc d’Albe : Il vaut infiniment mieux conserver par la guerre, pour Dieu et pour le Roi, un royaume appauvri et même ruiné que, sans la guerre, l’avoir entier pour le démon et les hérétiques, ses sectateurs. Plus fanatique ça, tu meurs !
Le fait que la reconquête prit fin avec la chute d’Anvers en 1585 s’explique par le différend qui opposait alors Philippe II à Elisabeth Ière d’Angleterre.
Toujours est-il que les autres provinces du Nord purent se libérer du joug espagnol pour s’ériger, sous la houlette de Guillaume le Taciturne, en Provinces-Unies, préfiguration des Pays-Bas actuels.
Les persécutions religieuses auront donc arraché les Flamands à leur destin naturel. Anvers, qui était alors le siège des Etats généraux des révoltés, aurait pu devenir la capitale des Pays-Bas.
On connaît le résultat. Tandis que la langue néerlandaise va pouvoir s’épanouir dans les Provinces-Unies grâce à la traduction de la Bible, la Flandre se morcelle en patois locaux.
La période espagnole fut donc bien un véritable drame pour la Flandre.
Aujourd’hui, les Pays-Bas forment un pays prospère, dont la dette publique représente 58% du PIB et se situe donc en-dessous de la limite européenne de 60%
Bart de Wever a dès lors raison de souligner les raisons économiques qui justifieraient une réunification de la Flandre et des Pays Bas : Ils seraient l’une des économies les plus fortes du monde. Les ports d’Anvers et de Rotterdam pourraient fusionner pour devenir la porte d’entrée de l’économie de l’Europe du Nord-Ouest. Cela ressemble à une histoire fantastique.
Autre impact important : en rejoignant les Pays-Bas, la Flandre continuerait, de facto, à faire partie de l’Union européenne et des grandes organisations internationales. Pas besoins de solliciter des réadhésions, comme ce serait le cas si la Flandre proclamait unilatéralement son indépendance.
Une histoire fantastique, en effet. Encore faut-il que le rêve puisse devenir réalité !
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