Joyce Azar
Aucun moyen n’est déployé pour décourager l’usage de la voiture
Un enfant né en Flandre court deux fois plus de risques de se faire mortellement faucher à vélo qu’un enfant né aux Pays-Bas.
Ce constat inquiétant, avancé par l’expert en mobilité de l’université d’Anvers, Dirk Lauwers, vient confirmer d’autres chiffres alarmants : durant les neuf premiers mois de 2018, le nombre de cyclistes tués sur les routes flamandes a augmenté de 40 % par rapport à l’année précédente.
On est donc loin du paradis des vélos que certains imaginent en évoquant le nord du pays. Si la Flandre peut aujourd’hui se targuer d’être la troisième région cycliste d’Europe, après le Danemark et les Pays-Bas, les autorités ont, en comparaison, encore beaucoup de pain sur la planche en matière de sécurité.
Le paradis des vélos, c’est à Utrecht qu’une équipe de l’émission Pano (VRT) l’a trouvé. Dans cette ville du centre des Pays-Bas, une marée de citoyens de tous âges arpentent quotidiennement d’imposantes et innombrables pistes cyclables. Grâce au développement des infrastructures, le port du casque ou d’une veste fluo est devenu superflu. Au coeur de la ville, l’un des plus grands parkings pour vélos au monde a été érigé. » Un bâtiment nettement moins cher à construire qu’un parking pour voitures « , relève l’échevine de la mobilité, Lot Van Hooijdonk. Ne nous leurrons pas : l’aménagement du territoire a coûté cher aux autorités, et donc aux contribuables. A terme, l’investissement s’est toutefois avéré rentable, mais aussi bénéfique pour la santé des habitants, leur sécurité et leur environnement.
Les changements drastiques qui ont transformé Utrecht ne découlent pas de l’unique bonne volonté des responsables politiques. Ils sont avant tout la conséquence d’un vaste mouvement, lancé dans les années 1970, quand les Néerlandais avaient massivement investi les rues pour exiger de » stopper l’infanticide » ( » Stop Kindermoord « ). Depuis plus de vingt ans, les citoyens flamands, eux aussi, se mobilisent pour la défense des usagers faibles de la route. Aujourd’hui encore, alors que l’utilisation du vélo ne cesse de croître, les collectifs se multiplient et parviennent localement à accélérer l’action des autorités. Celle-ci est toutefois fréquemment entravée par des obstacles inhérents à notre système de répartition des compétences, les villes étant souvent traversées par des routes tantôt communales, tantôt régionales, les autorités provinciales ayant également leur mot à dire.
Le ministre de la Mobilité, Ben Weyts (N-VA), s’est vanté, à juste titre, de la hausse des investissements, notamment dans le développement des autoroutes pour vélos. Un reproche lui est toutefois régulièrement adressé : aucun moyen n’est aujourd’hui déployé pour véritablement décourager l’usage de la voiture. Les décisions viseraient au contraire à ne surtout pas entraver le trafic automobile. A l’heure où le climat et la mobilité sont au coeur du débat social, la Flandre aurait tout à gagner à suivre l’exemple de son voisin et à adopter des mesures conséquentes qui la feront basculer d’un idéal à une réalité.
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