5G : pourquoi l’annonce de Proximus a compliqué le débat
Une bourde ? En annonçant mardi le lancement d’une 5G » light » dans 30 communes à ses actionnaires, en plein coronavirus, Proximus a attisé le feu des critiques sur un sujet particulièrement clivant. Et donne du grain à moudre aux détracteurs.
S’il fallait encore une preuve de l’ampleur de la fronde anti-5G en Belgique, la communication de Proximus l’a rappelée avec force. Annoncé mardi dernier par son CEO Guillaume Boutin, dans le cadre de la nouvelle vision stratégique de l’entreprise, le lancement d’une 5G « light » dans 30 communes flamandes et wallonnes a ravivé les critiques autour de la cinquième génération de réseaux mobiles.
L’expression « se tirer une balle dans le pied » y trouve ainsi sa plus belle expression. Comment un tel groupe, conscient depuis des années du caractère hyper-sensible du débat, a-t-il pu négliger qu’une telle annonce allait inévitablement être perçue comme une tentative d’imposer en catimini une technologie aussi controversée, alors que tous les yeux sont rivés sur l’urgence du coronavirus ? Il n’en fallait pas plus pour exhumer ces innombrables pétitions et images-choc qui n’avaient par ailleurs pas vraiment déserté les réseaux sociaux.
Ce jeudi, plusieurs médias ont relayé la défense de Proximus, accusée d’avoir mis les communes concernées devant le fait accompli, après la fronde en ce sens de plusieurs bourgmestres en Wallonie (notamment à Wavre, Louvain-la-Neuve et Namur). L’opérateur a entre autres indiqué que la demande de permis pour réaffecter une partie des bandes de fréquence 2G et 3G au profit de la 4G et de la 5G – d’où le fait qu’il s’agit d’une version « light » de cette dernière – avait bien été envoyée aux communes le 13 mars dernier. Ce qui n’a pas manqué de faire réagir une nouvelle fois le bourgmestre de Namur, Maxime Prévot (CDH), sur sa page Facebook :
Contacté par Le Vif/L’Express, il ajoute qu’après « des heures de recherches, la Ville a bien retrouvé un courrier, dont un agent a simplement accusé réception. Mais ce courrier n’est nullement explicite, puisqu’il ne fait aucunement référence à des normes d’émission de 3G, 4G ou 5G. Bref, c’est peu transparent et élégant, sur la forme et sur le timing. Quant au fond, on n’a pas nos apaisements en termes de santé et d’environnement à ce stade. »
De son côté, Proximus admet que le courrier envoyé aux communes, qui consistait à introduire une demande de permis au maximum deux semaines avant toute modification du réseau, visait exclusivement à respecter les procédures légales, et non à les informer du détail de l’initiative. « Dans un marché concurrentiel, nous nous devions de réserver ces informations confidentielles à notre annonce de mardi, qui s’inscrit dans le cadre plus large d’un changement de stratégie, explique Proximus au Vif/L’Express. Il est vrai que la procédure légale envers les communes n’est pas suffisante pour présenter ce que peut apporter la technologie et la manière avec laquelle nous voulons répondre aux inquiétudes légitimes, tout en démentant les fake news qui circulent sur les réseaux sociaux. »
La santé et l’impact sur l’environnement constituent précisément les deux principaux arguments des détracteurs de la 5G, outre la réflexion sociétale qu’elle induit sur l’hyper-connectivité. En matière de santé, la synthèse de la littérature scientifique s’exprime dans une nuance de gris : la majorité des experts estiment ainsi que le caractère néfaste des futures bandes de fréquences utilisées pour la 5G (et les bandes utilisées pour la 5G light n’en font pas partie) n’est ni démontré, ni démenti. Or, le principe de précaution, particulièrement développé en Europe de l’Ouest, préconise la prudence quand un flou persiste à cet égard. De leur côté, les détracteurs et autres instigateurs de pétitions, comme le collectif stop5G, se basent sur les études ou avis d’experts divers qui ont conclu à un (potentiel) risque pour la santé. Ils dénoncent aussi le lobbying des acteurs technologiques impliqués dans le lancement de la 5G auprès de certaines institutions ou d’une partie des scientifiques.
Un débat pollué et polarisé de longue date, donc. Mais d’autant moins serein depuis cette nouvelle annonce.
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