Votre assurance auto devient plus chère: «C’est inévitable»… mais pas toujours limpide

Noé Spies
Noé Spies Journaliste au Vif

Assurer son véhicule en Belgique se paie de plus en plus cher. En fonction des organismes, cette hausse à charge du consommateur s’estime toutefois à géométrie variable. Une chose est sûre: les coûts de réparation et la valeur des automobiles sont deux éléments qui pèsent sur l’accélérateur de l’assurance.

Assurer sa voiture devient de plus en plus cher. Les automobilistes s’en plaignent, un récent rapport du comparateur HelloSafe semble le confirmer. Ce dernier estime une forte augmentation des primes d’assurances auto en Belgique. Sur les cinq dernières années, le prix moyen d’une protection (toutes assurances confondues) aurait bondi de 11,7%, selon le baromètre estimatif. Simple soif de profit des compagnies? Pas vraiment, dans un marché qui reste concurrentiel. Cette majoration s’explique via différents facteurs. Et, en fonction des organismes de calcul, elle diffère fortement.

«L’évolution des prix lors des deux dernières années est non négligeable, reconnaît Peter Wiels, porte-parole d’Assuralia, fédération des compagnies d’assurances en Belgique. Mais plusieurs raisons l’expliquent. L’inflation, d’abord, joue un rôle indirect important.»

Assurance auto: des réparations de plus en plus chères et une concurrence questionnée

Ainsi, la hausse des primes d’assurance s’explique surtout par un facteur majeur: le coût de réparation d’un véhicule, qui a considérablement augmenté. En cas d’accident, ce que l’assureur paie «à votre place» au garage est donc de plus en plus cher. «On ne parle pas seulement du matériel nécessaire à la réparation, mais aussi des salaires, qui ont tous été fortement indexés. Le carrossier doit payer son personnel nettement plus qu’auparavant. Ces effets jouent directement dans l’augmentation des primes», explique Peter Wiels.

Evidemment, chaque compagnie garde un œil sur sa rentabilité. «Mais les entreprises d’assurances n’augmentent pas leurs prix juste pour réaliser plus de bénéfices, recadre le porte-parole d’Assuralia, qui répète que le marché (dont les trois grands acteurs Axa, AG et Baloise détiennent 50% des parts) reste concurrentiel. «La diversité des acteurs est bel et bien présente en Belgique. On peut facilement citer un top 15 des compagnies d’assurances. La situation n’est pas comparable à celle des télécoms.»

Mais la compagnie d’assurances reste une entité commerciale, qui doit donc rester rentable. «Si l’entreprise constate que les montants des primes ne suffisent plus à compenser les sinistres, elle doit préserver ‘son équilibre technique’», rappelle Bernard Dubuisson (UCLouvain), juriste spécialisé dans les assurances. Cependant, selon lui, on ne peut pas parler de monopole. «Comme dans tous les marchés, il y a des leaders. Même si celui de l’assurance tend effectivement à se concentrer, la place existe toujours pour des compagnies moyennes».

Assurance auto: quelle augmentation?

Concrètement, la prime moyenne d’assurance auto en Belgique serait passée de 454 euros en 2019 à 507 euros en 2024, soit une augmentation de 11,7 % en 5 ans, affirme HelloSafe. Chez Assuralia, on s’étonne de ne pas parvenir aux mêmes chiffres. Et ce alors que HelloSafe cite… Assuralia dans ses sources de calcul. Cocasse. «Selon notre service études et statistiques, la prime moyenne en RC (Responsabilité Civile, l’assurance de base obligatoire, NDLR.) est de 407 euros en 2023, précise Nevert Degirmenci. On remarque que les montants des primes sont en fait très stables entre 2019 et 2022. En 2023, on estime l’augmentation à 2%».

«Nous avons bâti ces estimations en consultant nos partenaires et des courtiers en assurance auto en contact avec les grands acteurs de l’industrie, répond Alexandre Desoutter, directeur des relations publiques chez HelloSafe. Néanmoins, ce ne sont que des estimations, et il n’est pas impossible que les chiffres définitifs établissent une hausse plus modérée que celle que nous affichons, admet-il. Ceci dit, le consensus semble général sur le fait que les primes sont à la hausse sur ces deux dernières années.»

Technologie et électrification: le sinistre toujours plus onéreux

Entre 2019 et 2023, le coût moyen d’un sinistre sur l’assurance RC auto a bondi de 17,3%, dont une augmentation de 21,3 % pour le seul tarif horaire des garagistes, selon l’estimation d’HelloSafe. De son côté, Assuralia estime que le montant moyen des dommages en RC s’élève à 4.100 euros.

Un coût du sinistre plus onéreux qui s’explique par la crise du Covid (le coût des pièces détachées a explosé), mais aussi par «l’arrivée de nouveaux véhicules sur le marché, toujours mieux équipés en technologies», indique Peter Wiels. Cette sophistication de la voiture augmente sa valeur, et par conséquent, le prix de son assurance.

L’électrification du parc automobile est un élément supplémentaire qui vient alourdir la facture du consommateur. «Les caractéristiques de l’électrique font qu’en cas d’accident conséquent, on doit davantage envisager le remplacement du véhicule. Les frais sont si élevés qu’il est compliqué de réparer plusieurs pièces à un prix raisonnable, explique le porte-parole. Au vu de tous ces facteurs, une augmentation des assurances auto était donc inévitable.»

Une compensation possible?

L’assurance reste une mutualisation des risques. «Ceux qui n’ont pas de sinistres payent pour ceux qui en ont, vulgarise Bernard Dubuisson. Les primes dépendent ainsi de deux facteurs: la fréquence du risque et les coûts du sinistre. Si ces deux éléments sont en hausse, on peut comprendre que les primes auto augmentent. Il en va de même pour les assurances incendies.»

Cependant, côté auto, la fréquence du risque ne devrait pas s’intensifier, au vu des systèmes de protection plus efficaces présents dans les voitures. En revanche, les coûts des réparations et de la main d’œuvre augmentent, tout comme l’indemnisation des lésions corporelles. «On peut se demander s’il n’y a pas une compensation possible au vu de la réduction de la fréquence des accidents, se questionne le juriste. Il demeure difficile de savoir si l’augmentation finale pour le client répercute uniquement l’augmentation des coûts: les compagnies restent libres de fixes leurs prix.»

«Comme le marché est très concurrentiel, une forte inflation ne signifie par automatiquement une indexation de la prime auto, ajoute Assuralia. La différence de service proposée par la compagnie (100% online ou plus personnel) peut également justifier une différence de prix.»

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Les coûts de réparation, en forte augmentation, contribuent à l’augmentation des primes d’assurances auto. © Getty Images

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