Une BMW iX
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Pourquoi les nouvelles voitures deviennent plus volumineuses, lourdes et chères

Urbain Vandormael Spécialiste voitures  

Au cours des dix dernières années, les nouvelles voitures sont devenues en moyenne 15% plus lourdes. Un changement dommageable mais difficile à inverser.

Les infrastructures routières sont de moins en moins adaptées à la croissance exponentielle du trafic mais aussi des véhicules. Cela vaut tant pour les routes nationales que pour les autoroutes, sans oublier certains tunnels, ponts et places de stationnement. Entre travaux d’entretien, réfections et adaptations, cela pourrait représenter plusieurs milliards d’euros d’ici à 2030. Et la Belgique n’est évidemment pas la seule à être concernée.

Une tonne de différence cause seize fois plus de dégâts

Les dégâts sont principalement causés par le trafic intense de marchandises, mais les voitures de Monsieur et Madame Tout-le-Monde sont également responsables. Des études montrent qu’une voiture de tourisme de deux tonnes cause seize fois plus de dégâts à l’asphalte qu’une voiture d’une tonne.

Or, une voiture pèse désormais, en moyenne, 1,7 tonne, soit une augmentation de 15% en dix ans. Chez Mercedes, elle s’élèverait même à 19%.

La raison? Les équipements des dernières générations d’automobiles, parmi lesquels les systèmes d’assistance, les sièges dotés d’une fonction de massage, les systèmes audio de haute technologie ou les fenêtres insonorisantes. Les nouvelles voitures doivent également répondre à des normes de sécurité et environnementales très strictes, qui nécessitent un renforcement de la carrosserie et des aménagements supplémentaires. Les radars doivent détecter les usagers de la route vulnérables sur ou à proximité de la route, et les filtres à particules doivent réduire les émissions polluantes. Tout cela a… un poids!

Les nouveaux véhicules sont non seulement beaucoup plus lourds, mais également beaucoup plus grands. Selon une étude de Transport & Environment (T&E), ils s’élargissent d’un centimètre tous les deux ans.

Par ailleurs, et plus que jamais, les voitures sont un symbole de statut social. Plus elles sont imposantes, plus elles confèrent de l’importance à celui ou celle qui la conduit. D’ailleurs, il suffit d’observer les flottes d’entreprise… Plus la position hiérarchique d’un salarié est élevée, plus la taille de sa voiture de société est grande et la marque de luxe.

La batterie d’une voiture électrique pèse en moyenne 600 kilos

L’électrification des gammes n’est pas non plus étrangère à l’augmentation du volume des voitures. Pour être doté d’une bonne autonomie, un véhicule doit posséder une batterie puissante. Certaines marques de luxe proposent des batteries jusqu’à 100 kWh.

Mais plus la batterie est puissante, plus elle devient volumineuse et lourde. Pour pouvoir l’installer dans une voiture, l’empattement doit être suffisamment grand. Si la distance entre l’essieu avant et l’essieu arrière est trop petite, il faut réadapter tout le véhicule, jusqu’à la taille des pneus et des jantes.

Ces ajustements sont nécessaires pour garantir à la voiture un aérodynamisme capable de réduire la consommation d’énergie et améliorer l’apparence de la voiture. Les concepteurs de Mercedes, en particulier, n’en ont pas suffisamment tenu compte lors de la conception des modèles EQS et EQE. Ils n’ont pas l’élégance des classes S et E. Une correction qui devrait opérée sur leurs successeurs.

Le stationnement provoque plus de stress que l’autonomie du véhicule

Même sur les modèles compacts, l’évolution de taille et de poids est visible. La première génération de Golf, chez Volkswagen, pesait 800 kilos et mesurait 3,7 mètres de long sur 1,6 mètre de large. La génération actuelle affiche 1.300 kilos et revendique 4,28 mètres de long sur 1,78 mètre de large.

Cette augmentation se manifeste particulièrement lors du stationnement. Dans la plupart des parkings, une place mesure 2,3 mètres de large, une taille devenue aujourd’hui insuffisante. Vingt centimètres de plus seraient désormais nécessaires. Plus de la moitié des 100 modèles les plus vendus sont plus larges que la largeur minimale des places de stationnement publiques, rétroviseurs déployés. Conséquence: les SUV et les limousines occupent régulièrement une partie des pistes cyclables ou piétonnes, ce qui n’améliore pas la sécurité des usagers de la route vulnérables.

Un sondage non représentatif auprès de quelques dizaines de personnes montre qu’elles redoutent bien plus les difficultés de stationnement que l’autonomie du véhicule. Se garer se fait souvent la peur au ventre.

Cela peut paraître surprenant, car la dernière génération de modèles haut de gamme est équipée d’un système d’aide au stationnement efficace. Mais dans la pratique, seule une minorité l’utilise. Le législateur pourrait travailler sur de nouvelles dimensions minimales pour les places de parking, avec l’espoir que les constructeurs réussiront à mettre en œuvre rapidement de nouvelles batteries plus compactes, plus légères et tout aussi efficaces, et ainsi réduire la taille des voitures.

A qui la faute?

Mais ne serait-il pas temps, aussi, que les automobilistes se demandent pourquoi ils ont besoin d’un SUV volumineux ou d’une voiture électrique avec une autonomie d’au moins 600 kilomètres sachant que la plupart d’entre eux parcourent moins de 50 kilomètres par jour?

Il est facile de blâmer les constructeurs. Ceux-ci anticipent les réglementations légales et tiennent compte des souhaits du client, dont la conscience du statut social prend souvent le pas sur la conscience écologique.

Les marques parviendront-elles à revenir à leurs racines? Certaines tentent la carte de modèles plus petits et abordables. Mais le pari reste difficile, notamment en raison des normes de sécurité et environnementales toujours plus strictes auxquelles doivent répondre les nouveaux véhicules. Engranger des bénéfices sur le segment des voitures compactes est devenu difficile.

C’est pourquoi de nombreux modèles populaires ont disparu et pourquoi les voitures neuves risquent de devenir inabordables pour les salariés moyens. Par conséquent, posséder une voiture pourrait ne plus être la norme à long terme. Ce qui pourrait ouvrir la voie à de nouvelles initiatives, comme davantage de voitures partagées ou louées. Mais sera-ce suffisant pour que l’industrie automobile continue de fonctionner?

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