Anne-Sophie Bailly
Pourquoi Audi Brussels symbolise les défis des constructeurs européens de voitures électriques
L’usine Audi Brussels joue sa survie. Mais sa sauvegarde s’intègre dans le contexte plus large des défis auxquels sont confrontés les constructeurs européens de véhicules électriques.
Cela faisait partie des dossiers que le gouvernement De Croo voulait boucler avant de passer en affaires courantes: soumettre au groupe Volkswagen un plan de sauvetage de l’usine Audi Brussels. Un site dont l’avenir se conjugue actuellement à la forme interrogative puisque aucun successeur n’a jusqu’ici été désigné pour occuper la place sur les lignes d’assemblage du SUV e-tron Q8, dont la production cessera en 2026. Projet d’éolienne, amélioration de l’accessibilité du site par voie ferroviaire, aides à l’investissement… Un épais dossier de soutien à l’usine forestoise a été proposé à la direction du constructeur allemand. Qui en a accusé bonne réception et dit évaluer «différents scénarios». Des scénarios qui dépassent évidemment le cadre belge pour s’inscrire dans un contexte de mutation profonde d’un secteur également confronté à des incertitudes majeures.
L’interdiction de vente de voitures thermiques à partir de 2035 décidée par l’Europe est questionnée avec plus d’intensité encore depuis les résultats des élections du 9 juin, qui ont vu des partis politiques favorables au report de la mesure engranger des points. Quant à la croissance des ventes des voitures électriques sur le Vieux Continent, elle s’essouffle depuis plusieurs mois et oriente à la baisse la part de marché de ce type de motorisation. Ces éléments de contexte fragilisent encore l’avenir des constructeurs automobiles implantés sur le sol européen. Audi Brussels compris.
C’est d’ailleurs pour tenter de trouver une parade au déclin de l’industrie automobile au sein de l’UE que la Commission a récemment annoncé l’établissement de taxes douanières à l’importation de véhicules électriques chinois. Espérant par là en limiter la livraison et l’engouement du consommateur.
C’est faire preuve de naïveté à plus d’un titre. D’abord, parce que les marges engendrées par les constructeurs chinois sont à ce point importantes que les amputer de quelques pourcents ne suffira pas à endiguer le flux de véhicules à destination des ports européens. Ensuite, parce que cela sous-entendrait que le succès des voitures chinoises ne serait dû qu’au soutien financier des pouvoirs publics locaux. Et que cela passerait sous silence le retard pris dans l’investissement électrique des constructeurs européens et leur choix de s’orienter vers le haut de gamme au détriment de véhicules moins chers et plus vendus. Enfin, que le désamour pour la voiture électrique, malgré son impact environnemental réduit et ses politiques de soutien, s’explique aussi par le manque d’infrastructures ad hoc. Une preuve? Le désert wallon.
Croire qu’instaurer des barrières douanières suffira à endiguer le flux de véhicules électriques chinois, c’est faire preuve de naïveté.
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