Usine Geely
Les véhicules électriques chinois vont être soumis à des surtaxes lors de leur importation dans l'UE. © Tan Yunfeng/VCG via Getty Images

La Commission impose de lourdes surtaxes sur les véhicules électriques chinois… au grand dam des constructeurs allemands

Les véhicules électriques à batterie en provenance de Chine seront soumis à une surtaxe allant jusqu’à 37,6% lorsqu’ils seront importés dans l’Union européenne, a annoncé jeudi la Commission européenne. Ces mesures provisoires entreront en application dès vendredi.

Au terme d’une enquête ouverte en septembre 2023, la Commission européenne a conclu que la production de véhicules électriques à batterie en Chine bénéficiait de subventions déloyales, ce qui représente une menace de préjudice économique pour les producteurs européens.

Dès le vendredi 5 juillet, les droits de douane appliqués seront compris entre 17% et 37,6%, en fonction du taux de subvention perçu par les constructeurs et leur degré de coopération à l’enquête. Le taux sera de 17,4% pour la marque BYD, 19,9% pour Geely et 37,6% pour SAIC. Les autres producteurs chinois qui ont coopéré à l’enquête européenne seront soumis à une moyenne de 20,8%, tandis que les sociétés qui n’ont pas coopéré devront payer 37,6% de droits.

Ces tarifs s’ajoutent aux taxes douanières actuelles de 10%. Ils seront déposés sous la forme d’une garantie bancaire et ne pourront être prélevés que si les surtaxes deviennent définitives. 

Du provisoire au définitif ?

L’Union européenne a quatre mois pour décider d’imposer des tarifs définitifs sur les véhicules chinois. 

Les parties intéressées peuvent désormais soumettre leurs observations à la Commission. Elle proposera ensuite des mesures définitives, qui devront être votées par les États membres. Pour bloquer les mesures, il faudrait qu’une majorité qualifiée d’États membres s’y opposent (15 pays représentant 65% de la population européenne). Une fois adoptée, la décision rendrait les surtaxes définitives pour une période de cinq ans.

La France et l’Espagne ont poussé activement pour des mesures proportionnées contre la Chine, mais l‘Allemagne a bataillé aux côtés de la Suède et de la Hongrie pour éviter des sanctions dans ce dossier, craignant des représailles.

La Commission européenne avait annoncé ces mesures le 12 juin déjà, mais à l’époque, elles étaient encore au stade de la menace. Des pourparlers ont été engagés avec Pékin pour tenter de trouver une solution. Des contacts se poursuivent « au niveau technique » en vue de parvenir à un accord compatible avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce et qui réponde aux préoccupations européennes, a expliqué l’exécutif européen.

De son côté, la Chine conteste toute concurrence déloyale et a prévenu que ces taxes pourraient mener à une guerre commerciale. Jeudi, Pékin a toutefois souligné l’importance d’une solution négociée. « J’espère que la partie européenne et la partie chinoise chercheront à se rapprocher, à faire preuve d’équité et à accélérer les consultations », a déclaré un porte-parole du ministère du Commerce.

Cette nouvelle passe d’armes s’inscrit dans un contexte plus large de tensions commerciales entre les Occidentaux et le géant asiatique, également accusé de détruire la concurrence dans les éoliennes, les panneaux solaires ou les batteries.

Les véhicules électriques à batterie chinois représentent aujourd’hui plus d’un cinquième du marché européen, contre 3% il y a trois ans, selon les estimations du secteur. Le marché est en plein essor, alors que l’UE a décidé d’interdire la vente de véhicules neufs à moteurs thermiques en 2035.

Si elle échoue à endiguer la vague de modèles électriques chinois, le risque est de voir l’industrie européenne disparaître. La filière emploie quelque 14,6 millions de personnes dans l’UE.

XPeng et NIO ne comptent pas abandonner l’UE

Les constructeurs automobiles chinois XPeng et NIO ont indiqué jeudi à l’AFP poursuivre leur désir de se développer au sein de l’Union européenne, malgré l’imposition de surtaxes à titre compensatoire sur les véhicules électriques venant de Chine.

Ainsi, XPeng a assuré qu’il « ne changera pas » sa stratégie de développement. « En tant qu’entreprise avec une vision globale, Xpeng ne changera pas sa stratégie d’exploration des marchés étrangers. Nous trouverons des moyens de minimiser l’impact sur les consommateurs » européens, a indiqué l’entreprise.

NIO a pour sa part indiqué souhaiter « parvenir à une solution avec l’UE ». « Malgré ce fait nouveau, NIO reste pleinement engagé sur le marché européen: nous croyons en la promotion de la concurrence et en l’intérêt des consommateurs, et nous espérons parvenir à une solution avec l’UE avant que les mesures définitives ne soient appliquées en novembre 2024 », a déclaré le constructeur à l’AFP.

Les constructeurs allemands rejettent la mesure

Le premier constructeur automobile européen Volkswagen a déclaré « rejeter » les droits de douane supplémentaires sur les importations de véhicules électriques chinois imposés jeudi par l’UE, que le groupe allemand juge « préjudiciables« .

« Les effets négatifs de cette décision l’emportent sur les avantages possibles pour l’industrie automobile européenne et en particulier pour l’Allemagne », a déclaré le groupe, alors que les constructeurs automobiles allemands, qui exportent leurs modèles en Chine, craignent des représailles de Pékin.

« Les droits compensateurs ne sont généralement pas adaptés au renforcement à long terme de la compétitivité de l’industrie automobile européenne – nous les rejetons », a ajouté Volkswagen.

Le moment est particulièrement mal choisi, juge VW, compte tenu de « la faiblesse actuelle de la demande de véhicules électriques en Allemagne et en Europe. Ce ralentissement du marché pourrait être aggravé par une hausse des tarifs des voitures importées. »

Pour son concurrent BMW, l’introduction de ces surtaxes mène à « une impasse » et « enfreigne gravement le principe du libre-échange, d’après un communiqué.

Les constructeurs allemands, pour qui la Chine est le marché principal, ont le plus à perdre d’une guerre commerciale avec Pékin.

« Toute mesure protectionniste, y compris les droits de douane supplémentaires (…) restreint le libre-échange et comporte un risque de conflits commerciaux, ce qui finit par nuire à toutes les parties », a commenté dans un communiqué la fédération allemande des constructeurs automobiles (VDA).

La VDA appelé jeudi la Chine et la Commission européenne « à tout mettre en œuvre pour trouver une solution dans le cadre d’un dialogue ouvert et constructif. Un éventuel conflit commercial mondial doit être évité ».

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