Comment le carburant de synthèse va remplacer l’essence et le diesel (analyse)
Le carburant de syntèse, ou e-fuel, ouvre la porte à une prolongation des véhicules thermiques au-delà de 2035. Sa forme ? De l’essence ou du diesel ‘neutre en CO2’. Cher, l’e-fuel devrait rester réservé aux voitures sportives et aux poids lourds. Analyse en 3 questions avec Olivier Duquesne, journaliste au Moniteur Automobile.
Une ligne dans un paragraphe qui altère considérablement la portée d’un texte. Voilà, en quelques mots, comment on pourrait résumer la victoire obtenue par l’Allemagne dans le débat sur la fin programmée des voitures thermiques en Europe. Poussé dans le dos par le tout-puissant secteur automobile allemand, le gouvernement d’Olaf Scholz a surpris ses partenaires européens début mars, en refusant de voter le texte. Avant d’accepter, une fois ce dernier modifié après négociations. Ce qui a changé entre-temps ? Une exception pour le carburant de synthèse (ou e-fuel), qui permettrait de continuer à utiliser les moteurs thermiques si le combustible qui les alimente est neutre en CO2.
Qu’est-ce qu’un carburant de synthèse ?
En une phrase, le carburant de synthèse est un combustible produit de manière vertueuse en laboratoire. Pour mieux comprendre la fabrication et la composition de l’e-fuel, Le Vif s’est tourné vers Olivier Duquesne, journaliste au Moniteur Automobile. « Vous acheminez une molécule de pétrole en laboratoire pour en faire du diesel. Sur l’ensemble du processus, vous ne pouvez pas produire de gaz à effet de serre. Les camions ou les bateaux qui acheminent ce pétrole ne doivent pas émettre de CO2. Pour produire le carburant de synthèse, vous utilisez de l’électricité verte. Ou alors, vous compensez vos émissions en plantant des arbres. Tout ça est très compliqué mais il y a un avantage : on peut produire du carburant partout ».
Qui utilisera ces carburants de synthèse ?
L’e-fuel, encore très cher pour le moment, n’est pas destiné à alimenter les voitures des particuliers. Il devrait plutôt servir aux véhicules lourds comme les camions, pour qui l’utilisation de batteries électriques est compliqué. « L’industrie automobile veut continuer à faire rouler les véhicules anciens et les voitures de sport, continue le journaliste automobile. Le carburant de synthèse est destiné à un public limité parce qu’il coûte encore très cher. Les prix sont amenés à baisser mais ça risque de rester plus cher que l’électricité. Et puis certains types de véhicules auront toujours besoin de pétrole : les tanks de l’armée, les camions de pompiers, la police, les avions, les bateaux. Pour eux, l’hydrogène pourrait être une meilleure option que l’électricité. Ces véhicules utilitaires peuvent fonctionner avec une batterie électrique. Il y a la place, mais encore faut-il la charger ».
L’hydrogène comme carburant alternatif
Attention à la confusion. L’hydrogène n’est pas un carburant de synthèse, mais bien un carburant alternatif. Dans le contexte actuel, l’hydrogène ne peut pas toujours être utilisé, car sa fabrication produit encore du CO2. « On commence à envisager l’utilisation de ce combustible pour les camions et les poids lourds, car on se rend compte que les camions électriques, c’est une fausse bonne idée, lance Olivier Duquesne. Par contre, on ne peut pas encore alimenter les voitures légères en hydrogène. Sa fabrication ne respecte pas les normes européennes de pollution. Pour pouvoir le mettre dans une voiture, ce doit être de l’hydrogène vert, qui provient de l’éolien ou du solaire ».
L’hydrogène, selon sa couleur, pollue plus ou moins pour être fabriqué. La molécule H2 peut prendre 7 couleurs actuellement :
- Blanc = hydrogène à l’état naturel
- Brun/noir = hydrogène produit en transformant du charbon en gaz
- Gris (le plus courant) = hydrogène produit à partir de gaz naturel
- Bleu = hydrogène ‘bas carbone’, dont les émissions de CO2 générées sont captées par le sol
- Rose = hydrogène produit avec de l’énergie nucléaire
- Jaune = hydrogène produit en fonction du mix énergétique disponible (solaire, éolien, fossile)
- Vert = hydrogène ‘propre’, lorsque l’électricité utilisée a été produite à partir de sources renouvelables
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