© Photo: Marcus Brandt/dpa

En Allemagne, la route pour former le prochain gouvernement risque d’être longue

Si l’Allemagne renouvelle ses députés aujourd’hui, elle devra néanmoins attendre des semaines, peut-être des mois, avant d’avoir un nouveau gouvernement.

Car, au vu des sondages, le parti vainqueur n’aura pas à lui seul la majorité absolue. Il devra trouver des alliés et s’entendre sur un programme commun. En attendant, c’est Olaf Scholz qui restera aux commandes. Une parenthèse malvenue alors que le pays affronte la « tempête » Donald Trump et une crise économique.

Du flirt au mariage

La composition du Parlement en Allemagne, où il est rare qu’un parti dispose de la majorité absolue, constitue la base de la formation ensuite du gouvernement. Dans les heures suivant le scrutin, les dirigeants des principales formations commencent à se positionner en fonction de leurs résultats dans un vaste ballet des prétendants. Les invectives de la campagne sont généralement rapidement oubliées.

Au vu des derniers sondages, c’est à l’opposition conservatrice de Friedrich Merz, créditée du meilleur score avec 30%, qu’il devrait revenir d’ouvrir la danse.

Les démocrates-chrétiens préfèreraient une union à deux pour plus d’efficacité, une « grande coalition » avec les sociaux-démocrates du SPD, qui s’attendent à environ 15%. L’attelage a été éprouvé à quatre reprises dans l’histoire, la dernière fois entre 2013 et 2021 sous Angela Merkel.

Si la droite et le SPD n’ont pas besoin d’un troisième partenaire pour former une majorité gouvernementale, « je m’attends à des négociations relativement rapides », dit Dorothée de Nève, politologue de l’Université Justus Liebig de Giessen. Car « ces deux partis ont accumulé les expériences communes aux niveaux national et régional« , souligne-t-elle.

Ménage à trois

Mais rien ne garantit que ces formations auront assez de sièges pour une majorité absolue en duo. Auquel cas il faudrait ajouter un troisième parti, ce qui compliquerait encore les discussions, comme en 2021 après le précédent scrutin.

Il pourrait s’agir des écologistes. Mais une partie des conservateurs ne veut pas en entendre parler. Peut-être alors des Libéraux du FDP, si ces derniers parviennent à franchir le seuil de 5% des votes, ce qui reste très incertain.

Si une alliance majoritaire se dessine, il faudra passer aux choses sérieuses : la négociation du « contrat de mariage » ou accord de coalition. « Les contrats de coalition sont relativement longs et détaillés, c’est une spécificité de la politique allemande », rappelle à l’AFP Dorothée de Nève. « Moins les partis se font confiance, plus ils éprouvent le besoin d’aller dans les moindres détails pour anticiper tout problème« , ajoute-t-elle.

Cette feuille de route est souvent qualifiée de carcan, privant le gouvernement ensuite de marge de manoeuvre pour réagir lorsque les circonstances extérieures changent, en cas de crise internationale ou économique par exemple.

Des précédents peu encourageants

A l’issue des précédentes élections de 2021, il a fallu dix semaines au total pour former la coalition du chancelier Scholz, entre son parti social-démocrate, les Verts et les Libéraux. Ce délai de deux mois et demi pour constituer un gouvernement se situe « dans la fourchette habituelle », dit à l’AFP Uwe Jun, professeur de sciences politiques à l’université de Trèves.

« Jusqu’en 2005 (…), l’Allemagne a presque toujours eu des processus de formation des coalitions relativement simples« , ajoute-t-il. Mais la polarisation croissante de la vie politique rend plus difficile de sceller des compromis, en Allemagne comme dans le reste de l’Europe.

L’intérim le plus long s’est produit en 2017, lorsque les conservateurs d’Angela Merkel ont mis six mois à former une coalition avec les sociaux-démocrates. La première tentative de Mme Merkel avec les Verts et les libéraux avait échoué de manière spectaculaire, prolongeant l’attente.

Beaucoup de choses peuvent encore se produire dans le jeu de « roulette politique » allemand, note l’analyste Michael Bröning. « La fragmentation pourrait produire un Parlement historiquement fracturé avec jusqu’à huit groupes se disputant le pouvoir », ajoute-t-il.

Contenu partenaire