Sortie du nucléaire : le dossier qu’aucun gouvernement ne parvient à régler depuis… 19 ans

Une nouvelle réunion du Conseil des ministres restreint (Kern) est prévue ce mercredi à 19 heures. L’objectif ? Arriver à un accord autour de la sortie du nucléaire en 2025. Une  » mission impossible  » qui est sur la table des différents gouvernements depuis presque 19 ans. Retour sur un dossier électrique de la politique belge, qui continue à faire beaucoup parler de lui.

2003

Des débuts encourageants

Tout commence en janvier 2003. Guy Verhofstadt est aux manettes d’un gouvernement libéral, socialiste et écologiste ainsi nommé « Arc-en-ciel ». Á l’époque, quatre écologistes font partie de la coalition, dont Olivier Deleuze, Secrétaire d’État fédéral à l’Énergie et au Développement durable et adjoint à la ministre de la Mobilité et des Transports, Isabelle Durant, elle aussi écologiste.

Sous l’impulsion des Verts, le Sénat votait la fermeture des centrales nucléaires en Belgique, prévue entre 2015 et 2025. Mises en service entre 1975 et 1985, sept réacteurs nucléaires sont concernés, les quatre de Doel et les trois de Tihange. Sept centrales, qui sont utilisées pour fournir à peu près la moitié des besoins en énergie de la Belgique, soit 5927 Mégawatts selon les chiffres du Forum nucléaire.

Avec la « loi sur la sortie progressive de l’énergie nucléaire à des fins de production industrielle d’électricité » adoptée par le Parlement le 31 janvier, l’objectif était à la base de fermer les trois réacteurs les plus anciens dès 2015 et ensuite d’arrêter la production d’électricité des quatre derniers entre 2022 et 2025. Pour compenser ces fermetures, il aurait donc fallu trouver des alternatives pour produire de l’énergie.

Nouveaux gouvernements, nouveaux problèmes

En juillet 2003, Guy Verhofstadt se lance pour un deuxième mandat en tant que Premier ministre, et la « coalition violette », composée des libéraux et socialistes wallons et flamands, est formée. Les écolos ne faisant plus partie du gouvernement, il n’a pas fallu longtemps avant qu’un retour en arrière soit envisagé du côté des libéraux francophones et flamands.

Mais alors que personne ne pensait que la loi allait survivre sans la présence des Verts au sein du gouvernement, un allié de taille des écologistes s’impose dans le débat, le socialiste flamand et vice-Premier ministre Johan Vande Lanotte.

Les débats s’enchaînent, les rapports des socialistes en faveur de la sortie et ceux du ministre de l’Énergie Marc Verwilghen (VLD) contre cette sortie attisent un feu déjà brûlant. Mais en attendant, les alternatives, comme des centrales au gaz, peinent à être trouvées.

2009

Face à ce problème majeur, il n’y plus le choix : il faut prolonger les centrales nucléaires. Une décision que prend Paul Magnette, ministre de l’Énergie en 2009, qui rajoute dix années de plus à Doel 1 et 2 ainsi qu’à Tihange 1, donc la fermeture était programmée pour 2015. D’autres prolongations suivront, en 2012 avec Melchior Wathelet fils et en 2015 sous l’impulsion de Marie-Christine Marghem.

Ces deux dernières prolongations sont particulièrement importantes parce qu’une nouvelle question rentre en jeu, celle de la sécurité des réacteurs nucléaires. En 2012, après analyse des réacteurs, des défauts sur la cuve de Doel 3 et Tihange 2 sont découvertes. En plus de ces défauts, des « microfissures » sont aperçues sur ces mêmes centrales et une chose est sûre, elles peuvent faire beaucoup de dégâts. Deux ans plus tard, l’Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN), l’autorité en charge du contrôle des centrales, décide de stopper les activités de ces deux centrales. Elles seront finalement remises en marche en novembre 2015, un peu plus d’un an après leur arrêt temporaire.

Alors que les trois plus anciennes centrales nucléaires devaient fermer dès 2015, cela n’a finalement été le cas pour aucune d’entre-elles. Les réacteurs ont continué de fonctionner et aucune fermeture n’est prévue avant 2025.

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Une solution possible, enfin ?

Miracle ! Un accord pour la fermeture du parc nucléaire entre 2022 et 2025 est finalement trouvé par la gouvernement Michel I en mars 2018. Une bonne nouvelle, qui comprend cependant quelques difficultés. Quatre critères doivent être respectés pour que cet accord fonctionne : un approvisionnement énergétique alternatif suffisant, le respect des accords de Paris sur le climat, le maintien d’un prix abordable pour tous et la sécurité des installations.

Les écologistes jubilent… Dès octobre 2020, ils sont de retour au gouvernement fédéral avec comme Premier ministre Alexandre De Croo (Open-VLD). La N-VA, le plus fervent opposant à la sortie du nucléaire, n’est plus de la partie. Les socialistes, des alliés de la première heure, rejoignent la cause et le Premier ministre est plutôt favorable à cette sortie.

Mais cette fois-ci, c’est une nouvelle fois le MR qui fait des siennes. Alors que Charles Michel et Marie-Christine Marghem (MR) se positionnaient plutôt pour la sortie du nucléaire durant leur mandat, c’est maintenant Georges-Louis Bouchez qui s’y oppose. Selon l’actuel président du MR, l’approvisionnement via les alternatives aura un impact conséquent sur les prix et les centrales électriques au gaz émettent également du CO2. Mais une étude de l’Université de Gand ainsi qu’un rapport du SPF Économie remet en cause les doutes que Georges-Louis Bouchez.

L’espoir est grand du côté des écologistes pour ces nouvelles négociations. Tine Van der Straeten (Groen), l’actuel ministre de l’Énergie sous le gouvernement « Vivaldi », ne baisse pas les bras et souhaite fermer toutes les centrales nucléaires d’ici 2025. Est-ce possible ? Rien n’est moins sûr en tenant compte du passif de ce dossier qui traîne au 16 rue de la Loi depuis bientôt 19 ans.

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