Coronavirus : « les personnes qui ont été infectées protègent les autres »
Alors que le coronavirus continue à faire des ravages dans le monde, et qu’il a dépassé la barre des 16 000 morts, certains préconisent une approche plus naturelle du virus. « On nous a fait croire ces derniers jours que nous gagnerons la guerre contre le coronavirus. En l’absence de vaccin, c’est inexact, au mieux nous repoussons l’ennemi », estime Grégory Morlighem, biologiste.
Lundi dernier, le président français Emmanuel Macron déclarait lors d’une allocution télévisée : « Nous sommes en guerre sanitaire. Nous ne luttons ni contre une armée, ni contre une autre nation. Mais l’ennemi est là, invisible, insaisissable, qui progresse. Et cela requiert notre mobilisation générale ».
Une approche plus naturelle
Pour le biologiste, c’est tout le contraire : on ne part pas en guerre contre un virus. Mieux vaut privilégier une approche plus naturelle en respectant les règles essentielles, à savoir éviter à tout prix les sources de contamination. Il rappelle d’ailleurs que c’est l’homme qui a provoqué la contamination en mettant en présence des espèces qui naturellement ne vivent pas ensemble, comme c’était le cas sur le marché d’animaux de Wuhan en Chine. De plus, l’humain ne respecte pas toujours la chaîne naturelle : « L’homme est la seule espèce qui consomme volontairement des substances qui lui sont préjudiciables tout en étant parfaitement conscient », souligne-t-il.
Sur le long terme, le scientifique trouve intéressante la stratégie de l’immunité collective plébiscitée par les Pays-Bas et le Royaume-Uni, même s’ils font marche arrière. Rappelons que l’immunité collective consiste à tenter d’enrayer la propagation d’une maladie contagieuse si un certain pourcentage (60% ou 70%) de la population est immunisé. Soit par vaccination – scénario non envisageable dans le cadre de la lutte contre le coronavirus vu qu’il n’y a pas encore de vaccin -, soit en laissant une partie de la population être contaminée.
L’objectif est de parvenir à une « immunité de groupe » dans l’attente d’un vaccin, en laissant les personnes les moins vulnérables attraper le virus tout en protégeant au maximum les plus fragiles (personnes âgées et malades). Cette méthode repose sur le fait que les gens contractent la maladie et deviennent ainsi immunisés.
Une seule arme contre le coronavirus
En attendant un vaccin, Grégory Morlighem explique que nous ne disposons que d’une seule arme pour lutter contre le coronavirus ou Covid-19 : notre propre immunité. « Les traitements administrés aux patients qui souffrent du coronavirus n’ont pour but que d’aider leur système immunitaire à combattre le virus et soulager les symptômes », explique-t-il.
« Pour les personnes qui ont été infectées par le Covid-19 et qui en sont guéries, on peut considérer qu’elles sont immunisées, un peu comme si elles avaient été vaccinées. Ainsi, non seulement elles ne seront plus malades, mais elles ne peuvent plus servir de réservoir pour le virus Covid-19. À défaut de trouver des hôtes à infecter, le virus ne peut plus se répandre. Ainsi les personnes qui ont été infectées protègent les autres », déclare-t-il.
Le virologue Marc Van Ranst confirme que les personnes qui ont contracté le virus ne peuvent pas être contaminées une deuxième fois, sauf exception. Il souligne toutefois que ces personnes ne sont pas immunisées pour toujours, vu que le virus peut muter (comme c’est le cas pour la grippe).
Morlighem conteste l’idée qu’il s’agirait d’une forme de darwinisme, c’est-à-dire, une méthode qui consisterait à laisser survivre les plus forts, et mourir les plus faibles. « En fait c’est tout le contraire, car c’est parce que les plus valides ont été infectés qu’ils évitent une prochaine propagation du virus », explique-t-il.
L’immunité collective ne peut intervenir trop rapidement
Pourquoi alors imposer des mesures de confinement à près de deux milliards d’habitants de la planète ? Pour Steven Van Gucht, virologue chez Sciensano et président du comité scientifique, l’immunité collective est également la seule manière de vaincre le virus. Le problème, c’est que celle-ci ne peut intervenir trop rapidement. « Si de nombreuses personnes tombent gravement malades en même temps, les hôpitaux seront surchargés. C’est pourquoi il est important de niveler le nombre d’infections et de prendre des mesures strictes afin que notre système de santé puisse faire face au nombre de patients. De cette façon, l’immunité collective est introduite lentement mais sûrement. Avec le temps, de plus en plus de personnes seront immunisées, et c’est ainsi que le virus s’arrêtera naturellement », a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse. D’où l’importance de respecter les mesures de confinement.
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