La thérapie cellulaire, la médecine qui régénère
Porteuse d’autant de défis que d’espoirs, la thérapie cellulaire fait l’objet de nombreuses recherches et études cliniques, y compris en Belgique. Son principe? Régénérer des tissus et des organes à l’aide de cellules souches que l’on peut cultiver, caractériser ou transformer en tissus.
Parfois qualifiée de « nouvelle révolution biotechnologique », la médecine régénérative incarne un changement de paradigme dans le traitement de nombreuses pathologies. Plutôt que de remplacer des tissus et organes, elle propose en effet de les régénérer et d’éviter ainsi, notamment, les rejets de greffe. Si cela pouvait encore ressembler à de la science-fiction il y a quelques années à peine, les progrès de la médecine ont transformé cette promesse en une réalité de plus en plus concrète. De nombreuses études cliniques sont désormais en cours dans des domaines aussi variés que l’hépatologie, l’ophtalmologie, la cardiologie, la traumatologie, etc.
Ce qui explique en partie les avancées réalisées dans ce domaine d’avenir, ce sont les progrès de la thérapie cellulaire. « Celle-ci ne se limite plus à implanter des cellules saines comme on le ferait dans le cas d’une greffe de moelle osseuse », relève Etienne Sokal, professeur à l’UCLouvain, chef de service aux Cliniques universitaires Saint-Luc et fondateur de la spin-off Promethera, dont c’est la spécialité. « Au fil du temps, on a découvert que les cellules souches ont la capacité de libérer un message dans leur environnement, par exemple pour diminuer l’inflammation, régénérer l’organe, etc. »
Ces cellules agissent un peu comme un multi-médicament dont le message et l’action peuvent être amplifiés grâce à des manipulations génétiques. « On peut par exemple invalider des gènes délétères et en insérer des bénéfiques pour corriger les déficits fonctionnels des cellules, ajoute Etienne Sokal. Les cellules souches peuvent également être intégrées dans des échafaudages pour créer de nouveaux tissus à implanter. »
La Belgique en pole position
La Belgique fait partie des pays les plus actifs dans le domaine de la médecine régénérative. La Wallonie investit depuis plusieurs années dans la thérapie cellulaire et, plus largement, dans les biotechnologies, notamment au travers de son pôle de compétitivité Biowin. « Il faut souligner la longévité de cette politique, car elle porte ses fruits et crée des emplois », observe le professeur Etienne Sokal. La Belgique compte par ailleurs une série d’acteurs qui produisent ou utilisent les cellules souches à des fins thérapeutiques. Novadip, qui est liée à l’UCLouvain et au CHU Saint-Luc, développe par exemple des implants tissulaires en 3D permettant la régénération osseuse ou cutanée. L’utilisation de cellules souches est aussi testée chez les animaux, notamment par RevaTis qui mène des études cliniques à propos de l’arthrose et des tendinites chez le cheval – deux causes importantes de perte de performance. La spin-off de l’ULiège prépare également des études sur les maladies dégénératives et oculaires touchant les animaux de compagnie. L’intérêt de ces démarches est non seulement de faire avancer la médecine vétérinaire, mais aussi humaine. « Les résultats obtenus peuvent servir de données précliniques pour la médecine humaine et permettent d’accélérer les autorisations et le processus d’entrée en phase clinique », précise son CEO Didier Serteyn.
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Produire à grande échelle
Les cellules souches possèdent donc un potentiel énorme, qui est de mieux en mieux connu et exploité. Les études cliniques en cours explorent notamment leurs possibilités face à des défaillances aiguës du foie, à l’insuffisance cardiaque chronique avancée, à l’arthrose ou encore à des syndromes respiratoires dus à l’infection à la Covid-19. Plus largement, la thérapie cellulaire offre des perspectives de traitement pour des maladies mortelles ou dégénératives actuellement difficiles à soigner.
La démocratisation de cette technologie reste cependant conditionnée à l’obtention des autorisations nécessaires et au défi de la production à grande échelle de cellules souches. Selon les besoins, celles-ci peuvent être prélevées dans le sang, le liquide amniotique, les organes ou encore les tissus adipeux. En Belgique, la spin-off RevaTis, de l’ULiège, a également mis au point une technique très peu invasive via une microbiopsie musculaire. « Une fois prélevées, les cellules souches sont cultivées pour les multiplier en grande quantité, les caractériser ou les reconditionner. Cela s’effectue dans des unités de production où elles peuvent être stockées », indique son CEO Didier Serteyn.
Diverses situations comme les régénérations tissulaires nécessitent des cellules souches autologues, c’est-à-dire issues du patient auquel elles sont réinjectées après production. « Cette médecine personnalisée devrait continuer à se développer mais, en parallèle, des entreprises cherchent à trouver une cellule universelle qui pourrait être utilisée pour tout le monde, précise Didier Serteyn. Cela permettrait de soigner plus de patients à partir d’une même production. » A suivre, donc.
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