Drogues: le gaz hilarant et ses effets secondaires… qui n’ont rien de drôle
Pour beaucoup de (plus ou moins) jeunes, le gaz hilarant est devenu un indissociable de moments festifs. Un moyen de « défonce » qui passe souvent pour être inoffensif. Pourtant, même une utilisation sporadique peut déjà comporter des risques pour la santé, de simples vertiges à la paralysie.
Ces derniers temps, on a beaucoup parlé du gaz hilarant destiné à « égayer » les fêtes organisées en catimini durant le confinement – du moins si l’on se base sur les innombrables ampoules et bombonnes retrouvées vides ou saisies par les autorités. Cet usage récréatif n’est toutefois pas nouveau: dès le XVIIIe siècle, les classes supérieures organisaient de véritables « laughing gas parties » pour profiter de ses effets. De nos jours, le gaz hilarant reste populaire surtout parmi les jeunes (adultes) et son utilisation semble en progression depuis quelques années sous l’effet d’une mode venue des Pays-Bas. On ne dispose pour la Belgique que des données d’une enquête sur la vie nocturne réalisée en 2018 par le VAD et d’une étude conjointe de l’ULB et d’Eurotox sur la situation à Bruxelles et en Wallonie. Il en ressort qu’environ 3% des jeunes de notre pays ont fait au moins une fois l’expérience des effets du gaz hilarant – contre 16% des ados néerlandais. D’après une enquête organisée au début de l’année par l’institut Vias, 14% des conducteurs belges de 18 à 34 ans déclarent en outre qu’il leur arrive régulièrement (tous les mois) de prendre le volant après avoir été exposés au gaz hilarant.
L’ivresse sans l’alcool
Le fait que le gaz hilarant (également connu sous le nom d’acide nitreux, de protoxyde d’azote ou d’hémioxyde d’azote) soit largement considéré comme une substance euphorisante sans grand danger n’a pas de quoi étonner. On peut en effet se le procurer à faible coût et en toute légalité, en grandes bombonnes ou en petites cartouches destinées par exemple à faire mousser la crème chantilly. Depuis mars 2021, sa vente aux mineurs d’âge est toutefois interdite dans notre pays et sa détention, sa commercialisation et son utilisation abusives peuvent déjà donner lieu à des sanctions administratives communales dans plusieurs villes. Ce gaz est transféré dans des ballons avant d’être inhalés, ce qui provoque presque immédiatement un état d’intoxication comparable à celui de l’alcool, parfois accompagné de fou-rires et d’hallucinations colorées. « Le gaz hilarant possède en effet des propriétés euphorisantes, anxiolytiques, antalgiques et stupéfiantes, explique Jan Tytgat, toxicologue à la KU Leuven. C’est d’ailleurs pour cela qu’on l’utilise notamment parfois, mélangé à de l’oxygène, pour apaiser les patients anxieux qui doivent subir une intervention médicale. Les personnes qui l’utilisent à des fins récréatives l’inhalent toutefois pur, juste pour l’ivresse qu’il provoque. »
En réalité, on ne peut pourtant pas dire qu’il s’agisse d’un bon euphorisant, puisque son effet ne dure que quelques minutes. Du coup, les consommateurs ont tendance à enchaîner un ballon après l’autre… et cette consommation immodérée est encore favorisée par des vendeurs véreux qui écument les soirées avec de grosses bombonnes de gaz. Dans un souci de réduction des risques pour la santé, certains recommandent donc de ne pas dépasser 5 ballons par séance.
Des vertiges à la paralysie
Même les doses « usuelles » comportent déjà des risques pour la santé. « Les consommateurs risquent par exemple des engelures s’ils inhalent le gaz directement à la cartouche, qui devient très froide lorsqu’on l’utilise, illustre Paul Van Deun, expert en assuétudes. Avec l’effet antalgique, ils ne remarqueront même pas qu’ils se blessent. Suivant la dose inhalée, la phase d’euphorie peut aussi être suivie d’une sensation d’abrutissement avec un émoussement des facultés de réaction et de coordination propice aux chutes… Prendre le volant dans cet état est donc une très mauvaise idée, d’autant plus si on a aussi consommé de l’alcool ou d’autres stupéfiants. Ceux qui inhalent régulièrement de grandes quantités de gaz hilarant rapportent aussi des effets indésirables tels que maux de têtes, vertiges, nausées, confusion et picotements dans les mains et les pieds. Des abus prolongés peuvent même déboucher sur des troubles des fonctions motrices voire sur une paralysie. »
« Ces problèmes sont dus à une carence en vitamine B12, dont le gaz hilarant perturbe le métabolisme, précise Jan Tytgat. Les végétariens et végétaliens, qui ont souvent déjà des taux de vitamine B12 relativement faibles, sont donc encore plus sensibles que les autres aux troubles neurologiques liés à la consommation de gaz hilarant. Une utilisation excessive chronique peut toutefois aussi entraîner des problèmes psychiatriques et notamment des troubles anxieux et dépressifs. Cette substance n’est donc absolument pas aussi inoffensive qu’il n’y paraît! »
Un article d’An Swerts
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