Ces asymptomatiques qui finissent par souffrir du Covid long: le phénomène encore inexpliqué
Problèmes respiratoires, « brouillard cérébral », perte de cheveux… Les séquelles du Covid sont nombreuses et touchent tous les patients, même ceux qui n’ont pas souffert de la forme sévère de la maladie. Pire encore: certains patients asymptomatiques peuvent soudainement développer des symptômes post-Covid, sans lésion apparente. Mais comment guérir un trouble dont on ne connaît pas la cause? « C’est là la grande difficulté du Covid long », explique le Dr Diego Castanares.
Pas de symptôme, pas de problème ? Les asymptomatiques échappent peut-être à la maladie, mais pas toujours aux conséquences sur le long terme… « On est resté asymptomatique, on n’a pas fait de test, et puis on se rend compte qu’on développe des symptômes de Covid long. C’est une situation compliquée », explique le Dr Diego Castanares, qui a participé à une étude du Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE) sur cette thématique.
Ce phénomène directement lié à la pandémie n’est pas un cas d’école, et il a fallu attendre plus d’un an après le début de la crise sanitaire pour en définir les grandes lignes: le Covid long, autrement appelé « affection post Covid-19 », « survient chez des personnes présentant des antécédents d’infection probable ou confirmée par le SARS-CoV-2, généralement trois mois après l’apparition du Covid-19 avec des symptômes qui persistent au moins deux mois et qui ne peuvent être expliqués par un autre diagnostic.«
Une définition néanmoins « susceptible de changer au fur et à mesure de l’émergence de nouvelles données scientifiques et de l’évolution de notre compréhension des conséquences du Covid-19 », souligne l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à l’origine de cette explication.
Quelles sont les séquelles du Covid sur le long terme?
Les symptômes les plus fréquents peuvent varier dans le temps, en fonction du moment où on les analyse. « Dans le rapport de la KCE, on a fait une distinction entre la phase précoce [du Covid long] – de 1 à 3 mois après Covid-19 -, puis de 3 à 6 mois et enfin, au-delà de 6 mois », détaille le Dr Diego Castanares.
- Durant les trois premiers mois, les patients souffrants de Covid long présentent les symptômes suivants: la fatigue (signalée par 16 à 98% des patients), l’essoufflement (dyspnée) (10 à 88%), des maux de tête (9 à 91%), ainsi que des troubles de l’odorat ou du goût (10 à 58%).
- Après 3 mois: la fatigue reste le symptôme le plus courant (16 à 78%), suivie des troubles cognitifs (« brouillard cérébral ») (6 à 55%), et des symptômes respiratoires (16 à 58%).
- Au-delà de 6 mois, seuls deux symptômes persistent: la fatigue et l’essoufflement.
Au secours, je perds mes cheveux!
À côté de ces symptômes courants, plusieurs patients ont rapporté d’autres troubles plus bénins mais néanmoins interpellant. « Une séquelle très spécifique du Covid, notamment, c’était les engelures aux mains et aux pieds », détaille l’expert. « Et la perte de cheveux également. Ce trouble est attribué à un phénomène: ‘l’effluvium télogène’. C’est une réaction de l’organisme, de type auto-immune, suite à un stress inflammatoire. La chute de cheveux n’est pas vraiment localisée, mais est plutôt globale. »
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Environ 10% des patients témoignent avoir souffert de ces lésions cutanées variées (rash cutané, pétéchies, engelures) et de cette perte de cheveux. Quatre autres études rapportent des fréquences encore élevées après 6 mois (entre 9 et 33%).
Diagnostiquer les patients, la difficulté du Covid long
Une fois les symptômes repérés, il faut encore faire une distinction: entre les patients hospitalisés qui ont souffert d’une forme sévère du Covid, et ceux qui n’en ont subi que des effets modérés sans jamais passer par la case « hospitalisation » ou encore les asymptomatiques qui ne se sont même jamais doutés avoir un jour été malades. Jusqu’à ce que les premiers symptômes post-Covid apparaissent…
« Les patients hospitalisés peuvent développer des symptômes de covid long qui ne sont pas nécessairement dus au coronavirus en lui-même, mais aux traitements, à l’hospitalisation et à la sévérité de la maladie« , explique le Dr Diego Castanares. « Si vous avez été sous respirateur aux soins intensifs pendant longtemps, vous aurez certainement des problèmes respiratoires qui vont durer un certain temps. Ou si vous avez été hospitalisé très longtemps, vos muscles ont fondu par inactivité, à cause du stress inflammatoire de la maladie. Vous allez alors avoir des soucis musculaires ou des problèmes de déconditionnement, et dans ce cas-là, faire un quelconque effort physique vous paraîtra particulièrement difficile ».
Mais à côté de ça, toute une série de personnes – asymptomatiques ou non – n’ont jamais été hospitalisées, ont souffert d’un Covid modéré mais vont quand même développer des symptômes de Covid long. Dans ce cas-ci, toutefois,les causes diffèrent. « Les personnes hospitalisées ont des symptômes provoqués par des dégâts pulmonaires – certains vont même devoir recevoir de l’oxygène. Mais si vous faites une radiographie du thorax des patients non hospitalisés, elle sera normale.«
L’hypothèse impossible à prouver: et si le système nerveux autonome était touché?
Quand l’imagerie médicale ne montre rien, difficile de déceler la cause d’un problème. « J’estime personnellement, mais on n’a aucune preuve, que ces lésions sont le signe que le système nerveux autonome a été touché par le Covid« , précise le docteur.
Le système nerveux autonome régule certains processus physiologiques sans effort conscient d’une personne. C’est-à-dire que ce système fonctionne automatiquement. Ce mécanisme contrôle notamment le sommeil, l’adaptation à l’effort, le transit intestinal… « C’est pour ça que certains se plaignent de diarrhée. Mais c’est impossible à démontrer. On ne peut émettre que des hypothèses. D’autant qu’on ne peut pas voir le système nerveux autonome via les différents techniques d’imagerie qu’on possède à l’heure actuelle. »
Un traitement? Oui, mais pas une solution miracle
En un mot: compliqué. Encore aux balbutiements de la recherche permettant de diagnostiquer précisément cette affection, guérir les patients relèverait presque de l’impossible, surtout quand ces derniers ne présentent aucune lésion apparente sur une imagerie médicale. Pour l’instant, « on n’a pas de traitement vraiment adapté qui permettrait d’améliorer les symptômes », ajoute l’expert, qui précise néanmoins que des études sont en cours afin d’analyser quelle serait la meilleure manière de soulager ces patients atteints de Covid long.
Mais il ne faut pas s’attendre à un remède miracle: « Ce serait un peu illusoire de trouver un médicament qui réglerait autant les problèmes respiratoires que les troubles cognitifs, ou encore les troubles d’odorat. »
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