Alcool : à partir de quel moment est-ce le verre de trop ?
Le début du mois de février annonce le lancement de la tournée minérale 2023, ce mois où le Belge s’abstient totalement de boire de l’alcool. L’occasion de se pencher sur notre relation avec l’alcool et de déterminer avec Pierre Maurage, psychologue et professeur à l’UCLouvain, à quel moment cette consommation devient problématique.
Durant 28 jours à partir de ce mardi, environ un Belge sur cinq ne consommera pas d’alcool. Un chiffre qui ne cesse d’augmenter au fil des années. En 2017, 120.000 personnes s’étaient lancées dans la Tournée minérale. Pour cette septième édition, près d’1,5 millions de Belges se sont lancés le défi.
Lancée par l’ASBL Univers Santé, cette pause de consommation d’alcool permet également de ressortir quelques chiffres clés liés aux boissons alcoolisées dans notre pays. « En moyenne, chaque belge boit pour 462€ de boissons alcoolisées par an. Pas si anecdotique que cela en pleine période d’inflation », indique Martin De Duve, directeur de l’ASBL. Avec environ 10.000 morts par an, l’usage nocif d’alcool cause 10,5% des décès en Belgique.
Mais avant d’en arriver à l’ultime échéance, une consommation excessive entraine le développement de nombreuses pathologies, comme des cancers, des maladies liés au système nerveux et bien d’autres. À partir de donc combien de verres la consommation d’alcool devient-elle problématique ? Un nombre précis de verres a été déterminé, mais il n’y a pas que cela…
Dix comme repère
Si pendant longtemps, une consommation raisonnable d’alcool était limitée à trois verres par jour pour les hommes et deux pour les femmes, les organismes de santé se sont mis également d’accord il y a quelques années sur un nombre de doses hebdomadaires limites à ne pas dépasser. « Maintenant, les recommandations de santé indiquent que la consommation devient problématique après plus de 10 verres par semaine. Une dose, c’est 10 grammes d’éthanol, donc un verre de pils 25cl ou 3cl d’alcool fort. », explique Pierre Maurage, professeur de psychologie à l’UCLouvain, spécialiste des thèmes liés à l’alcool et sa dépendance. Cette limite est notamment basée sur le fait qu’au-delà de 100 grammes d’alcool par semaine, le risque cardiovasculaire augmente de manière exponentiel.
Ce chiffre est en cependant à prendre avec des pincettes et ne sert que de repère pour la population. En effet, la corpulence d’une personne joue également un rôle majeure dans l’ingestion d’alcool. « Une personne qui fait 100kg aura un impact différent sur son corps par rapport à une personne qui en fait 50kg. »
Il faut ajouter à cela que si l’on parle d’une consommation « problématique », il ne s’agit pas forcément de dépendance. « Là, c’est un diagnostic psychiatrique qui doit être effectué », souligne Pierre Maurage. « Il faut d’abord se dire ‘J’ai un problème avec l’alcool quand j’ai, ou mes proches, le sentiment que je perds le contrôle et que cela a un impact sur ma vie professionnel et personnel’.» Ce mois d’abstinence lancé par Univers Santé est donc l’occasion idéale pour pouvoir se poser ces questions.
Quand la limite est-elle dépassée ?
L’alcool aura un effet différent d’une personne à une autre. Cependant, certains indicateurs peuvent déjà informer sur la limite à ne pas atteindre. Selon Aide-Alcool, lancé par les asbl Le Pélican (Bruxelles) et Le Centre Alfa (Liège), la sensation d’ivresse fera effet à partir de six à neuf verres, selon les cas. Après dix verres, les capacités de mouvements et d’élocution deviennent de plus en plus compliquées et des réactions physiques se font ressentir (visage rougi, pupilles dilatées, nausées).
A partir de 15 verres, le sentiment de confusion grandit et le risque de perte de conscience part en hausse. Finalement, dépasser le vingtième verre d’alcool est de loin le plus risqué, avec un ralentissement du pouls et de la respiration. Le risque d’une intoxication alcoolique, et potentiellement un coma, peut se produire rapidement.
La consommation en diminution constante
Comment les Belges se comportent-ils en matière d’alcool ? Il est difficile de déterminer cela avec des chiffres précis, encore moins récent. Les derniers en date remontent à 2018. Cette année-là, 7,4 % des hommes et 4,3 % des femmes avaient une consommation considérée comme dangereuse avec, respectivement, plus de 21 et 14 verres hebdomadaires.
Des statistiques qui peuvent inquiéter. Cependant, les Belges diminuent constamment sa consommation depuis longtemps, comme le constate Pierre Maurage « De manière générale, que ce soit en Belgique ou en Europe, la consommation d’alcool diminue de manière assez linéaire depuis 60 ans. On consomme moins d’alcool mais aussi différemment. On voit de moins en moins de personnes qui boivent tous les jours mais plus durant certains épisodes.
La crise sanitaire a pourtant eu un impact sur les habitudes, et a parfois eu des effets néfastes. « Pendant les confinements, la population belge s’est divisée en trois parties. Il y a ceux qui ont gardé leur consommation, ceux qui l’ont diminué parce qu’il n’y avait plus de contexte festif et ceux qui ont augmenté. Pour ces derniers, ce sont en général des personnes qui avaient déjà des problèmes d’alcool, mais leur augmentation personnelle durant la période a provoqué une recrudescence des consultations pour consommation excessive. » Il est malgré tout important de dire que depuis, la situation s’est stabilisée et sont redevenus à la normale, comme avant le début de la crise.
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