Dossier spécial Namur: un problème chronique de mobilité
Vu les spécificités de la ville, la mobilité en reste le noeud gordien. Tout au plus peut-on en atténuer les effets: par une fluidité automobile améliorée, par la conversion des usagers au réflexe multimodal et à l’usage des parkings P+R. Tout en accentuant la mobilité douce en centre-ville.
On adore Namur, mais admettons-le, y circuler à certaines heures se révèle souvent infernal. Berges, ronds-points, ponts, saturation des places de parking, déviations… « Je sais, soupire le maïeur Maxime Prévot. Namur sera toujours sujette à un problème chronique de mobilité, vu sa configuration spatiale et sa physionomie urbaine avec des rues étroites héritées de son passé médiéval. Il y a aussi les obstacles naturels à contourner, comme les cours d’eaux ou l’éperon rocheux de la Citadelle. »
Mais pas question d’altérer cette identité ancestrale en défigurant Namur par un ring ou de grands boulevards. La volonté de la ville n’est pas non plus de bannir la voiture de l’espace urbain. « Croire que cela réglerait tous les problèmes de mobilité est une illusion dogmatique, juge le bourgmestre. Notre but est davantage de soulager l’affluence automobile en pariant sur une attitude volontariste de l’usager. Cela passe par une politique plus persuasive que dissuasive. Chacun est libre de choisir sa mobilité. »
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Place aux parkings
Pour diminuer la pression automobile, le pouvoir communal table sur deux leviers. Primo, un réseau de parkings de délestage P+R en périphérie de la ville, destinés surtout aux personnes qui viennent travailler à Namur. La voiture garée, direction le centre grâce à des navettes de bus. Maxime Prévot déplore néanmoins que ce réseau P+R mette du temps à se construire car « la ville n’a pas la main sur des investissements du ressort de la Région wallonne et du TEC ».
Un souci évidemment ciblé par l’association Namur 2080 et son membre Franz Bodart: « Le projet comprenait trois parkings de délestage à trois entrées de la ville: Belgrade, Bouge-Champion et Erpent. Les deux premiers sont restés lettre morte et le troisième, ouvert depuis septembre 2020 et fort de 716 places, n’affiche qu’une très faible fréquentation faute d’aménagements de voiries nécessaires pour fluidifier le trajet des bus-navettes. »
Second levier, l’offre et la gestion du parking intra-muros visant à absorber le flot d’usagers, habitants ou visiteurs. « Déjà limitée, l’offre de parking en surface est appelée à encore se réduire au gré de nos nouveaux aménagements d’espaces urbains. C’est pourquoi de nouvelles poches de stationnement doivent être créées, essentiellement en sous-sol, explique le bourgmestre. Ces implantations sont planifiées aux quatre points cardinaux de la ville. Au sud, c’est le nouveau parking Confluence du Grognon. Au nord, d’ici trois ans, sera réalisé celui du nouveau quartier Léopold/centre commercial. A l’ouest, la zone réaménagée de l’ex-palais de justice disposera du sien. Tout comme à l’est, le site des Casernes totalement réaménagé. Soyons clairs, prévoir de nouveaux parkings n’a pas vertu à résoudre notre casse-tête mobilité mais bien à répondre aux problèmes de stationnement. »
Qui a dit « Système Transport Intelligent? »
La politique tolérante du maïeur a le don d’en agacer certains. Hélène Ancion en tête. La chargée de mission d’Inter-Environnement Wallonie s’insurge: « La première mobilité qu’une ville doit être capable d’améliorer, valoriser et étendre, c’est sa mobilité piétonne. Le réflexe de l’usager à utiliser sa voiture partout dans Namur se perpétue parce qu’on ne fait rien pour l’en dissuader. Quant à la création de nouveaux parkings, c’est une aberration. On continue à leur accorder une place disproportionnée dans une ville à la mobilité plus que problématique. »
Sur la mise en place du STI (Système Transport Intelligent), un système numérique conçu, via des panneaux à messages dynamiques et une application pour smartphones, pour renseigner les usagers sur le trafic, les travaux, les bouchons et les places de parking disponibles, l’appréciation de l’experte ne varie pas. « C’est un service principalement destiné aux automobilistes. Que ceux-ci reçoivent des notifications sur leur téléphone ou par l’intermédiaire de panneaux publics n’est pas de nature à améliorer la mobilité de la ville et la vie des autres usagers. Je ne comprends même pas comment on tolère cette incitation faite aux conducteurs à être sur leur téléphone. C’est absurde! »
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Prendre ses pieds
Soyons de bon compte, le bourgmestre est aussi le premier à pousser les Namurois à prendre leurs pieds… pour marcher et pédaler. La volonté est d’ailleurs claire de faire rouler les voitures au pas (maximum 20 km/h) dans le centre de la corbeille: « La mobilité que j’estime prioritaire, c’est celle des piétons, affirme Maxime Prévot. C’est pourquoi nous voulons opérer une extension sensible du piétonnier. » A court terme, celui-ci devrait, grosso modo, s’étendre de la rue de l’Inquiétude (au nord) à la rue des Brasseurs (au sud). Et en largeur, de la rue Godefroid (à l’est) jusqu’à la l’ hôtel de ville, rue de Fer et rue de l’ Ange incluses (à l’ouest).
Signe visible de cette orientation vers une mobilité douce qui fixe l’ordre des priorités – soit piéton, vélo, voiture – en coeur de ville: « Toutes les bandes des passages pour piétons sont repeintes en noir, pour signifier que le chouchou du bitume namurois c’est bien le piéton. » Suivi de près par le cycliste: « Partout où l’on pourra aménager des pistes cyclables on le fera, promet le maïeur. Tant pour aller au boulot qu’à l’école ou au théâtre. »
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