Memymom
En matière de photographie, le duo mère-fille a plutôt mauvaise presse. Soit qu’il soit balayé d’un revers de la main, on lui reproche alors son manque de sérieux, soit qu’il évoque par trop la « sexualisation malsaine » d’une Irina Ionesco à l’encontre de sa progéniture. Le duo bruxellois memymom, auquel le Botanique offre une saisissante rétrospective, prouve qu’une autre voie plastique est possible pour une telle cellule: la créativité narrative et la fécondation imaginaire.
Comment a commencé cette aventure à deux?
Marilène Coolens: Le projet est né dans les années 1990. Je photographiais mes enfants, Lisa et ses deux frères. Etant autodidacte, je n’avais pas d’intention artistique spécifique, juste l’envie de scruter les relations familiales par un autre biais. Aimant beaucoup se déguiser et jouer des rôles, Lisa était très demandeuse. Au fil du temps, elle a fini par prendre part à ce jeu, à explorer les possibilités narratives de ce système. Aujourd’hui, nous alimentons toutes les deux le corpus d’images, ensemble ou indépendamment.
En voyant votre travail, on ne peut pas s’empêcher de penser à Cindy Sherman.
Lisa De Boek: C’est logique. Cindy Sherman est l’artiste qui a influencé notre travail le plus durablement. Elle est là depuis le début. Dans les années 1990, Marilène a ramené un catalogue d’une de ses expositions qu’elle avait vue à New York. Ce fut pour moi une révélation. Je n’arrêtais pas de le feuilleter. Je trouvais qu’une incroyable liberté émanait de cette oeuvre.
Vos traitements chromatiques sont exemplaires. La couleur apparaît comme un filtre permettant d’atténuer le réel… L. D. B.: Oui, la violence ultralibérale est telle qu’il nous faut l’enrober, la mettre à distance, notamment par le biais de la couleur.
Comment naissent vos séries d’images? M. C.: Les images de Cheerleaders, par exemple, ont pris leur source dans une robe que j’ai ramenée des Etats-Unis. A partir de ce modèle, j’ai imaginé deux autres tenues. Nous avons ensuite eu l’idée de les faire porter par des mannequins dans le décor décati du Théâtre américain, près du Heysel. Le contraste entre la symbolique de ces vêtements et le destin malheureux d’un bâtiment incarnant le rêve américain nous est apparu comme une évidence.
Au Botanique, à Bruxelles, jusqu’au 1er août.
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