Une rencontre « sans animosité » mais sans initiatives concrètes entre Biden et Poutine
Le président russe Vladimir Poutine a indiqué mercredi que sa première rencontre avec son homologue américain Joe Biden à Genève avait été « constructive », sur fond de tensions bilatérales.
Le président russe Vladimir Poutine a jugé mercredi que son premier sommet avec son homologue américain Joe Biden avait été constructif, « sans animosité », mais n’a pas annoncé d’initiative concrète.
Les deux hommes se sont retrouvés à Genève pour essayer d’apaiser les tensions très fortes entre les deux pays.
« Il n’y avait aucune animosité », a-t-il assuré lors d’une conférence de presse suivant la rencontre.
« C’était une discussion franche et directe« , a reconnu M. Poutine, soulignant toutefois que ce n’était pas une compétition.
« Sur beaucoup de questions nos évaluations divergent, mais les deux parties ont démontré un désir de se comprendre l’un, l’autre et de chercher les moyens de rapprocher les positions », a ajouté le président russe.
Joe Biden ? « Je peux dire que c’est une personne constructive, équilibrée (…) et c’est ce à quoi je m’attendais », a commenté M. Poutine.
Signe d’un dégel
Seul signe un peu concret d’un certain dégel, M. Poutine a indiqué qu’il avait convenu avec M. Biden du retour de leurs ambassadeurs respectifs, rappelés plus tôt cette année pour consultations. Il a aussi jugé qu’un « compromis » sur un échange de prisonniers était possible.
Ils se sont aussi mis d’accord sur un dialogue en matière de « cyber-sécurité« , un des forts contentieux entre les deux pays.
Mais s’il a reconnu que les deux hommes avaient évoqué la question des droits humains, Vladimir Poutine s’est aussitôt lancé dans une longue diatribe contre les Etats-Unis sur ce thème: de l’attaque du Congrès le 6 janvier à un bombardement de civils en Afghanistan en passant par les violences policières à l’encontre de la minorité afro-américaine.
Quand au sort de l’opposant Alexeï Navalny, aujourd’hui emprisonné après voir failli mourir d’un empoisonnement qu’il accuse le Kremlin d’avoir fomenté, M. Poutine a simplement déclaré: « Cet homme savait qu’il violait la loi en vigueur en Russie ».
Joe Biden avait lancé cette semaine un avertissement au sujet du célèbre opposant. La mort de Navalny « serait une tragédie« , a-t-il dit. « Cela ne ferait que détériorer les relations avec le reste du monde. Et avec moi ».
Le président américain doit lui aussi s’exprimer devant la presse avant de repartir dans la capitale américaine.
Grande puissance
Il avait proposé au début des discussions à son homologue russe des relations plus « prévisibles » entre Etats-Unis et Russie, estimant que « deux grandes puissances » devaient gérer leurs désaccords de façon « rationnelle ».
Le premier sommet entre les deux hommes -un peu plus court que prévu- s’est achevé à 17H05 (15H05 GMT) à Genève.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, les deux dirigeants se sont brièvement serré la main.
La Maison Blanche revendiquait un double objectif: explorer les voies possibles de coopération et dissuader Poutine de poursuivre ses « activités déstabilisatrices » à travers le monde.
« Nous essayons de déterminer là où nous avons des intérêts communs et où nous pouvons coopérer. Et quand ce n’est pas le cas, établir une façon prévisible et rationnelle de gérer nos désaccords », a expliqué de son côté le président américain, au début de la discussion.
« Deux grandes puissances », a-t-il ajouté, dans un contraste marqué avec les termes de l’ancien président démocrate Barack Obama qui avait qualifié la Russie de « puissance régionale ».
Le 46e président américain a adopté un ton résolument ferme ces derniers jours à l’égard de l’homme fort du Kremlin pour mieux marquer le contraste avec les atermoiements et les ambiguïtés de son prédécesseur républicain, Donald Trump.
« Lignes rouges »
Joe Biden avait promis de dire à Vladimir Poutine quelles sont « ses lignes rouges ». « Nous ne cherchons pas un conflit avec la Russie, mais nous répondrons si la Russie continue ses activités », avait-il déclaré lundi à la fin du sommet de l’Otan à Bruxelles.
Même si la Maison Blanche n’a eu de cesse de souligner qu’il ne fallait attendre aucune percée spectaculaire, le président, âgé de 78 ans, sait que son premier déplacement à l’étranger sera largement jugé sur les résultats de cette rencontre très attendue.
Le président russe peut faire valoir une longue expérience: il a déjà côtoyé quatre autres présidents américains depuis son arrivée au pouvoir fin 1999.
Nombre d’experts s’accordent à dire qu’il a déjà obtenu ce qu’il désirait le plus: la tenue du sommet comme illustration de l’importance de la Russie sur la scène mondiale.
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Il était prévu que le sommet dure entre quatre et cinq heures, mais les délégations se seront finalement quittées au bout de 3H30 environ.
Après une rencontre en format réduit (les présidents américain et russe ainsi que les chefs de la diplomatie américaine et russe, Antony Blinken et Sergueï Lavrov), ils sont passés en milieu d’après-midi à une séquence de travail élargie.
Seul point de convergence entre la Maison Blanche et le Kremlin: les relations entre les deux pays sont au plus bas.
Pour le reste, les sujets de discorde sont nombreux.
L’une des questions les plus sensibles est celle de la désinformation en ligne et des attaques informatiques.
Au-delà de la tentative d’ingérence dans l’élection de 2016 au profit de Donald Trump, des cyberattaques massives ont récemment agacé Washington. SolarWinds, Colonial Pipeline, JBS: autant d’opérations imputées à Moscou ou à des groupes de hackers basés en Russie.
La Russie, qui a toujours démenti, accuse Washington de s’immiscer dans ses affaires en soutenant l’opposition ou en finançant organisations et médias critiques du Kremlin.
Le plus grand nombre de cyberattaques dans le monde provient de l’espace américain », a encore accusé M. Poutine mercredi et il a également critiqué l’absence de coopération en la matière de Washington.