Comprendre les raisons des tensions en Ukraine en cinq points
La crise russo-occidentale autour de l’Ukraine semble arriver à un point de non-retour. Les tensions montent, et aucun côté ne veut céder du terrain. Mais en réalité, quelles sont exactement les raisons de ce conflit ? Le Vif vous explique tout.
Un peu de contexte
Pour bien comprendre le conflit en Ukraine, il faut remonter en 1949. Dans un contexte de post-seconde Guerre Mondiale et de début de guerre froide entre les États-Unis et l’Union Soviétique, plusieurs pays européens, dont la Belgique, et les Américains créent l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan). L’objectif ? Éviter une expansion soviétique sur l’Europe Occidentale en créant une organisation militaire intégrée permanente qu’un autre pays ou alliance ne peut attaquer.
Mais entre 1989 et 1991, la guerre froide prend fin et se conclut par la chute de l’URSS. L’Ukraine et d’autres pays, faisant jusque-là partie de l’Union Soviétique, prennent leur indépendance. A côté de cela, l’Otan entame doucement son expansion dans l’Europe, en intégrant notamment la Hongrie, la Pologne et la République Tchèque en 1999. L’Organisation va même plus loin quelques années plus tard, puisqu’elle ajoute à sa liste de membres d’anciens pays de l’URSS : l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie en 2004.
Des présidents ukrainiens pro-russes, puis des pro-Europe
Toujours en 2004, l’Ukraine connait une crise politique majeure. Lors de l’élection présidentielle ukrainienne, Viktor Ianoukovitch, le candidat pro-russe, remporte les élections. Des élections truquées selon la population ukrainienne, qui décide de se rendre dans la rue pour manifester son mécontentement. Les Ukrainiens accusent notamment Vladimir Poutine d’avoir joué un rôle dans cette élection. Ces protestations, appelées « Révolution orange », portent leurs fruits puisque la Cour Suprême décide d’annuler le scrutin et d’organiser un nouveau vote. Finalement, c’est le rival Viktor Iouchtchenko qui remporte l’élection. Pro-européen, il ne cache pas son envie de se rapprocher de l’Union européenne et l’Otan. Une vision suivie par une partie de la population.
Mais malgré ses idées pro-occidentales, Viktor Iouchtchenko n’arrive pas à résoudre les différents problèmes économiques et sociaux dans le pays. En 2010, il ne passe pas au second tour des élections et c’est Viktor Ianoukovitch qui fait son grand retour. D’abord en pourparlers avec l’UE pour un accord de coopération, le président ukrainien se range ensuite du côté de la Russie en intégrant l’union douanière russe. Mais la population ne l’entend pas de cette oreille et quatre ans après son élection, la révolution de Maïdan oblige le président à prendre la fuite à Moscou, après que ce dernier ait autorisé les forces de l’ordre à tirer à balles réelles sur les manifestants.
Depuis, ce sont deux présidents pro-Europe qui se sont succédés. D’abord Petro Porochenko entre 2014 et 2019, puis Volodymyr Zelensky, l’actuel chef d’État ukrainien. Pour sa première visite à l’étranger, ce dernier avait d’ailleurs choisi de se rendre à Bruxelles pour rencontrer les différentes institutions européennes. Il affirme que « la priorité de sa politique étrangère est d’intégrer l’UE et l’Otan en tant que membre à part entière ».
Poutine veut garder la main sur les pays frontaliers de la Russie
Cette logique d’élargissement de l’Otan et le rapprochement entre l’Ukraine et l’Occident ne plait du tout à Vladimir Poutine. En décembre dernier, il avait une nouvelle fois exprimé sa colère envers l’organisation durant sa conférence de presse de fin d’année en affirmant que « tout nouveau mouvement de l’Otan vers l’est est inacceptable ».
Le président russe s’est souvent exprimé sur le sujet, expliquant notamment qu’une expansion de l’Organisation transatlantique vers l’est rompait une promesse datant de la fin de l’Union Soviétique. Une promesse dont il continue d’affirmer son existence, alors que même Mikhaïl Gorbatchev, alors dirigeant soviétique lors des pourparlers à l’époque, indique qu’aucune promesse n’avait été faite.
Mais l’Otan ne veut pas plier face aux multiples coups de pression de Vladimir Poutine. Dans sa politique de « porte ouverte » qui est inscrite dans son traité fondateur, l’organisation compte bien continuer son expansion, peu importe les conséquences géopolitique.
« Vous devez nous donner des garanties immédiatement. »
La tension monte
Entre décembre 2021 et janvier de cette année, des représentants russes, américains et de l’OTAN se réunissent régulièrement en vue d’entamer des négociations sur le « cas ukrainien ». Mais les russes ne sont pas venus pour discuter trop longtemps puisqu’ils amènent avec eux un document que les deux autres partis n’ont plus qu’à signer. Ce document, datant du 17 décembre, est en réalité un projet d’accord entièrement rédigé. Il stipule qu’en cas de signature, les États membres de l’Otan devront « s’abstenir de tout nouvel élargissement » et » ne pas mener d’activité militaire sur le territoire de l’Ukraine ainsi que d’autres États d’Europe orientale, du Caucase du Sud et d’Asie centrale. »
Dès le début des discussions, Vladimir Poutine se montre impatient. Quelques jours plus tard, le 23 décembre, il déclare : « Vous devez nous donner des garanties immédiatement ». Pour marquer un peu plus son ultimatum, il aurait envoyé 100.000 soldats à la frontière de l’Ukraine, en vue d’une possible invasion du pays.
Un avertissement qui n’est pas apprécié par l’Otan qui souhaite trouver un accord de manière pacifique, mais qui demande à ses pays membres de se tenir prêt pour envoyer sa Force de réaction rapide (Very High Readiness Joint Taskforce -VJTF), soit un déploiement d’environ 40.000 soldats. Les États-Unis sont particulièrement actifs dans ce conflit. Le président américain Joe Biden souhaite montrer sa force face à son vieux rival, mais il ne veut également pas voir une annexion du pays par les Russes, comme cela a déjà été le cas pour la Crimée.
En parallèle, et ce depuis la révolution de Maïdan de 2014, des combats entre rebelles séparatistes prorusses et l’armée ukrainienne sont observées dans le Donbass, dans l’Est de l’Ukraine. Toujours en cours à l’heure actuelle et ayant déjà fait environ 14.000 morts, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a récemment constaté une aggravation des conflits depuis le début de la crise ukrainienne.
Quelle issue à ce conflit ?
À ce jour, les tensions sont au paroxysme. Des moments d’escalade se sont multipliés ces derniers jours. Des tirs d’artillerie auraient été entendues dans le Donbass et jeudi dernier, une école maternelle a été bombardée dans l’est du pays. L’Otan voit ces attaques comme des provocations et un moyen pour les Russes de justifier une intervention en Ukraine.
Mais la voie pacifique est toujours la priorité pour l’Occident, et ce pour une raison économique. Ce n’est un secret pour personne, le prix du gaz et de l’électricité flambe en Belgique, comme dans une majorité des pays européens. Fournissant près de la moitié du gaz utilisé dans l’Union Européenne, la Russie a un moyen de pression sur une bonne partie pays membres.
Pour l’instant, personne ne peut prédire l’issue finale à ce conflit. Mais les esprits ne risquent pas de se calmer puisque l’armée russe a affirmé ce lundi avoir tué cinq « saboteurs » venus d’Ukraine en territoire russe, ce que les Ukrainiens nient en bloc.
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