Amazonie : les dernières tribus isolées pourraient disparaître
Les dernières tribus isolées d’Amazonie sont de plus en plus menacées par la multiplication des contacts avec le monde moderne et les autorités réexaminent leurs politiques envers ces populations pour mieux les protéger, avec cependant des succès limités.
Selon une série d’articles publiés dans la dernière édition de la revue américaine Science parue jeudi, des groupes entiers de ces populations indigènes sont en danger imminent de disparaître au Pérou et au Brésil, où elles sont le plus présentes. « Nous sommes au seuil d’une vaste extinction de cultures car ces populations sont parmi les plus vulnérables au monde », estime Beatriz Huertas, une anthropologue basée à Lima, dans un de ces articles. Même constat de Chris Fagan, directeur de l’ONG américaine Upper Amazon Conservancy, selon qui « on se trouve actuellement près d’une disparition étendue de cultures ».
Des siècles de colonisation ont montré combien les chocs entre civilisations peuvent être tragiques, rappellent ces experts. Depuis l’arrivée des Espagnols en 1492, il est estimé que 50 à 100 millions d’autochtones ont péri sur le continent américain, et avec eux des cultures entières. Tout en reconnaissant ne pas savoir précisément ce qui se passe dans ces tribus isolées, ces chercheurs expliquent que les contacts entre ces indigènes et des représentants du monde moderne se multiplient rapidement. Des habitants de villages intégrés dans la société moderne au Pérou comme au Brésil font aussi part d’une forte augmentation d’apparitions de ces indigènes, qui parfois font des raids dans leur maison en leur absence, volant et saccageant, indique une des études.
Outre le risque de confrontation, ce sont de banales infections comme la coqueluche ou la grippe contre lesquelles ces tribus n’ont aucune immunisation qui les tuent. Ces infections sont transmises au contact de bûcherons, de journalistes, de trafiquants de drogue et même d’anthropologues qui se rendent dans la forêt. C’est au Pérou que la situation paraît être la plus dramatique, selon ces experts qui estiment à 8.000 le nombre des peuplades indigènes éparpillées dans la forêt équatoriale. Le gouvernement de Lima a établi des zones protégées de trois millions d’hectares pour permettre à ces tribus de rester isolées mais cela pourrait ne pas suffire, selon les chercheurs. Au Brésil, où dans les années 1970 et 80, de 50 à 90% de certaines tribus ont été décimées par des maladies infectieuses après des rencontres avec des représentants du monde extérieur, les autorités ont pris des mesures drastiques pour empêcher de tels contacts et les limiter au strict minimum. Ainsi, de 1987 à 2013, des contacts ont eu lieu avec seulement cinq tribus.
Le gouvernement brésilien a recensé 26 groupes d’indigènes isolés dans le pays et pense qu’il pourrait y en avoir près de 80 de plus qui vivent cachés. Mais avec le développement rapide de l’économie brésilienne, la septième mondiale, les activités minières, agricoles et la construction d’axes routiers entre autres ont explosé en Amazonie, exerçant des pressions croissantes sur ces populations.